135 familles ont été chassées du site Gikumba, l’année passée, suite à la décision de l’administration d’y construire un village de paix. Elles dénoncent leurs conditions de vie, depuis cette expulsion. L’administration projette de les réinstaller au village Karurama, actuellement en construction avec l’aide du PNUD.
<doc5136|left>Secteur Rugeregere, à 4 kilomètres du chef lieu de la commune Rugombo. Une centaine de maisonnettes en paille surplombent la colline Musesekara. Plus de 200 personnes réparties en 135 ménages y vivent. Elles y ont été installées par l’administration en provenance du site Gikumba qui abrite actuellement un village de paix, à quelques mètres de là.
Assis devant ce qui fait office de sa maison, Léonard Hakizimana ne trouve pas de mots suffisamment durs pour exprimer sa colère : « Nous vivons dans la misère, depuis que l’administration nous a chassés du site Gikumba. » Pour manger, explique-t-il, les habitants de Rugeregere sont obligés de travailler les champs des autres pour survivre. Mais la concurrence est rude à cause de la main d’œuvre à bon marché à Rugombo. Ce père de huit enfants affirme que des familles passent des jours sans manger à leur faim, faute de travail.
Abandonnés à eux-mêmes
Il affirme que l’administration n’a rien fait pour eux, malgré plusieurs appels à l’aide : « Nous avons même contacté James Rupfuragira, président du conseil communal de Rugombo, pour lui faire part de notre précarité, mais il n’a rien fait. » D’après lui, James Rupfuragira leur a demandé d’être patients, leur promettant des couvertures et la construction de maisons sur ce site.
Eric Nzibarega, 25 ans, habitant le secteur Rugeregere, n’hésite pas à parler d’une trahison. D’après lui, lorsque l’administration leur a annoncé le projet de transformer leur ancien site (Gikumba) en un village de paix, elle leur avait promis des parcelles. Seules trente personnes les ont eues, alors qu’ils étaient plus de 400 personnes. « L’administration nous disait que celui qui se construira une maison en matériaux durables, bénéficiera de tôles et d’une plaque solaire offertes par le président. Mais ce sont plutôt des riches commerçants qui ont eu ces parcelles », assure-t-il.
Le début du calvaire
N’étant pas capable de construire, ils sont installés à Musesekara 2 par force, le 1er juillet 2011, après la destruction de leurs maisons et de leurs champs par des policiers. Eric Nzibarega se souvient : « C’est un jour que je n’oublierai jamais. Personne n’a eu le temps de prendre ses biens. On nous a transportés ici et chaque famille n’a reçu que trois mètres carrés d’espace pour se construire un abri. » Depuis cette date, il soutient que ces familles sont frappées par la faim car elles n’ont nulle part où cultiver, ce qui a occasionné plusieurs départs : « Nous étions plus de 200 familles à notre arrivée, mais certaines ont fui à cause de la faim. »
Cette faim a aussi occasionné plusieurs cas d’abandons scolaires, souligne ce cultivateur : « Comment envoyer un enfant à l’école le ventre creux ? » Il demande aux directeurs des écoles primaires de ne pas chasser leurs enfants à cause du manque d’uniformes: « La rentrée scolaire est pour la semaine prochaine. Nous les supplions de ne pas renvoyer nos enfants, comme l’année passée, car ces uniformes coutent chers (une pièce coûte autour de dix mille Fbu). »
<doc5137|left>Une solution pointe à l’horizon
Le plus dur, affirme Rumana Misago, un autre habitant de Musesekara, c’est le manque de tentes pour couvrir leurs abris. « Lorsqu’il il pleut, tout le monde sort de peur que ces maisonnettes de fortune ne s’écroulent au dessus des enfants », explique-t-il. Avec tristesse, ce sexagénaire confie que deux maisons se sont écroulées, lors des pluies de la semaine passée.
Béatrice Kaderi, administrateur communal, dit comprendre les difficiles conditions de vie des habitants de Rugeregere, mais elle les tranquillise. Elle affirme que la commune projette de les réinstaller dans un village actuellement en construction dans la localité de Karurama : « C’est un projet qui a débuté au mois de juillet 2012 avec l’aide du PNUD. Des briques sont en train d’être fabriquées à l’aide d’une machine et la construction des maisons est pour bientôt. » « Au total, affirme l’administrateur communal, 135 maisons seront construites pour toutes les familles résidant actuellement à Rugeregere. » Elle leur demande d’être patientes.