Jeudi 21 novembre 2024

Politique

CNDD-FDD : des contributions polémiques

CNDD-FDD : des contributions polémiques
Révérien Ndikuriyo : « La réquisition de ces fonds se fera sur les collines et dans les quartiers des villes selon les directives des secrétaires provinciaux du parti. »

Depuis quelques jours, les militants du Parti de l’aigle sillonnent les collines et les quartiers de tout le pays en exigeant des cotisations pour leur campagne électorale de 2025. Les lamentations fusent de partout chez les militants des autres formations politiques. Ils dénoncent des contributions forcées et estiment que, normalement, c’est une affaire entre les membres du parti au pouvoir. Pour certains politiques et activistes de la société civile, cette collecte de fonds orchestrée par le CNDD-FDD est illégale. Ils fustigent le silence du ministre de l’Intérieur.

La campagne électorale pour les élections de 2025 pointe à l’horizon. Le secrétaire général du parti CNDD-FDD a adressé, le 18 août 2024, une lettre aux militants et sympathisants dudit parti pour leur demander de contribuer volontairement et ainsi bien battre campagne.

« Alors que les programmes du parti à présenter pour les prochaines élections sont en cours d’élaboration, le secrétariat général du parti voudrait, par la présente, donner l’occasion et le droit à tous ceux qui aimeraient contribuer financièrement pour le bon déroulement de la campagne électorale en vue », peut-on lire dans ladite lettre signée Révérien Ndikuriyo.

Selon cette note, la collecte de ces appuis financiers est prévue du 19 au 29 août 2024. « La réquisition de ces fonds se fera sur les collines et dans les quartiers des villes selon les directives des secrétaires provinciaux du parti. » Les militants du Parti de l’aigle ont exécuté les ordres de la hiérarchie, parfois avec trop de zèle.

« Que tu sois membre du CNDD ou pas, tu es contraint de cotiser. On nous exige de contribuer 1 000 BIF par boutique ou stand, et on nous donne un reçu », racontent des commerçants propriétaires de stands ou de boutiques de part et d’autre des routes goudronnées entourant le marché de Ruvumera. Nous sommes dans la zone Buyenzi, commune Mukaza en mairie de Bujumbura. Là, ces derniers jouent aux cartes, aux dames, à l’ikibuguzo, en attente des clients.

À l’intérieur de ce marché, la situation est presque similaire. Des récits font froid dans le dos. « Ils sont venus en équipe. Ils nous disaient qu’il fallait contribuer pour les élections de 2025. Chaque commerçant ayant un stand doit donner, de gré ou de force, une somme allant de 5 000 BIF à 10 000 BIF. Ceux qui tentent de résister sont intimidés et finissent par verser cette somme. C’est vraiment dommage. Est-ce que n’importe quel parti qui veut battre sa campagne électorale va faire ainsi ? Est-ce que les contributions pour une campagne électorale d’un parti politique sont comparables à des contributions pour les élections générales ? » s’interrogent d’autres commerçants à l’intérieur de ce marché.

Au marché de Cotebu, dans la Zone Ngagara, commune Ntahangwa, toujours en mairie de Bujumbura, c’est le même modus operandi. Sur place, les moments sont durs, témoignent les commerçants. « Les clients viennent au compte-goutte. Ces contributions pour les élections, comme on nous dit, viennent aggraver la situation. » Ils indiquent que le montant à verser varie en fonction des stands. « Les petits commerçants doivent s’acquitter d’une somme qui varie entre 5 000 BIF et 10 000 BIF, tandis que les grossistes donnent 100 000 BIF par stand. »

Au marché de Kinindo, les commerçants indiquent que les Imbonerakure sont venus avec leurs livrets de reçus pour collecter les contributions pour leur parti. « La contribution était différente suivant les activités. Ceux qui ont des magasins vendant différents articles ont payé 100 000 BIF. Mais ceux qui ont peu d’articles payaient 1 000 BIF. Ils te donnaient un reçu estampillé au logo du CNDD-FDD », raconte un commerçant du marché de Kinindo. Selon lui, ces Imbonerakure ne demandaient pas ton appartenance politique. « Ils te disaient que tu es commerçant et que tu dois contribuer, c’est tout. »

