La vie chère et la récente grève générale des syndicats, ont été les sujets dominants lors de la dernière émission de club de la presse no 55.
Pour Innocent Muhozi, le mouvement a été une réussite même si par principe, il désapprouve le fait de recourir à une grève. « Mais c’est un droit », a-t-il reconnu. Néanmoins, il a été particulièrement scandalisé par la tentative d’ethnisation du mouvement : « Si vous décodez le discours du porte-parole du gouvernement, ceux qui ont déclenché le mouvement de grève, ce sont les mêmes qui sont à l’origine des villes mortes. Qu’on nous ramène à ce petit jeu malsain, c’est vraiment odieux. Il va falloir comprendre que nous sommes en démocratie. Si les gens ont besoin de protester, ils en ont le droit tant qu’ils respectent la loi. »
Alexandre Niyungeko estime que le gouvernement devrait prendre au sérieux ces revendications en acceptant le dialogue au lieu de crier à un plan de déstabilisation. Pour lui, le pays est en démocratie et il est permis de s’exprimer : « La grève est un des moyens d’expression démocratique. » Il a déploré les intimidations de limogeage faites aux des travailleurs qui ont observé le mouvement de grève.
Pour Gérard Nzohabona, au lieu de donner tord aux grévistes, il fallait un discours d’apaisement : « La bassesse n’a plus de limites au Burundi quand on écoute les différentes menaces proférées par les autorités aux grévistes. »
Contradictions dans la couverture médiatique de la grève
Le sujet principal de la seconde partie de l’émission a porté sur la façon dont les médias ont couvert la récente grève générale sans pour autant reporter les mêmes informations. La question était de savoir s’il y a eu manipulation ou pas. Le Conseil National de la Communication (CNC) a mis en cause certaines radios pour avoir changé de grilles et consacré beaucoup de temps à la couverture de la grève au détriment des programmes habituels.
Pour Innocent Muhozi, directeur général de la radiotélévision Renaissance et président de l’observatoire de la presse au Burundi (OPB), rien d’étonnant à ce que les médias couvrent différemment un même événement. Il existe des partisans du gouvernement, de l’opposition et d’autres plus neutres : « On n’y peut rien lorsqu’’un journaliste choisit délibérément de nier les faits. »
Selon Alexandre Niyungeko, président de l’Union Burundaise des Journalistes (UBJ), «les journalistes sont là pour dire la vérité. Ceux qui ont tenté de nier l’évidence se sont piégés. La population est aussi là pour évaluer. »
Gérard Nzohabona, journaliste indépendant, quant à lui, a trouvé bizarre les contradictions qu’il y a eu dans la couverture: « Mais ce qui m’a fait plaisir, d’un autre côté, la plupart des médias ont rapporté la réalité. La ville de Bujumbura était vide. Il y a cependant une facette complètement négative quand le porte-parole du gouvernement parle, le lendemain de journée ville morte. »
Pour Omar Farouk Ousman, l’actuel président de la fédération internationale des journalistes, l’expression par la grève est un signe d’une bonne démocratie : « Les médias doivent être au service du public, ainsi pratiquer un vrai journalisme, impartial, libre et indépendant. Si la liberté d’expression est garantie, la liberté de conscience est aussi garantie. » Il estime que les médias, surtout les privés, ont fait un travail équilibré : « Tout n’a pas été parfait. L’important est de garantir la liberté d’expression.»