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Commune Rumonge : impasse à Kayange

05/05/2013 Commentaires fermés sur Commune Rumonge : impasse à Kayange

L’administrateur communal vient d’aménager 150 parcelles dans la localité de Makombe. 40 ont été octroyées aux habitants de Kayange dont les maisons ont été détruites en 2011. Ceux-ci refusent de s’y rendre et dénoncent un plan pour les exproprier afin de vendre leurs parcelles aux particuliers.

<doc5098|right>Localité de Kayange. A trois kilomètres du chef lieu de la commune Rumonge. Une dizaine de maisons couvertes de pailles surplombent la colline Mutambara. Il est 10 heures. L’air est frais et la population s’adonne à ses activités champêtres. Malgré ce calme apparent, la colère est grande chez cette population. Une décision de Gérard Ndikumana, administrateur communal, est sur toutes les lèvres. « Il y a un mois, il a aménagé 150 parcelles dans une localité dite Makombe et voudrait que nous nous y installions par force », laisse entendre une femme sous couvert d’anonymat.

Reagan Ntangibirura, un habitant de Kayange et l’un de leurs chefs, n’y va par quatre chemins : « Il y a un plan pour vendre nos parcelles aux commerçants de Rumonge et c’est pour cela qu’il veut nous chasser de nos terres. » Selon lui, cette décision est en violation de la loi car ces habitants ont acheté ces parcelles en bonne et du forme. Et d’ajouter qu’ils ne quitteront jamais leurs terres. « Qu’il vienne encore une fois brûler nos maisons, comme il l’a fait l’année passée. »

La genèse

Pour P.M., une mère de quatre enfants qui a gardé l’anonymat, il est triste de voir un administrateur communal s’acharner sur ses administrés après qu’il ait brûlé leurs maisons. L’affaire remonte au mois de mai 2011 quand la police a tout détruit sur ordre de Gérard Ndikumana. La plupart des habitants avaient alors été recueillis par des amis.
D’autres passent des jours à dormir à la belle étoile jusqu’à ce que l’ombudsman, Cheikh Mohamed Rukara, se résolve à leur rendre visite et apporter un peu de nourriture. Nous sommes vers la fin de 2011. Une commission tripartite (population, administration et bureau de l’ombudsman) est mise en place pour trouver une solution.

Elle était, entre autres, chargée d’enquêter sur le vrai propriétaire des terres de Kayange, entre cette population et l’Etat qui les considère comme des terres domaniales, occupées illégalement. « Personne ne parlait à cette époque de nous chasser de nos parcelles. L’Ombudsman avait promis des tôles à celui qui fabriquerait des briques adobes et qui se serait construit une nouvelle maison », rappelle Reagan Ntangibirura.

Les accusations fusent

Une année après, se plaignent ces gens, alors que la vie commençait à reprendre son cours normal, voici que l’administrateur communal vient leur dire de partir : « Ce qui nous étonne, c’est la manière dont il a aménagé et distribuer ces parcelles, alors que le nouveau code foncier ne le lui permet pas », affirment-ils.
En effet, sur les 150 parcelles dont chacune mesure 20 mètres sur vingt, 40 ont été données à des gens de Kayange, alors qu’ils sont une centaine dont les maisons ont été brûlées. 10 ont été octroyées aux habitants du village de paix de Mutambara qui n’avaient pas eu des parcelles, 31 aux rapatriés de Karagara qui ont refusé de se rendre à Rutana et le reste aurait été vendu, selon ces habitants, aux commerçants de Rumonge.

Pis encore, toujours d’après ces habitants, l’administrateur communal a exigé que chaque bénéficiaire construise une maison de 10 mètres sur 7 en un mois. Ce qui est pratiquement impossible pour ces gens, en raison de leur pauvreté. Sans oublier que les habitants de Makombe, propriétaires de ces terres, ont aussi crié à l’expropriation à l’annonce de la nouvelle.

Depuis cette semaine, les habitants de Kayange ont décidé de porter plainte contre Gérard Ndikumana auprès de la Cour Administrative pour destruction de biens, car ils considèrent que la commission mise en place par l’ombudsman n’est pas parvenue à des résultats satisfaisants. « Personne ne sait si l’enquête a pris fin ou les résultats. L’administrateur communal s’arroge le droit de nous donner des parcelles en l’absence des membres de la commission et du ministère de l’environnement. C’est comme si on veut se débarrasser de nous », s’inquiète encore Reagan Ntangibirura.

L’administrateur s’explique

Gérard Ndikumana, administrateur communal de Rumonge, réfute ces allégations qu’il qualifie de mensongères : « Personne ne s’est opposé à la distribution des terres à Makombe, car il s’agit de 918 hectares, occupées illégalement, que l’Etat a récupéré. » Concernant cet octroi, le numéro un de Rumonge affirme qu’il a reçu l’autorisation du ministère de l’environnement.

L’administrateur communal de Rumonge réfute aussi les accusations selon lesquelles il compte vendre les terres de Kayange. Il assure qu’elles seront attribuées aux rapatriés de Mutambara en manque de terres cultivables : « Même ceux dont les maisons ont été détruites pourront en bénéficier, une fois qu’ils seront installés à Makombe. » Il les encourage vivement à y aller car celui qui construira sa maison recevra des tôles et une plaque solaire offertes par le président de la République. Quant à la plainte contre lui devant la Cour administrative, Gérard Ndikumana estime qu’ils en ont le droit. « J’espère que justice sera rendue », conclut-il.
Iwacu a contacté le ministère de l’Aménagement du territoire et le bureau de l’ombudsman pour qu’ils s’expriment, mais sans succès.

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