Une scène à Bwiza

Les différents reçus de ceux qui venaient de contribuer

« J’étais assis dans le secrétariat public d’un collègue à Bwiza. Une femme est venue nous dire qu’elle était en train de collecter les fonds pour les élections. Je lui ai demandé si la réquisition de ces fonds se faisait désormais ménage par ménage. Après trois minutes, elle a commencé à nous acculer comme quoi on la faisait retarder », confie E.N., un jeune de Bwiza.

Ce jeune a alors commencé à poser quelques questions à cette envoyée du Parti au pouvoir pour avoir des détails. « Est-ce que les fonds alloués aux élections ne sont pas prévus dans le budget général de l’État 2024-2025 ? »

Selon ce jeune, la femme a insisté qu’ils devaient contribuer tout en leur disant que chacun allait contribuer selon ses moyens, mais à condition de ne pas aller en deçà de 1 000 BIF. Elle a même donné d’autres détails, signale notre source. « La contribution pour un secrétariat public, un bar et un restaurant modeste, c’est 5 000 BIF. Pour un bar VIP, c’est 10 000 BIF tandis qu’un hôtel, c’est autour de 100 000 BIF. »

Ce qui s’observe, témoigne toujours ce jeune, c’est qu’il y a ceux qui donnent des contributions non pas par leur propre volonté, mais par peur du lendemain. Et notre source de s’interroger : « Quel est le plafond de ces contributions ? Est-ce qu’on annoncera la somme collectée ? Est-ce que ce n’est pas cet argent qui sera utilisé pour la pratique de redistribution couramment observée pendant la campagne électorale ? »

En zone Rohero de la commune Mukaza, les magasins, les bars, les boutiques sont les cibles des Imbonerakure. N.K., une propriétaire d’une boutique, raconte : « Les Imbonerakure sont entrés dans notre boutique au centre-ville. Ils nous ont demandé de payer 1 000 BIF pour contribuer à la campagne du CNDD-FDD pour les élections de 2025. Nous leur avons demandé pourquoi on devait le faire alors que nous ne sommes pas membres de ce parti. Leur chef nous a répondu que lorsque nous rencontrons des problèmes, c’est à eux que nous allons nous adresser. Nous étions abasourdis par cette réponse. On a payé pour ne pas nous attirer d’ennuis. »

Une anecdote s’est passée dans une des résidences de la zone Rohero en mairie de Bujumbura. « Très gaillardement, un jeune du parti CNDD-FDD a toqué au portail de cette résidence. On a ouvert et il est entré », raconte un témoin. Selon lui, on l’a écouté attentivement, mais les choses se sont corsées. « Les propriétaires ont lâché les chiens et le jeune a pris ses jambes à son cou. Heureusement que la petite porte du portail était restée ouverte. »

Dans les provinces, le scénario est pire.

Les contributions du parti CNDD-FDD font également parler d’elles à l’intérieur du pays. En commune Shombo dans la province de Karusi, la population dénonce des contributions « forcées » tous azimuts. Selon plusieurs témoignages, des militants du CNDD-FDD passent de ménage en ménage pour collecter ces fonds « prétendument » destinés à la campagne électorale de ce parti en 2025. Ceux qui n’ont pas de reçu, portant l’insigne du parti de l’Aigle pour avoir contribué, se voient refuser l’accès aux marchés.

