Goudronnage des routes et traçage d’autres voies de communication. Telles sont notamment les activités prévues pour viabiliser la colline Tenga de la zone Rubirizi en commune Mutimbuzi de la province de Bujumbura. Un projet du ministère des Infrastructures, de l’Equipement et des Logements sociaux. Chez une bonne partie de ses habitants, c’est la joie tandis que d’autres craignent pour leurs maisons.
« Oui. A voir le rythme d’installation des maisons à Tenga, c’est vraiment très nécessaire que la localité soit viabilisée, que des routes soient bien tracées. Cela donne même une valeur ajoutée à nos parcelles. Quand j’ai entendu parler de ce projet, je me suis senti soulagé, satisfait », confie I.B, un habitant de Tenga. Ce qui ne signifie pas, selon lui, qu’il n’y avait pas de voies de communication dans cette localité. Seulement, nuance-t-il, elles ne sont pas larges et des cas de constructions anarchiques existent. « Il suffit de faire un tour à Kagerure. On peut constater que certaines personnes ont construit de façon désordonnée. Elles n’ont pas laissé d’espaces où peuvent passer des tuyaux et des câbles de la Regideso. »
Le prénommé Déo, un autre habitant de Tenga, espère qu’avec ce programme de viabilisation, les voies de communication seront plus praticables. « Dans certains endroits, elles sont vraiment très étroites. » Ce père de famille, la quarantaine, indique que l’administration locale avait tout fait pour que les gens laissent assez d’espaces pour les avenues mais, certains propriétaires ne respectaient pas cette consigne. « J’espère que les services de l’Obuha vont corriger cela afin d’avoir des avenues en peu larges. », souligne-t-il. Il trouve qu’avec la viabilisation, le quartier sera aussi propre. « Je pense que les routes et les avenues seront macadamisées ou pavées. Cela va faciliter l’évacuation des eaux pluviales parce que les caniveaux seront aussi bien aménagés et construits. »
Il souligne qu’avec la saison pluvieuse, certaines avenues devenaient très boueuses et glissantes. « Il y a des endroits où on ne pouvait pas s’aventurer sans porter des bottines. Après la pluie, c’était un vrai calvaire. », précise-t-il. Il espère également qu’avec la viabilisation, d’autres projets vont suivre. Il cite notamment l’adduction en eau potable. « Ici, c’est vraiment très difficile d’avoir l’eau pour beaucoup de ménages. Rares sont ceux qui ont de l’eau potable en permanence. »
Prévoir des espaces verts et des infrastructures sportives
Sur le terrain, le constat est que de nouvelles maisons sont déjà habitées. Beaucoup de chantiers sont en cours. Il s’agit d’une localité aux allures urbaines. « Vous constatez que Tenga attire de plus en plus du monde. Malheureusement, nos enfants ne trouvent pas d’espaces publics verts pour se détendre. Nous demandons alors à ceux qui vont faire la viabilisation d’y penser », propose Joseph Butoyi, un habitant de cette localité.
Il trouve que ce genre d’espaces sont très nécessaires. « C’est là qu’on peut installer des terrains de jeux, organiser des fêtes ou tenir des réunions publiques, etc. Ces espaces servent aussi de lieux de loisirs. On peut y planter différents types d’arbres. »
Une demande que relaie aussi K.O, un autre habitant de Tenga. En se référant au Jardin public de Rohero en commune urbaine de Mukaza, il signale qu’un espace vert n’est pas seulement important pour les enfants. Les adultes en ont aussi besoin. Il estime par ailleurs que chaque quartier devait avoir son espace vert. « Nous espérons qu’avec ce programme de viabilisation, les services étatiques ne vont pas oublier cela. »
En plus de ces espaces verts, il trouve qu’il faut également un espace réservé aux terrains de jeux. « Si on veut que ça soit vraiment une localité bien aménagée, il faut penser à la construction des infrastructures sportives. Nos enfants, nos jeunes et même les adultes en ont besoin. » Comme le football exige un grand espace, il propose la construction des terrains de volleyball et de basketball ainsi que des pistes pour les marcheurs.
Des craintes aussi
A Tenga, malgré que le projet de sa viabilisation soit bien accueilli, les propriétaires de certaines maisons ont des demandes. « Dans les espaces non encore habités, nous avons entendu que ceux qui vont perdre des parcelles vont avoir d’autres de l’autre côté de route Bujumbura-Bubanza. Quid de ceux qui vont perdre des maisons ? », lance une maman, habitante de Tenga, rencontrée non loin de l’endroit dénommé Ntamagende. Cette mère de quatre enfants indique qu’elle vit là il y a déjà plus de 6 ans.
