Mercredi 09 avril 2025

Politique

CNIDH : Un « démenti » qui confirme nos informations

09/03/2025 6

Par Antoine Kaburahe

Iwacu a sollicité l’éclairage du Président de la CNIDH, alors en voyage en Europe. Le journal lui a envoyé des questions, qu’il a bien reçues. Dans un premier temps, il a accepté d’y répondre avant de se raviser et d’envoyer un « démenti ». Il a invoqué la loi sur la presse pour en exiger la publication, et le journal s’est exécuté. Mais il semble oublier qu’un démenti peut, à son tour, être analysé et décortiqué par les journalistes.

Une analyse des chiffres qui soulève des incohérences

À l’examen, le « démenti » du Président de la CNIDH ne fait que confirmer nos informations.
Concernant le budget alloué au fameux « salon » de 149 544 352 FBu, il affirme que cette somme concernait en réalité l’acquisition de quatre salons. Pourtant, dans les documents transmis aux services des marchés publics, il n’est nulle part précisé que ce montant couvrait l’achat de quatre salons. En suivant cette logique, chaque salon reviendrait donc à :
149 544 352 FBu ÷ 4 = 37 386 088 Fbu
Or, dans son « démenti », le Président avance un autre chiffre : le coût d’un salon s’élèverait à 36 580 000 FBu. Un comptable fait remarquer que, dans ce cas, le coût total des quatre salons devrait être :
36 580 000 FBu × 4 = 146 320 000 Fbu
Un montant qui ne correspond pas à la somme de 149 544 352 FBu mentionnée dans les documents officiels.

Questions envoyées au Président de la CNIDH.

Par ailleurs, dans tous les budgets, il existe une colonne spécifiant la quantité des biens ou services acquis. Pourquoi alors le libellé indique-t-il « achat d’un salon complet » et non « achat de quatre salons »? Que signifie exactement « salon complet » ? Serait-ce un synonyme de quatre salons ?
Dans la partie « Résultat » du document budgétaire, il est clairement mentionné « un salon acheté » et non « quatre salons achetés ». Pourquoi alors le prix unitaire affiché est-il de 149 544 352 FBu et non 36 580 000 FBu ? Ces incohérences demeurent sans réponse.
En passant, on peut également s’interroger sur l’utilité pour la CNIDH de disposer de quatre salons. Les Burundais apprécieront…

Un budget colossal pour les voyages à l’étranger

Le « démenti » ne conteste pas non plus l’allocation de 476 000 000 BIF, soit 62,3 % du budget total de l’institution, aux voyages à l’étranger. Le Président se contente d’une explication laconique : « la somme a été régulièrement allouée ».

Mais la véritable question est la suivante : la Commission doit-elle consacrer une telle somme aux voyages à l’étranger, alors que ses missions primordiales se déroulent au Burundi ?
Encore une fois, les Burundais apprécieront…

Une accusation infondée contre Iwacu

Dans son « démenti », le Président de la CNIDH accuse Iwacu de chercher à « ternir son image et sa réputation ». Il n’en est rien. Le journal ne fait que son travail d’information et pose des questions légitimes. Le Président de la CNIDH est redevable devant les Burundais, il ne dirige pas une entreprise privée.

Les citoyens suivent cette affaire avec intérêt et saluent le travail des journalistes d’Iwacu.
Enfin, nous ne commenterons pas la sortie d’une haute personnalité burundaise qui, sur son compte X, qualifie Iwacu de « média de la haine qui fait de la désinformation ».
Les Burundais apprécieront…

Forum des lecteurs d'Iwacu

6 réactions
  1. Mugabo

    Au départ, je pensais que le président de la fameuse CNIDH avait acheté le fond de commerce d’un salon de coiffure VIP. Je me posais la question de savoir pourquoi la CNIDH investit dans les salons alors qu’elle n’a pas été créée pour faire le commerce sinon je trouvais le montant raisonnable. Après avoir compris que ari salon yo kwicaramwo, nta jambo musubira kunyumvako.