« Des cordes faites de morceaux d’habits usés sont érigées de part et d’autre à l’entrée des marchés et font office de barrières . Pour passer, tu dois montrer la preuve que tu as contribué pour le CNDD-FDD, c’est-à-dire montrer le reçu de cotisation, confient nos sources.» Et de s’indigner : « C’est intenable. Nous nous sentons étrangers dans notre pays. Par peur, nous sommes contraints de contribuer. Qu’ils s’adressent seulement aux militants du CNDD-FDD. »

Normalement, explique un représentant local d’un parti politique, une personne contribue volontairement pour un parti ou une organisation dont elle est membre. Il révèle que même certains militants du CNDD-FDD dans cette localité se lamentent : « Est-ce qu’un parti politique qui gouverne depuis 2005 n’a pas les moyens de battre campagne sans faire recours à nous, simples militants ? »

Selon les habitants de la ville de Ngozi, les militants du Parti CNDD-FDD demandent des cotisations à tout le monde. « Personne n’est épargné. » La façon de faire diffère d’un quartier à un autre. Dans certains quartiers, ils te menacent lorsque tu te montres récalcitrant, mais dans d’autres, ils passent leur chemin.
« C’est parce que nous vivons en ville. Sur les collines, c’est autre chose », confie un habitant du quartier Kinyami, au chef-lieu de la ville de Ngozi.

« Pour nous, les motards, c’est très difficile. En cas de refus, on peut te chasser du parking, car la collecte est faite par nos représentants. Pour éviter tout désagrément, on préfère payer », raconte André, un motard dans la ville de Ngozi.

D’après des sources à Ngozi, cette collecte des cotisations du CNDD-FDD est aussi effectuée dans les marchés ou dans les boutiques et magasins de la ville de Ngozi. « Quiconque a une place où il exerce une activité ne peut échapper à ce paiement, que tu sois membre du CNDD-FDD ou pas. Ils te menacent de fermer ton local. Tu es obligé de payer », raconte un commerçant de Ngozi.

En province Kirundo, les habitants racontent que c’est plus musclé que dans les autres provinces. « On ne peut pas envoyer un enfant puiser de l’eau sans montrer le reçu du CNDD-FDD. C’est vraiment du n’importe quoi », confie une habitante du chef-lieu de la province Kirundo.

« Des barrières ont été érigées sur les axes routiers . Personne ne peut passer sans montrer patte blanche. Sauf quelqu’un qui a vraiment un cœur dur », renchérit un autre habitant.

N.K., commerçant, indique que les militants du parti au pouvoir sont passés dans les boutiques et magasins pour collecter cette cotisation. « C’était très chaud la semaine passée.  Ils notaient celui qui a donné et celui qui ne l’a pas fait. Ils lançaient entre les dents que les Ibipinga (récalcitrants) allaient en baver. Par après, certains ont fini par payer de peur des représailles. »

Selon les habitants de la ville de Rumonge, les Imbonerakure font du porte-à-porte. « Je ne suis pas membre du parti au pouvoir, mais ils sont venus chez moi. Je n’étais pas présent, mais mon épouse leur a donné 1 000 BIF », témoigne un habitant du chef-lieu de la province Rumonge. Ce qui fait mal, poursuit-il, ce sont les conditions qui sont derrière.

« Tu ne peux pas bénéficier de certains services sans ce paiement. Mon épouse a envoyé notre enfant faire la queue pour avoir le sucre qu’on distribue dans les quartiers. Il fallait montrer le reçu de cotisation pour avoir du sucre. Comme mon enfant ne s’était pas muni de ce reçu, il a dû payer encore une fois 1 000 BIF. C’est grave ce qui se passe actuellement. »

Un autre habitant de Rumonge fait savoir que les marchés sont les cibles privilégiées des Imbonerakure. « Les marchés où la collecte est faite avec une grande acuité sont le marché de Kabumburi dans la commune de Buyengero, le marché de Gitaza en commune Muhuta, les marchés de Buruhukiro et Kizuka en commune Rumonge. »

