Bujumbura a accueilli ce 28 octobre 2024 le 17ème Forum du COMESA, le Marché Commun de l’Afrique Orientale et Australe), réunissant les dirigeants et les experts autour de l’intégration régionale. Les discussions ont porté sur l’agriculture résiliente au climat, la transformation minière et le développement du tourisme, avec un appel à renforcer les chaînes de valeur pour garantir une croissance durable tout en protégeant l’environnement.
« Accélérer l’intégration régionale par le développement des chaînes de valeur régionales dans les domaines de l’agriculture résiliente au climat, de l’exploitation minière et du tourisme », tel est le thème du 17ème Forum des opérateurs économiques de haut niveau du COMESA.
Lors de son discours d’ouverture, le Premier ministre burundais, Gervais Ndirakobuca, a rappelé l’importance de l’agriculture pour les économies de la région : « L’agriculture reste la pierre angulaire de l’économie du COMESA, contribuant à près de 40 % du PIB de la région et employant plus de 60 % de sa population ».
Toutefois, il a aussi souligné que ce secteur peine à atteindre son plein potentiel, évoquant « les infrastructures inadéquates, l’accès limité à la technologie et les barrières réglementaires identifiés dans un rapport de la FAO ».
Face aux défis posés par les changements climatiques, les discussions se sont concentrées sur l’agriculture intelligente et durable. Le ministre burundais de l’Agriculture, Prosper Dodiko, a insisté sur l’importance de développer une agriculture respectueuse de l’environnement : « Nous sommes obligés de travailler sur les normes environnementales et sociales. L’agriculture intelligente, ou agriculture de conservation, doit se focaliser sur la séquestration du carbone et la gestion de l’environnement ».
Le ministre Dodiko a souligné que le secteur agricole doit évoluer vers des pratiques « décarbonées » afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre. « Nous devons nous engager vers une agriculture qui séquestre le carbone, tout en assurant la gestion et la conservation de l’environnement ».
Le ministre de l’Agriculture a également insisté sur le rôle crucial de la recherche scientifique. « La science et la recherche doivent fournir des technologies agroécologiques durables, qui soient économes en eau et en énergie fossile », a-t-il affirmé. Ces solutions, selon lui, doivent être « socialement acceptables » et capables de soutenir le métabolisme des sols de manière optimale.
« Nous sommes dans la logique de trouver ces nouvelles technologies, nous allons rester dans une agriculture où nous allons chercher non seulement la sécurité alimentaire, mais nous devons alors faire face aux réchauffements climatiques », souligne-t-il.
James Chimwaza, président du Conseil des affaires du COMESA (CBC), a réaffirmé l’importance stratégique de l’agriculture pour le développement économique : « En plus de favoriser les exportations et le développement du pays, l’agriculture contribue également à améliorer la vie quotidienne de la population. Nous devons donc développer ce secteur pour garantir un avenir prometteur à nos prochaines générations, sans oublier la protection de l’environnement ».
Exploitation minière et tourisme : des secteurs à valoriser
Le Premier ministre burundais a abordé les opportunités offertes par le secteur minier : « Le COMESA abrite un tiers des réserves minérales mondiales et deux tiers des gisements mondiaux de diamants. Pourtant, ces ressources sont principalement exportées sous forme brute, avec peu ou pas de valeur ajoutée ».
Il a plaidé en faveur d’une transformation locale des ressources minières : « On ne saurait trop insister sur la nécessité de passer de l’exportation de minéraux bruts à l’ajout de valeur par la transformation locale ».
Pour le chef du Gouvernement burundais, une telle approche permettrait de générer plus de revenus et de créer des emplois, tout en stimulant les économies nationales.
Par ailleurs, il a souligné le rôle essentiel du tourisme : « Avant la pandémie de COVID-19, le tourisme représentait 6,1 % du PIB mondial et soutenait 289 millions d’emplois selon le Conseil mondial du voyage et du tourisme (WTTC) ».
Le Premier ministre Gervais Ndirakobuca a affirmé que, malgré les impacts dévastateurs de la pandémie sur ce secteur, le tourisme demeure un levier essentiel pour la reprise économique.
Le chef du Gouvernement burundais a mis en avant les prévisions optimistes de la Banque mondiale, qui anticipe une croissance de 50 % du tourisme en Afrique dans la prochaine décennie.
Il a également évoqué le riche patrimoine naturel et culturel du Burundi, avec des atouts tels que le lac Tanganyika et la biodiversité de ses parcs nationaux.
Il a appelé à une coopération régionale renforcée pour développer des stratégies efficaces, afin de stimuler le tourisme et d’intégrer les marchés, contribuant ainsi à la réduction de la pauvreté et à la création d’emplois.
La ministre du Commerce burundais, quant à elle, propose de faire de la COMESA une seule zone de destination touristique afin d’attirer plus de touristes. « Pour ce faire, on devra adopter un visa touristique unique dans la zone COMESA, afin de réduire les procédures, le temps et tout ce qu’il faut à un visiteur désireux de découvrir l’héritage touristique de cette communauté ».
Elle a également insisté sur le développement d’une image de marque touristique du COMESA pour promouvoir les atouts de cette zone. « Il est vraiment incompréhensible qu’au sein d’une même communauté économique visant une intégration efficace, nous demandions encore des visas pour visiter ou commercer avec un pays membre », souligne-t-elle.
La ministre Marie-Chantal Nijimbere appelle les décideurs de Comesa à envisager la suppression progressive des visas entre les pays membres pour stimuler le tourisme et le commerce.
Renforcer le commerce inter-régional
De son côté, la secrétaire générale du COMESA a mis en avant la stabilité des échanges intra-COMESA malgré un contexte économique mondial difficile : « Les exportations intra-COMESA sont restées stables à 14 milliards USD en 2022 et 2023, ce qui démontre la solidité des liens économiques régionaux ».
Cependant, Mme Chileshe Mpundu Kapwepwe a souligné que le niveau actuel de commerce intra-COMESA, estimé à 6 %, offre des marges de progression importantes : « En éliminant les barrières commerciales et en renforçant la coopération régionale, le COMESA pourrait égaler, voire dépasser, les performances d’autres communautés économiques régionales ».
Kapwepwe a également évoqué les efforts du COMESA pour faciliter la libre circulation des opérateurs économiques à travers l’assouplissement des exigences en matière de visa : « Une étude conjointe du Secrétariat du COMESA et du COC a révélé des progrès significatifs, avec plusieurs États membres autorisant l’entrée sans visa ou des visas à l’arrivée pour une durée maximale de 90 jours ».
Ce forum rassemble différentes délégations venant de plusieurs pays de la communauté pour préparer le 23ème Sommet des Chefs d’État et de gouvernements du COMESA, qui se tient ce jeudi 31 octobre à Bujumbura.