Des rapatriés venus de la RDC, depuis une année, vivent dans des conditions difficiles au centre de transit de Karagara. L’administration exige qu’ils aillent à Rutana contre leur volonté.
<doc385|left>Marie Ntabaringane, l’une de ces rapatriés est désespérée : « Nous venons de passer trois mois sans vivres ni médicaments. Chaque fois qu’on demande de la nourriture, l’administration nous rétorque d’aller à Rutana alors que nous sommes des peuples pêcheurs. » Cette mère indique que ses sept enfants risquent de mourir si rien n’est fait dans l’immédiat : « Le paquet retour constitué entre autres par des vivres pour six mois seulement est épuisé depuis longtemps. »
« On ne peut même pas couper du bois. »
Depuis, signale-t-elle, certains rapatriés vendent même leurs habits pour nourrir leurs familles. D’autres, soutient-elle, se servent dans les champs des voisins pour survivre mais cela comportent des risques « Des enfants sont souvent attrapés et battus par ces gens. » D’après elle, la tension est tellement vive que tout mouvement d’un rapatrié est scruté à la loupe à Karagara.
Zebulon Nahigombeye, chef du site, confirme ces propos. Selon lui, depuis quelques mois, la population avoisinante interdit à tout réfugié de couper du bois pour préparer le peu de nourriture qu’il glane. Il demande au gouvernement d’intervenir au plus vite afin de prévenir une catastrophe humanitaire.
Les regrets
A côté de ceux-là, d’autres n’ont plus confiance en l’administration. Ils se demandent même si le gouvernement pense à eux. K.M n’y va pas par quatre chemins : « Si j’avais su, je ne serai pas rentré au Burundi.» D’après lui, le gouvernement l’a convaincu de rentrer lui promettant une maison et une terre à cultiver. Mais rien de tout cela n’a été fait jusqu’à présent.
Cette amertume est partagée par G.H, un autre rapatrié vivant sur les lieux. « J’avais une maison et un champs à Ruvunge (localité du Sud Kivu) et j’ai tout vendu pour rentrer. » Selon lui, une délégation des membres du gouvernement et du HCR est allée en RDC. Elle leur a montré des vidéos des maisons qui leur appartiendraient et ils ont accepté de tout abandonner. « Je regrette énormément d’avoir cru en ces mensonges », lâche-t-il.
« Rumonge ne peut pas accueillir tous les rapatriés »
Gérard Ndikumana tranquillise ces rapatriés : « L’administration n’a aucun plan de chasser ces gens. » Toute fois, il se dit étonner de leur comportement. Pour lui, ces gens ont déclaré volontairement vouloir retourner chez eux. Personne ne les a forcé. Il ajoute que le PARESI leur a construit des maisons dans la province de Rutana et leur a apprêté des terres cultivables mais ils refusent de s’y rendre.
Concernant les vivres, l’administrateur de Rumonge promet d’en parler au HCR pour qu’on leur achemine un peu de riz et du haricot. Mais selon lui, ces gens devraient accepter d’aller à Rutana : « Rumonge ne peut pas contenir tous les rapatriés.» Cette exigence est confirmée par une source sous anonymat du PARESI. Iwacu a contacté le porte-parole du HCR, sans succès.
A leur arrivée en 2010, ces rapatriés ont passé une semaine dans les locaux de la commune Rumonge avant d’être acheminés, avec d’autres rapatriés venus de la Tanzanie, à Karagara. Ceux-ci ont, par la suite, été envoyés à Nyabigina dans la province de Makamba. Les autres refusent depuis trois mois de se rendre à Rutana où leurs maisons les attendent: « Nous sommes des peuples pêcheurs. Qu’allons nous faire à Rutana », rétorquent-ils.