Selon lui, les jeunes Imbonerakure interceptent les gens qui vont ou sortent des marchés afin qu’ils paient cette contribution. Dans d’autres localités, poursuit-il, on le fait d’une manière discrète, mais c’est un secret de Polichinelle. « Ils n’abordent pas directement les militants des autres partis, mais ils ciblent les petits commerces, les taxis-vélos, les taxis-moto, les boutiquiers et les autres qui exercent des activités générant des revenus . On ne te demande pas si tu es membre du parti au pouvoir, ils imposent une somme. En un mot, ce sont des contributions forcées. »

En province Rumonge, certains Bagumyabanga (militants du CNDD-FDD) se lamentent. « Ça cache des tricheries. Il n’y a pas de transparence. Les livrets des reçus n’ont pas de souches. Comment vont-ils faire le contrôle de l’argent collecté ? Pour moi, une certaine somme ne va pas atterrir dans les caisses de notre parti », confie Jean Pierre, un militant de la première heure du CNDD-FDD.

En province Gitega, certains commerçants dénoncent aussi ce manque de souches dans les livrets de reçus. « On nous a obligés de payer 10 000 BIF. La plupart de mes collègues ne veulent pas payer.
Ils disent qu’il manque des souches, que les reçus n’ont pas de numéros ni de cachets du CNDD-FDD. Nous sommes réticents. Si quelqu’un se rend dans un secrétariat public, il peut en fabriquer beaucoup »
, raconte un commerçant du centre-ville de Gitega.

En province Cibitoke, les habitants racontent que les Imbonerakure font aussi du porte-à-porte. D’après eux, les ménages paient 1 000 BIF, entre 10 000 BIF et 20 000 BIF pour les boutiques et les magasins, et 5 000 BIF pour les petits kiosques. « Lorsque les Imbonerakure arrivent, ils donnent directement le reçu sans rien vous demander . Si tu refuses de payer, ils profèrent des menaces ou ils prennent un produit dont le prix correspond au montant que tu devrais contribuer », raconte un boutiquier de Rugombo.

D’après les témoignages, les habitants ont peur, car ils sont menacés que ceux qui n’ont pas payé n’auront plus aucun service à la commune. « Je ne comprends pas comment on nous oblige à payer des contributions pour un parti politique alors que ce n’est pas un programme du gouvernement », se lamente un habitant de Rugombo.

« Là où le bât blesse, c’est que les administratifs sont aux abonnés absents alors que leurs administrés se font voler publiquement », renchérit un autre habitant de Rugombo.

IWACU a cherché le ministre de l’Intérieur, du Développement communautaire et de la Sécurité publique pour une réaction sur ces lamentations de la population, en vain. Nous avons aussi essayé de joindre Doriane Munezero, secrétaire nationale chargée de la communication du parti CNDD-FDD, et le secrétaire général du parti CNDD-FDD, Révérien Ndikuriyo, en vain.


Réactions

Agathon Rwasa : « C’est un énième signe du totalitarisme. »

« La collecte de cotisations forcées n’est qu’un énième signe du totalitarisme qui marque de façon indélébile la gestion du pouvoir par un semblant de parti politique qui a comme ligne de conduite l’extorsion à la Pablo Escobar », réagit le député Agathon Rwasa.

S’agissant du silence de l’administration, Agathon Rwasa trouve qu’il ne peut en être autrement. « On sait que le pouvoir paie une allégeance au parti de l’aigle et se fout éperdument de la Constitution et autres lois de la République. »

Pour M. Rwasa, cela augure un monopartisme et un parti-État comme système politique. « Il va de soi que les échéances électorales en vue risquent fort d’être marquées par les fraudes et autres maux, dont la violence. »

Tatien Sibomana : « Le CNDD-FDD se comporte comme un parti-État »

Cet Uproniste condamne avec sa dernière énergie cette façon de faire du CNDD-FDD qu’il qualifie d’illégale selon les lois et règlements en vigueur au Burundi.

