Pour attendre la fin de la réhabilitation de l’ancien marché, l’administration de Gitega avait placé les marchands dans une place qui est au quartier dit ‘Vétérinaire’. Ce dernier s’est progressivement vidé de ses occupants. Les uns sont tombés en faillite, les autres ont pu louer des boutiques non loin de leurs anciennes échoppes. Ceux qui restent sont désespérés : pas de vente … Et l’herbe pousse.
<doc6023|left>Il est 9 h du matin, l’endroit est désert. Sur cette place du marché, la nature a repris ses droits. Les herbes ont envahi une moitié du terrain. Peu de marchands y restent mais comme ils le disent, ce n’est pas par gaieté de cœur qu’ils sont encore là. Ils n’ont nulle part où aller. Ils ne font que veiller sur le peu de marchandises qui leur reste.
Ils ont perdu tout espoir d’avoir des clients. Ces commerçants ne font que jouer aux cartes à longueur de journée dans ce marché sis au « quartier Vétérinaire ». Au lieu d’y croiser des clients, ce sont des vaches qui viennent brouter tranquillement de l’herbe tendre qui a poussé au milieu des kiosques en planches. Les bergers ne surveillent presque pas leur bétail. Ils n’ont pas de raison de s’inquiéter. La plupart des kiosques sont fermés. Ils sont vides.
L’un des ces commerçants qui résistent, fait savoir être là seulement pour attendre la soirée enfin de rentrer chez lui. Son commerce, il l’a presque oublié car selon lui, ses étagères sont presque vides. « Quand nous sommes venus ici, j’avais un capital de plus de 3 millions de Fbu. Mais regarde ce qui me reste, pas même pour 500.000 Fbu », s’emporte Rémy Bangurambona en montrant quelques paires de chaussures démodées qu’il garde encore dans son kiosque.
Pour lui, l’emplacement de ce marché a été mal choisi, une erreur d’appréciation. « Au début nous avions espéré que les clients s’habitueront et viendront en masse jusqu’ici comme dans l’ancien marché. Mais, nous constatons malheureusement aujourd’hui que nous nous sommes trompés en acceptant de venir ici. Nous n’aurions pas pu gaspiller notre argent en construisant ces kiosques qui ne nous servent à rien », déplore-t-il.
Difficile de joindre les deux bouts du mois
Mélchiade Ndayiragije est un fripier depuis une dizaine d’année. Selon lui, la situation est devenue catastrophique pour son commerce et surtout pour sa famille. « Depuis dix mois je travaille à perte dans ce marché de malheur. Je peine énormément à joindre les deux bouts du mois alors que je me débrouillais bien dans l’ancien marché. Maintenant, ma famille risque d’être jetée dans la rue, il y a deux mois que je n’ai pas payé le loyer », s’inquiète-t-il.
Saadi est tailleur. Les clients sont de plus en plus rares. Il est obligé de rester là jusqu’à la fin des travaux de l’ancien marché. Ses jambes s’ankylosent à force d’attendre, il prie pour que la rouille n’attaque pas les pièces de sa machine. Ironie du sort : il ne se présente plus au travail que pour raccommoder ses habits déchirés : « Mes amis tailleurs qui cousent des costumes sont partis depuis longtemps. » Il ne s’occupait que des habits un peu amples achetés chez les fripiers pour les ramener à la taille du client. Les fripiers n’écoulant plus leurs marchandises, Saadi se retrouve au chômage. Fervent musulman, il espère une main d’Allah pour changer cette situation.
Pour Montfort Bigirimana, conseiller communal chargé du développement, ces marchands doivent prendre leur mal en patience. Il affirme que la fin des travaux de réhabilitation de l’ancien marché est pour bientôt : « Les travaux de finissage se terminent avec le mois de janvier et ces commerçants pourront alors réintégrer leurs stands », rassure-t-il.