Sheikh Sadiki Kajandi vient de se consacrer Mufti (interprète officiel de la loi musulmane) du Burundi dans une assemblée générale à Ngozi, ce 8 juillet 2012. Le conseil supérieur des sheikhs rejette les conclusions de cette assemblée.
<doc4718|left>« La tenue de cette assemblée a été entachée de beaucoup d’irrégularités », déclare d’emblée Jumatanu Kavakure, secrétaire général du conseil supérieur des sheikhs. Pour lui, les conclusions de cette assemblée sont nulles et non avenues.
Selon le secrétaire général, Sadiki Kajandi ne pouvait pas convoquer une assemblée étant lui-même suspendu. Seul, poursuit-il, le président de l’assemblée pouvait la convoquer. Jumatanu Kavakure affirme que seuls 20% des représentants spirituels étaient au courant de cette assemblée. « Même le conseil supérieur des sheikhs n’était pas informé alors que c’est lui qui entérine toutes les décisions de l’assemblée générale », a-t-il ajouté.
Sheikh Haruna Nkunduwiga, représentant légal a.i. n’y va pas par quatre chemins : «Il est inadmissible que Kajandi se déclare mufti car il n’a pas les compétences requises. C’est une injure pour les musulmans.» Haruna Nkunduwiga précise que l’assemblée générale de Ngozi est une mascarade. Selon lui, certains participants ne savaient même pas ce qui se trouvait à l’ordre du jour. Ils ne faisaient, précise-t-il, que lever la main. «Ils ont fait participer 50 personnes de Ngozi et une trentaine de Makamba, alors que chaque province ne doit pas être représentée par plus de 5 personnes.» fait remarquer Haruna Nkunduwiga.
« Sadiki Kajandi avait été destitué de son poste de représentant légal de la COMIBU, le 11 septembre 2011 pour manquements graves », ajoute le représentant a. i. de la COMIBU. Selon ce dernier, il était accusé de malversations et de détournement des biens de la communauté musulmane, de frais de mission exorbitants ainsi que des achats non concertés. «Aucun rapport financier n’a jamais été produit par Kajandi », déclare le représentant légal a.i. Selon Haruna Nkunduwiga, Kajandi n’avait ni un plan de travail, ni des projets pour la COMIBU. Il était aussi accusé de vouloir monter la communauté musulmane contre le pouvoir en place. Il est aussi soupçonné d’avoir détourné plus 30.000.000 Fbu destiné au conseil interconfessionnel. «
«Il n’y a rien de plus légale que cette assemblée du 8 juillet 2012»
Pour Sheikh Sadiki Kajandi, l’assemblée générale de Ngozi est légale. Il affirme que le quorum de 126 membres a été atteint. Même dépassé car, selon le Mufti contesté, 151 membres de l’assemblée générale étaient présents à Ngozi. Sadiki Kajandi est étonné par ces contestations car il n’y a jamais eu de protestations, lors des préparatifs de cette assemblée. «Les invitations ont été envoyées dans tous les bureaux régionaux.», déclare-t-il.
D’après lui, deux points étaient à l’ordre du jour à Ngozi. Prendre des sanctions pour certaines personnes qui perturbent les actions de la communauté musulmane, notamment Haruna Nkunduwiga et ses acolytes. « D’ailleurs, ces perturbateurs ont été rayés de la COMIBU », déclare Sadiki Kajandi. Un autre point était le renouvellement des instances de cette communauté.
<doc4719|right>Pour le nouveau mufti contesté, il a été élu par l’assemblée générale et c’est cette dernière qui a les compétences de le destituer. «Et non pas un petit groupe de perturbateurs.», martèle-t-il. Il s’étonne, d’ailleurs, qu’il ait été suspendu sans que le président du conseil supérieur des cheikhs soit au courant. Et d’ajouter : « Nous avions même l’autorisation du ministère de l’Intérieur. » Du reste, il rejette les accusations de détournement.
Pour Haruna Nkunduwiga, le ministère de l’Intérieur est complice. Il estime que le ministre ne pouvait pas autoriser l’assemblée de Ngozi, alors qu’il savait que Kajandi avait été suspendu. Le représentant légal a.i. de la COMIBU reproche au ministre Edouard Nduwimana de vouloir traiter cette question politiquement. «Ils jouent perdant, car cette question est purement islamique », souligne Haruna Nkunduwiga. Iwacu a cherché le ministre de l’Intérieur sans succès.