Pour lui, quand bien même le CNDD-FDD est au pouvoir, il n’est pas un parti-État. « Forcer tous les Burundais à cotiser pour un seul parti alors qu’on est dans un système pluraliste, c’est violer les lois et règlements de la République. »

Là où le bât blesse, pense Tatien Sibomana, aucune autre formation politique n’oserait faire cela. C’est pourquoi il condamne le silence de l’administration, du ministère de l’Intérieur et du ministère public. Toute violation de la loi, dit-il, devait interpeller et l’administration et le ministère public pour agir en conséquence.

« Tous ceux qui sillonnent les collines, les vallées et les quartiers pour forcer les gens à contribuer au parti CNDD-FDD alors qu’ils n’en sont pas membres sont à châtier. »

Tatien Sibomana souligne que l’administration est complice. Si cela n’était pas le cas, explique-t-il, comment les gens sillonneraient-ils le pays sans que l’administration bouge le petit doigt pour condamner ceux qui sont en train de saigner la population.

« C’est une administration, non pas au service de la population en général, mais à celui du parti au pouvoir, le CNDD-FDD. C’est une complicité à peine voilée de l’administration, du ministère de l’Intérieur et du ministère public. »

Que ferait l’administration, s’interroge M. Tatien, si une telle pratique illégale est faite par un autre parti politique ?
Probablement, ajoute-t-il, que même les militants des autres partis n’oseront pas donner, aux yeux de l’administration, leurs contributions aux organes dirigeants. « Même si cela se passait au niveau de leurs permanences, je ne crois pas que cela laisserait l’administration silencieuse. »

Selon Tatien Sibomana, cette pratique est un signe qui ne trompe pas que le CNDD-FDD a peur d’avoir réellement des soutiens au sein de la population. Sinon, explique-t-il, s’il était sûr qu’il est soutenu par la population, pourquoi agirait-il par force ? Il ferait seulement un appel.

« Mais forcer les gens sur base de menaces comme quoi ils ne bénéficieront pas d’aucun service administratif à la base, cela montre qu’il n’est plus sûr du soutien de la population en sa faveur. Il devait d’ailleurs en tirer des leçons au lieu de se faire conscience qu’il est un parti-État. »
Cela augure également pour lui un processus électoral conduit de manière unilatérale et à sens unique.

Tatien Sibomona fait remarquer que cet argent collecté de cette manière peut être soit détourné ou servir pour l’achat des consciences. « Demain, ils vont acheter des pagnes et autres choses et revenir à la même population pour leur dire que ce sont les dons du CNDD-FDD, alors qu’en réalité, il s’agit de l’argent tiré de cette même population. »

Kefa Nibizi : « Ça n’appartient pas à un parti politique de procéder ainsi. »

Kefa Nibizi trouve que c’est très normal qu’un parti politique organise une contribution ou une cotisation pour une activité très importante comme les élections. La façon dont cette activité doit être organisée, c’est là où il faut mettre beaucoup d’attention.

En général, indique le président du parti Codebu, les militants devraient s’adresser aux permanences collinaires, zonales ou communales pour donner leurs contributions, ou bien ceux qui sont chargés de collecter ces contributions peuvent passer dans les ménages de leurs militants. « On ne devrait pas observer des forces. Des personnes qui ne sont pas militants du Cndd-Fdd peuvent donner leurs contributions parce qu’ils sont sympathisants, mais là aussi, ils doivent le faire volontairement. »

Ce qui est anormal, selon Kefa Nibizi, est que les gens qui sont chargés de collecter ces contributions passent partout sans distinguer les militants et les non-militants. « Quand on s’adresse à tout le monde, y compris les militants des autres partis politiques, il s’agit d’une violation de la loi parce que les seules personnes qui sont habilitées à le faire sont en principe les agents de l’État, et là aussi conformément à des textes légaux ou réglementaires. Ça n’appartient pas à un parti politique de procéder ainsi. »

