La grande majorité de ceux qui sont dans les cachots du BSR sont des jeunes et parmi ces derniers, il y a des mineurs. La plupart n’ont pas encore 18 ans. Certains y passent plus d’un mois et ils ne sont nourris que par des âmes charitables d’une manière irrégulière.
« Moi j’ai été pris au centre-ville à l’endroit communément appelé BATA ? Je n’ai pas de dossier vu que je n’ai rien fait, la police nous a embarqué et on nous a directement amené ici et nous sommes nombreux, il y a aussi des enfants que la police a prise dans la rue », affirme l’un d’entre eux.
Désœuvrés et visiblement faibles, quelques jeunes sont assis par terre dans la cour de la prison en train de fumer de la cigarette, ils se partagent la clope un à un, les autres sont allongés à même le sol.
« Ils ne dorment pas, ils ont simplement faims et cela fait presque quatre jours qu’ils n’ont rien mis sous la dent, dernièrement des âmes charitables sont passées et nous ont distribué des beignets et c’est la dernière ration qui est entrée ici », fait savoir un autre jeune.
« Je m’appelle Kevin et j’ai 9 ans », raconte un mineur avec un sourire. « Chez moi c’est à Buterere. Ma maman est très méchante, je choisis souvent de fuir la maison et aller dans les rues de la capitale là où la police m’a prise ».
Il dit regretter la rue : « Au moins dans la rue, je parviens à avoir de quoi manger, je ne vois pas d’ailleurs pourquoi la police nous enferme dans ces cachots alors qu’elle ne peut même pas nous donner de quoi nous mettre sous la dent », se désole-t-il.
« Il y’a même des cas où on voit sortir un détenu qui s’est évanoui ou peut-être qui est mort, qui sait ? Personne ne se soucie de ces jeunes amenés ici. Quand on leur apporte à manger, je suis très gêné quand je mange avec des enfants qui me regardent, on est en prison on partage le peu qu’on a mais ce n’est pas tout le temps », fait savoir un détenu.
Des âmes charitables se relaient pour nourrir ces jeunes détenus
Selon lui, la ration d’une seule personne ne peut pas nourrir toute la prison. « Moi j’ai un dossier mais mon cas n’est pas comme celui de ces jeunes qu’on amène comme si on venait les jeter ici et cela me fait de la peine parce que j’ai moi aussi des enfants », raconte ce détenu avec amertume.
Un groupe de chrétiens s’est organisé pour nourrir les détenus au BSR, mais il ne le fait pas régulièrement.« Nous collectons ce que nous pouvons, et une fois qu’on a ce qui nous semble nécessaire, c’est là qu’on décide d’y aller. On ne les assiste pas tous les jours, une semaine ou deux peuvent passer sans qu’on se rende là-bas ».
Pour ce groupe, la collecte n’est pas facile quand il s’agit de nourrir plus de 100 personnes.« Nous pensons qu’il y’a d’autres groupes ou association, sinon ce serait difficile qu’une personne puisse vivre sans manger pendant tout ce temps ».
Le Commissariat municipal, un centre de transit vers des centres adaptés
La Fédération nationale des associations engagées dans le domaine de l’enfance au Burundi (Fenadeb) affirme être au courant de cette situation carcérale de ces mineurs dans les cachots du Commissariat municipal en mairie de Bujumbura.
La Fenadeb estime que ces cachots ne sont qu’un centre de transit pour ces enfants et pour un temps qui n’est malheureusement pas bien précis.
« La Fenadeb a déjà recensé 24 enfants pour le moment qui sont détenus, parmi ces mineurs, 18 sont des enfants en situation de rue, 6 autres ont commis des délits tels que de petits vols, viol, … le Commissariat municipal en mairie de Bujumbura est pour ces enfants un centre de transit ». La Fenadeb reconnaît en outre qu’il n’y a pas d’assistance en ration pour ces enfants.
Il y a une politique du pays qui a été mise en place pour venir à bout de ce phénomène d’enfants en situation de rue, mais cela demande beaucoup de moyens notamment la mise en place des centres d’accueil et de rééducation.
Pour Ferdinand Simbaruhije, porte-parole de la Fenadeb, les associations militant pour le respect des droits de l’enfant, l’administration et les forces de l’ordre doivent travailler en synergie pour que l’encadrement de ces enfants soit une réussite.
« Depuis 2008 plusieurs enfants de la rue ont été remis à leurs familles mais certains d’entre eux reviennent dans la rue juste après, et cela est dû à plusieurs facteurs notamment la pauvreté, les conflits conjugaux et des mésententes dans les ménages », regrette-t-il.