Tout en ne s’opposant pas à la viabilisation, elle signale que lorsqu’elle construisait sa maison, les histoires de constructions anarchiques n’existaient pas. « On essayait juste de laisser un peu d’espaces pour les piétons. Donc, aujourd’hui, nos maisons sont des constructions anarchiques selon les autorités. Si par malheur la route prend la totalité ou une partie de ta maison, est-ce qu’on sera indemnisé ou bien vont-ils nous construire d’autres maisons ? », s’interroge-t-elle. Elle trouve que les autorités doivent penser à cela.
Le prénommé Aloys, un autre habitant de Tenga s’inquiète également. Tout en appréciant aussi le programme de viabilisation, il estime qu’avant de passer à l’action, il faut penser à ceux qui vont perdre leurs maisons. « Aujourd’hui, la construction d’une maison coûte les yeux de la tête. Beaucoup contractent des crédits pour y arriver. Il y a peu de gens qui peuvent construire une maison sans crédit. Alors, que vont devenir les propriétaires de ces maisons dites » construites anarchiquement » ? Il faut prévoir un fonds d’indemnisation », plaide-t-il. Il craint lui aussi qu’une partie de sa maison risque d’être démolie.
Sur cette question des démolitions, Emmanuel Sinzohagera, président du Sénat et natif de la province de Bujumbura a tranquillisé les probables victimes : « Là où ils trouveront des constructions anarchiques alors que la route doit passer par là, je pense qu’ils vont les démolir et octroyer aux victimes d’autres parcelles ailleurs. Car, vous comprenez très bien qu’on ne peut pas accepter qu’une route ne passe pas suite aux constructions qui ne respectent pas les normes. »
Lors des travaux de développement communautaire organisés à Tenga le samedi 2 novembre 2024, Sinzohagera a appelé la population à comprendre que le développement du pays demande quelques fois des sacrifices, que certaines constructions soient démolies. « Les voies de communication comme les routes sont très importantes. Car, si elles n’existent pas, il devient très difficile voire impossible d’évacuer des malades vers une infrastructure sanitaire. Surtout que la maladie intervient pendant la nuit. »
Bannir les constructions anarchiques
Le programme de viabilisation de Tenga a été annoncé publiquement le 23 octobre 2024. « Il y a un projet que nous sommes en train de préparer avec la Banque mondiale qui va bientôt commencer dans la ville de Bujumbura. Il concerne en premier lieu le pavage de la voirie. A Tenga, il est prévu aussi une route goudronnée qui va partir de l’endroit dit Kwa Ntumangende jusqu’à Kunombe. La route va contourner Tenga jusqu’aux environs des plantations de palmiers à huile », a déclaré à la presse Dieudonné Dukundane, ministre des Infrastructures, de l’Equipement et des Logements sociaux après sa tournée dans cette localité.
En effet, a-t-il expliqué, là il n’y a pas de routes ni d’avenues. Il est très difficile d’avoir de l’électricité, de faire l’adduction en eau potable, d’être connecté à Internet, etc.
A cette occasion, il a indiqué que, pour les avenues secondaires entrant dans les quartiers, ses techniciens doivent se rendre sur le terrain pour faire d’abord la cartographie et déterminer les endroits concernés par le traçage. « Ces cartes seront affichées afin d’éviter qu’il y ait de nouveaux chantiers dans les espaces réservés à la voirie », a-t-il précisé. M. Dukundane a souligné qu’après l’affichage, les gens devront demander une autorisation de construire.
Le but étant, selon lui, d’éviter à tout prix des constructions anarchiques. Selon les témoignages des habitants de Tenga, ces techniciens sont déjà arrivés sur le terrain.
Concernant les parcelles qui vont se retrouver dans les espaces réservés aux avenues, M. Dukundane a indiqué qu’il a eu des consultations avec les services techniques et l’administration locale. « Il y a un autre espace qu’on va aménager et nous pensons que c’est là où les propriétaires desdites parcelles seront installés. » Il a par ailleurs précisé que ces activités ne concernent pas seulement Tenga. « Nous commençons par Tenga mais, ces travaux vont s’étendre sur tout le pays. »
Normalement, a-t-il reconnu, la viabilisation devait se faire avec la construction des maisons. « Mais, même après les constructions, nos techniciens savent comment procéder pour y tracer des avenues. Oui, elles ne sont pas larges mais l’essentiel est que la circulation soit possible. »
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