D’après Kefa Nibizi, une autre violation est de menacer la population qu’elle ne va pas bénéficier de certains services de l’État si elle ne contribue pas au Cndd-Fdd.
Nibizi invite ainsi les dirigeants du parti au pouvoir à redresser leurs agents afin qu’ils puissent demander les contributions à leurs militants seulement ou à leurs sympathisants. « Il faut les instruire à cesser toute forme de forcing, voire même toute forme d’intimidation. »

Le président du parti Codebu critique le silence du ministre de l’Intérieur. Il aurait dû intervenir pour redresser cette situation. « Cela devrait être relayé par l’administration décentralisée. Malheureusement, tous travaillent dans la peur. Le parti au pouvoir ne peut redresser les torts qu’il commet ».

Selon lui, les administratifs doivent dépasser leur appartenance politique et défendre les droits de leurs dirigés.

Gaspard Kobako : « Contraindre des personnes à cotiser, quel que soit le motif, relève d’une imposture, d’une sorte de dictature. »

« Les militants devraient respecter au moins les instructions du Secrétaire général du Cndd-Fdd. En allant au-delà d’elles, c’est verser dans une anarchie, dans l’irrespect des règles et une violation de la loi. » Pour le président du parti Alliance nationale pour la démocratie, AND-Intadohoka, demander aux ménages, aux magasins, aux bars, et même aux voyageurs en véhicules de transport en commun est une transgression des libertés.

« Ces cotisations forcées ont été exigées, ce samedi, aux personnes venues de Bururi se rendant dans la capitale économique pour une célébration d’un mariage. C’est une exagération. Imaginez-vous si tous les partis politiques, futurs compétiteurs, s’adonnaient à de tels actes. Leurs jeunesses affiliées à leurs partis se rentreraient dedans. »

Pour Gaspard Kobako, contraindre des personnes à cotiser, quel que soit le motif, relève d’une imposture, d’une sorte de dictature. « Parler d’une démocratie devient en ce moment une pilule amère à avaler. C’est annoncer une chose et son contraire. »

Pour les prochaines élections, indique Gaspard Kobako, cela augure quelque chose de mauvais. « C’est une situation qui risque de dégénérer dans des violences post-électorales de 1993 et de 2015. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la haute autorité devrait nous éviter ce mauvais précédant. Elle doit nous servir de leçon. »

Phénias Nigaba : « La collecte des fonds pour des élections est régie par un cadre légal bien fixé. »

Selon le vice-président du parti Sahwanya Frodebu, la réquisition de fonds à travers tout le pays par les militants du Cndd-Fdd pour le « bon déroulement de sa campagne » est une activité illégale et forcée.

C’est ce qui ressort de son communiqué sorti du 28 août 2024. Cette note rappelle que la collecte des fonds pour des élections est régie par un cadre légal bien fixé.
« C’est ce cadre légal qui détermine ceux qui ont la prérogative de faire une telle activité, fixe le plafond de ces contributions ainsi que leur mode d’utilisation et de gestion », lit-on dans le communiqué.

Le Frodebu s’indigne du forcing utilisé dans la collecte de ces contributions et rappelle tout de même qu’en date du 12 avril de cette année, le chef de l’État avait déclaré que les fonds alloués aux élections sont déjà disponibles. Pour le Sahwanya Frodebu, une telle activité, non seulement viole la loi, mais également remet en cause ce message du président.

« L’État burundais, à travers ses ministères de l’Intérieur et de la Justice, est prié de faire leur travail et de mettre fin à cette activité illégale tout en remettant l’argent déjà collecté forcément à leur propriétaire », souligne le Frodebu.