  2. Anonyme

    Un petit rappel issu du lien suivant [je n’ai pas pu retrouver celui d’Iwacu], https://burundi-forum.org/4740/projet-de-loi-sur-les-ong-etrangeres-globalement-salue-par-la-societe-civile/
    Une a exigé aux ONGs étrangères que 35% du budget soit affecté au fonctionnement et 65% consacré au développement du Burundi. Mais voilà, l’homme en question est pire que les ONgs étrangères / Agents de l’Etranger. Si les ONGs qui n’ont pas respecté cela ont été expulsées, pourquoi un mandataire comme celui-ci, qui agit de la sorte sur une partie du budget national, ne serait pas à Mpimba pour quelques années ?

  3. Bite

    Alors quoi dire avec des Députés qui ne suivent pas ce dossier: ils devraient demander au directeur de la CNIDH de démissionner et toute son équipe.

  4. hakizimana jean capistran

    Nimupfe gusemerera mais ivy’i burundi sinzi ingene tuzoshika muri ya mbono kazoza tugikoresha amakori y’umwenegihugu mwene uko. supposons que reellement c’etaient quatres salons mais que les trois autres seraient livres ailleur. Hama abantu tugashaza ngo turaberewe….

  5. Expert

    Un tel document de planification, encore au stade d’analyse, devrait bcp plus nous renvoyer à la planification stratégique de l’institution et éventuellement ses rapports avant d’en tirer des conclusions. Est-ce que ces achats étaient prévus dans le plan stratégique de la CNIDH? L’analyse du seul plan des marchés peut ne pas nous permettre de faire une analyse être objective. Quelques questions d’analyse : Quel est le circuit d’analyse des budgets? Qui est censé vérifier la conformité des documents de planification de chaque institution avec les priorités du pays?

  6. Baconib

    Bravo Kaburahe et Iwacu, votre travail est essentiel pour dénoncer ces abus. Il est incompréhensible et ahurissant que le média ou un journaliste soit attaqué pour avoir simplement exercé son métier en exposant la vérité.

    Votre analyse courageuse met en lumière une gestion catastrophique à la CNIDH !

    Ce n’est pas seulement un problème de mauvaise gestion, c’est une question de responsabilité envers les Burundais. Le rapport définitif d’audit organisationnel et d’analyse des comptes de la CNIDH, publié le 21 mars 2024 par la Cour des comptes, confirme ces révélations : des malversations et un gaspillage flagrant des fonds publics sont au rendez-vous.

    Plus de 62 % du budget ont été consacré aux voyages à l’étranger, alors que la protection des droits humains et les missions essentielles sont sacrifiées.

    Les dépenses de mission ont explosé de +201,7 %, dépassant largement les crédits budgétaires disponibles, tandis que les projets concrets pour les victimes de violations des droits humains sont négligés.

    À qui profitent réellement ces missions ? Certainement pas aux Burundais victimes de violations des droits humains.

    Par ailleurs, ne serait-il pas judicieux de confier certaines missions aux ambassadeurs burundais et de recentrer les ressources sur le terrain, pour enfin rétablir une gestion transparente et responsable ?

    De plus, la Cour des comptes relève des discordances entre les données financières et les rapports transmis. L’opacité dans la gestion des fonds, les violations des règles budgétaires et les privilèges indus accordés aux commissaires de la CNIDH soulignent l’absence totale de transparence. Les recommandations de la Cour des comptes sont ignorées, et pourtant, les dysfonctionnements sont évidents.

    Pourquoi une institution censée défendre la transparence, l’intégrité, l’éthique et surtout le respect des lois refuse-t-elle elle-même d’être suivre ces règles ?

    Vous ne faites qu’exercer son travail dénonçant ces abus et en appelant à une gestion plus responsable. C’est un travail essentiel pour la justice et la transparence dans ce pays. L’attaque contre vous ou votre média est injustifiée et dangereuse.

    Qui osera enfin rendre des comptes ?

    En somme, si la CNIDH veut regagner la confiance du public, elle doit revoir ses priorités : moins de voyages, plus de transparence, et une gestion rigoureuse des fonds publics. Les droits humains ne devraient pas voyager à l’étranger, ils devraient être défendus sur le terrain, au Burundi.

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