Un glissement de terrain avec éboulement, qui a eu lieu samedi 4 mars sur la colline Kibuye, a causé de lourds dégâts matériels. Les familles touchées mènent une vie misérable. Elles demandent une aide d’urgence.
Il est 11h. Nous sommes sur la colline et zone Kibuye, commune Isare, province Bujumbura. La journée est ensoleillée. Nous escaladons la sous-colline Kamisave II, très boueuse, jusqu’au sommet de la montagne. Là le spectacle est désolant. Le glissement est parti de là, passant du flanc jusqu’au pied de la montagne.
Beaucoup de débris de palmiers, de bananerais, d’arbres fruitiers, des troncs d’arbres d’eucalyptus sont éparpillés ici et là. D’autres jonchent les sentiers. Il y en a qui ont été ensevelis.
Des champs de cultures sont complètement dévastés. Différentes cultures sont sous les décombres. Beaucoup de maisons sont complètement détruites. D’autres présentent des fissures. Les habitants ont fui la localité par peur d’être emportés par les éboulements.
Les victimes désemparées
Elles broient du noir et réclament une aide en vivres, en couvertures et en matériels mais aussi en semences étant donné que c’est la période du semis.
Pétronie Nzohabona est une habitante de la sous-colline Kamisave II. Elle est en train de cultiver à côté d’un grand fossé creusé par les éboulements. Alors qu’il y a des fissures au même endroit, elle n’a pas peur : « J’avais déjà semé du maïs et du haricot mais tout a été emporté lors du glissement de terrain. Je reprends tout à zéro. Il me manque des semences. »
Mme Nzohabona et ses 10 enfants sont logés chez un voisin. Un lourd fardeau de plus pour ce dernier : « Nous essayons de partager le peu que j’ai. Nous demandons aux bienfaiteurs d’intervenir. »
Même calvaire pour Fabien Budigoma de la même colline, avec une famille de 14 personnes : « Nous menons une vie de chien. Nous sommes nourris par les voisins. Ce n’est pas facile, c’est un calvaire. »
Sa maison a été démolie. Il n’a rien récupéré. Il réclame une aide d’urgence pour construire, ne fût-ce qu’une maisonnette.
Interrogé sur la scolarisation des enfants, M. Budigoma dit que ces derniers continuent d’étudier : « Le matériel scolaire de mes enfants a été emporté. Ils vont à l’école. Un problème épineux à la veille des examens. Leurs condisciples les aident à reprendre les notes. Les résultats ne seront pas bons étant donné qu’ils travaillent dans de mauvaises conditions. »
Florence Maniratunga a 7 enfants. Ils logent dans une chambrette chez un voisin. Mme Manirantunga vit de l’agriculture. Elle aussi avait terminé de semer.
Elle réclame des semences ; mais les moyens lui font défaut : « Le haricot est devenu cher. Un kg revient à 4000 BIF. Je n’ai pas les moyens de m’en procurer. »
Risque de conflits fonciers
« En regardant les champs et cultures emportés, les dégâts ont touché au moins 15 ha », assure Emmanuel Gahushi, chef de colline Kibuye. Certains habitants, fait-il remarquer, n’ont plus de référence des dimensions ou des bornes de leurs propriétés.
Interrogé sur d’éventuels conflits fonciers qui peuvent éclater entre ses administrés quant à la délimitation de ces propriétés, cet administratif à la base reconnaît que « c’est possible ».
Toutefois, il tranquillise les uns et les autres que d’éventuels conflits seront gérés à la satisfaction de tout le monde. Et d’expliquer : « Pour ceux qui ont acheté, ils nous ont dit qu’ils ont les dimensions de leurs propriétés. Pour ceux-là, il nous sera facile de gérer le problème. »
Pour les propriétés familiales, s’inquiète-t-il, des conflits peuvent surgir. « Mais là aussi, en collaboration avec les médiateurs collinaires, nous allons nous y pencher et trouver un règlement à l’amiable », a-t-il rassuré.
Un samedi noir
Selon Emmanuel Gahushi, des pluies torrentielles mêlées de vents violents et de grêles se sont abattues, samedi 4 mars, sur cette colline aux environs de 15h. « Après la pluie qui est tombée plus de 2h, nous avons vu des glissements de terrains.
Les agents de secours et de protection civile ont pris des mégaphones et sifflets, invitant la population à quitter leurs habitations et vider les lieux », raconte-t-il.
D’après cette autorité collinaire, les dégâts sont nombreux. Les champs de cultures et les récoltes ont été emportés et des maisons détruites.
Les eaux de ruissellement et les éboulements, ajoute-t-il, ont tout emporté sur leur passage. Les habitants de cette localité n’ont rien récupéré.
Il donne le bilan provisoire : « Jusqu’à présent, 19 maisons ont été touchées. Elles se sont soit écroulées complètement, soit détruites partiellement. Même les animaux domestiques n’ont pas été épargnés. Six porcs et 4 chèvres ont été portés disparus. Mais pas de dégâts humains. »
Pour protéger les ménages touchés, l’administration à la base a exigé de tout le monde de quitter la localité.
M. Gahushi craint d’autres glissements : « Le danger n’est pas encore écarté. D’un moment à l’autre, d’autres éboulements peuvent se produire. »
Interrogé sur la prise en charge des victimes, l’élu collinaire reconnaît le fardeau des familles d’accueil : « Pour essayer d’alléger le fardeau des familles d’accueil, nous avons décidé que le mari et sa femme ne peuvent loger dans une même famille. Les enfants eux aussi sont partagés entre les familles. »
D’autres collines touchées
Dieudonné Nkorerimana, chef de zone Kibuye, fait savoir que les collines Nyarukere et Buyimba ont été également touchées. Selon lui, des pluies mêlées de grêles ont détruit des cultures. Sur la colline Buyimba, trois maisons ont été détruites.
Interrogé sur le rôle de l’administration locale dans la prise en charge des victimes, M. Nkorerimana indique que la population a fait un geste : « Les victimes ont pu partager une aide de 100 kg de haricots collectés dans le cadre de la solidarité locale. »
Par ailleurs, a-t-il rassuré, le gouvernement, à travers le ministère de la Solidarité, a promis de réinstaller les victimes dans une autre localité, du moins celles qui n’ont pas d’autre propriété dans la localité. Et d’ajouter que d’autres bienfaiteurs, tels que l’OIM et la Croix Rouge, ont promis d’intervenir.