Gabriel Rufyiri : « C’est du vol. »

« C’est illégal. Malheureusement, le parti Cndd-Fdd veut se comporter comme l’Uprona de l’époque, car il veut diriger comme un parti unique. » Gabriel Rufyiri rappelle qu’il y a des membres du Cndd-Fdd qui cotisent selon les points qui sont dans les statuts de ce parti et dans le règlement intérieur. « On n’adhère pas à un parti politique pour être sucé. On va dans un parti politique, dans une association ou dans une religion pour d’abord être avec les autres, mais aussi pour contribuer à la société dans laquelle vous vivez. Malheureusement, on constate que dans tous les groupements de ce pays, les responsables veulent à tout prix sucer les citoyens. »

Pour Gabriel Rufyiri, les militants des autres partis ne sont pas concernés par ces contributions pour le CNDD-Fdd. « C’est du vol parce que c’est en dehors de la loi. Le Cndd-Fdd doit demander ces contributions à ses propres militants et, là aussi, il faut demander ce qui est dans les statuts du parti. Les gens n’ont pas de moyens. »

Concernant le silence affiché par le ministère de l’Intérieur sur les lamentations de la population, Gabriel Rufyiri n’y va pas par quatre chemins : « Que ce soit le ministre de l’Intérieur ou d’une autre autorité, ils reçoivent des ordres, dans la plupart des cas, à partir du parti. »

Hamza Venant Burikukiye : « À part le chantage politicien, je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un qui a été forcé à payer. »

Pour le représentant légal de l’Association Capes+, contribuer aux élections reste un acte civique et preuve du patriotisme. « À part le chantage politicien, je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un qui ait été forcé à payer la contribution aux élections. Si on pouvait avoir ne serait qu’un cas concret de celui ou celle qui aurait été forcé à payer sa contribution aux élections, cela éclairerait mieux. »

D’après lui, ni l’administration ni le ministère de l’Intérieur, aucun n’a été silencieux. « Plutôt, il me semble, elle s’est méfiée du chantage calomnieux et intentionnel. »

Concernant les élections à venir, M. Burikukiye trouve qu’il n’y a pas à s’alarmer, si ce n’est que de céder à la manipulation politicienne et de semer la panique afin que le processus électoral soit torpillé.

Forum des lecteurs d'Iwacu

6 réactions
  1. hakizimana jean capistran

    sorry. ce commentaire concerne l’article sur l’education

  2. hakizimana jean capistran

    Si une telle decision etait guidee par la bonne foi de vouloir bien organiser et bien gerer les ressources disponibles circonscription par circonscription afin de voir comment relever les defis, cela ne causerait aucun probleme. Cela etant , sachant le Zele, le nepotisme, le Clientelisme, et le caractere politicien qui animent la plupart de nos administratif, le risque de derapage est grand et les disfonctionnements qui s’en suivraient ne fairaient qu’aggraver les defis qui minent le secteur educatif burundais.On ne peut pas toujours se resigner a l’accord du benefice du doute.

  3. kabingo dora

    Si j’ai bien compris cet argent finira non pas dans la caisse de l’Etat ( pour les élections) mais celle du CNDD-FDD ? C’est donc de cette manière que les Bunyoni ont amassé des fortunes qu’elles ont « blanchi » en achetant les 154 maisons . J’espère qu’il y aura un jour quelqu’un pour répondre de ces actes !!

  4. Kibinakanwa

    Excellente intervention de Venant Hamza.
    Quelle intelligence?
    Abo bana babuza nokuvoma, ntaco bikubwira?
    😇😅

    • Mukuri

      Ce monsieur Hamza Venant fait tout simplement de la comédie 🙂
      Jewe nibaza ko aba ariko arisamaza, ce qu’on appelle guswaganya!
      Sinon Il semble ignorer systématiquement toute donnée contradictoire à son opinion.

    • Stan Siyomana

      @Kibinakanwa
      « « La contribution était différente suivant les activités. Ceux qui ont des magasins vendant différents articles ont payé 100 000 BIF. Mais ceux qui ont peu d’articles payaient 1 000 BIF. Ils te donnaient un reçu estampillé au logo du CNDD-FDD », raconte un commerçant du marché de Kinindo » devrait suffir a Monsieur Hamza Venant Burikukiye comme cas concret de gens forces de payer.

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