Le Cnared s’est doté d’un nouveau comité exécutif, lundi 27 août, après un scandale qui a défrayé la chronique et remis en cause le crédit de cette plateforme de l’opposition en exil. Pour le bonheur de Bujumbura.
Le 26 août, Bujumbura, un dimanche plutôt calme et ensoleillé est troublé par les communiqués du président du Cnared. Grosse surprise, ils ne parlent pas politique, prochains rounds des pourparlers inter-burundais.
Non! Il s’agit plutôt d’une suspension et mise en garde de 3 membres de cette plateforme pour des histoires de quelques euros, de code d’accès du site et d’ordinateur.
Les suspensions de trois mois de tous les organes dirigeants du Cnared concernaient Frédéric Bamvuginyumvira, ancien premier vice-président de la République et jusqu’à très récemment le patron du parti Sahwanya Frodebu ainsi que Jérémie Minani président du parti RDB, membre du directoire du Cnared.
Le premier se serait servi dans les caisses une somme de 1120 euros et aurait confisqué l’ordinateur portable du travail. Le second a aussi gardé pour lui l’ordinateur réservé au travail. Un autre sur la sellette était Pancrace Cimpaye accusé de rétention du code du site web de l’institution. L’opinion est choquée par ces accusations. Normalement ce genre de détails ne se règle pas sur la place publique.
Des décisions vite balayées par le directoire de la plateforme réuni le lendemain, après la promesse des 3 concernés de rendre à César ce qui lui appartient. Cela avant de passer au vote du comité exécutif.
Au final, la surprise tombe, l’homme qui a signé les décisions, qui a provoqué l’esclandre la veille est reconduit à la tête de la coalition de l’opposition en exil. Jean Minani recueille 15 voix contre 13 de l’ancien porte-parole du président Nkurunziza, actuellement en exil, Léonidas Hatungimana.
Curieusement, les deux voix du parti Frodebu seront décisives dans l’élection de Jean Minani. Bamvuginyumvira ne comprendra que trop tard que ses camarades de lutte à Bujumbura lui ont tourné le dos et ont décidé d’offrir leurs deux voix à son meilleur adversaire, qui l’avait ridiculisé la veille à coup de sanctions pour quelques sous et un ordinateur vieux de 3 ans.
Du coup, on comprend que le patron du Cnared a pactisé avec le duo Léonce Ngendakumana et Pierre-Claver Nahimana. S’il est encore tôt de statuer avec certitude sur le jeu qui se joue entre les ailes du héros de la démocratie, l’hypothèse la plus probable est la réunification prochaine de ce parti en perte de vitesse.
Jean Minani a su tirer son épingle du jeu
Selon des membres du Cnared, l’histoire des laptops et de code d’accès à la veille des élections de la présidence de la plateforme prend tout un autre sens. Aucun doute. Jean Minani a choisi de fragiliser, d’humilier le camp qui réclame son départ de la présidence depuis des mois. « Sinon, comment expliquer que tout d’un coup il se souvient d’un vieil ordinateur amorti juste à la veille des élections et tienne à tout prix à rendre publique une affaire aussi mineure ? »
« Faux, » dira un autre membre du Cnared. Il souligne que bien avant les décisions rendues publiques par le patron de la plateforme, des injonctions avaient été faites à l’endroit de ces ‘récalcitrants qui refusaient d’obtempérer’.
Mais en définitive, en bon animal politique, sans états d’âme, Jean Minani a su tirer son épingle du jeu. Il a pu recueillir le nombre de vote suffisant pour rester aux commandes. Mieux, avec les nouveaux statuts du Cnared, il est au pouvoir pour une période de trois ans renouvelable.
Dans les couloirs du siège du Cnared à Bruxelles, nombreux sont ceux qui murmurent que Jean Minani seraient en pleines tractations avec Bujumbura. Une opération rapatriement de ceux qui sont lassés par l’exil serait avancée. Au grand dam de l’autre bloc qui ne l’entend pas de cette oreille et ne veut pas « laisser gagner Nkurunziza. »
Dans tous les cas, les élections tenues ce lundi ont créé un véritable fossé entre les deux camps qui, jusque-là, soufflaient le chaud et le froid. Il y avait eu des annonces de réconciliation mais apparemment c’est pour mieux replonger dans les guéguerres intestines.
Pour rappel, au lendemain de la session du 4 et 5 août, le porte-parole du Cnared, Pancrace Cimpaye, avait annoncé la fin des dissensions qui avaient caractérisé cette coalition au début du mois de juillet.
Des conflits se sont donc exacerbés ce lundi 27 août avec les élections des autres membres du comité exécutif faites sans la participation de ceux qui avaient soutenu Léonidas Hatungimana.
A ce stade, le constat est vite fait. Le crédit et la confiance placés par les Burundais en cette coalition de l’opposition en exil est fortement entamée. L’incarnation d’une alternative face à Bujumbura est à chercher ailleurs, indiquent plusieurs observateurs. Visiblement, la coalition de l’opposition en exil ne parvient pas à gérer la guerre des égo et son manque de vision commune.
De son côté, Bujumbura jubile. Si chaque autorité interrogée dément les accusations d’influence du vote à Bruxelles, il n’en demeure pas moins que le pouvoir en place s’en frotte les mains. Le Conseiller principal du président de la République, Willy Nyamitwe, dira : « Il est vrai qu’on ne tire pas sur un cadavre mais j’ai toujours soutenu que le Cnared ne pourra pas tenir comme son prédécesseur l’ADC-Kibiri.»
Du côté de l’opposition interne, le patron de la coalition Amizero y’Abarundi, Agathon Rwasa, a toujours déclaré que cette guéguerre ne profite qu’au pouvoir en place.
A la veille du prochain round des pourparlers que le bureau de la facilitation dit être le dernier, le Cnared avait plutôt intérêt à accorder ses violons. Parler le même langage, fort et uni pour convaincre. Les enjeux sont cruciaux. Il s’agit pour la facilitation de veiller à l’ouverture de l’espace politique, créer un climat propice au rapatriement des réfugiés, des politiciens et de la société civile en exil ainsi que de préparer les élections de 2020. La communauté internationale semble également vouloir clôturer le processus des pourparlers. Le temps ne joue pas en faveur du nouveau staff du Cnared qui doit gérer la crise interne et se tenir prêt à participer à cette prochaine session.
Une réconciliation qui n’a pas fait long feu avec le scandale de ce dimanche qui va faire les choux gras des chroniqueurs et alimenter les réseaux sociaux.
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