Nuisible pour certains, une matière première pour les autres, la jacinthe d’eau envahit certains endroits du lac Tanganyika et son littoral. Claver Sibomana, professeur associé à l’Université du Burundi, Faculté des Sciences, Département de Biologie, spécialiste de l’écologie des écosystèmes aquatiques, fait le point.
La jacinthe d’eau est de plus en plus présente au bord du lac Tanganyika. Votre commentaire.
La jacinthe d’eau est d’abord une plante envahissante. Et la principale caractéristique des plantes envahissantes, quand elles arrivent dans un milieu, elles prolifèrent. Et ce, en principe, aux dépens des autres espèces. Ces plantes causent des dommages sur la biodiversité, sur des moyens de subsistances des populations mais aussi sur l’équilibre de l’environnement où elles s’étendent.
Au niveau écologique, la jacinthe d’eau va avoir un impact négatif sur la qualité de l’eau, les plantes aquatiques et les animaux.
Comment ?
Elle empêche la pénétration de la lumière et l’air dans l’eau. L’air est utile pour la respiration des animaux. Ce qui a un impact négatif sur les poissons par exemple, les plus petits végétaux (phytoplanctons) consommés par les poissons, etc. Et tous les végétaux ont besoin de la lumière pour leur croissance.
Que dites-vous à ceux qui disent que la jacinthe d’eau est un des indicateurs de la pollution ?
Pas nécessairement. Par exemple dans le lac Tanganyika, on les trouve dans les zones où l’eau est relativement propre. Si on considère la biologie et l’écologie de cette plante, elle a besoin seulement des eaux riches en nutriments et des eaux plus ou moins chaudes. Car, on la trouve dans les eaux tropicales. Si ces conditions sont réunies, même si ces eaux sont propres, elle peut proliférer.
Quelles sont les techniques de lutte contre cette plante ?
Il existe plusieurs techniques pour lutter contre ces plantes envahissantes. Il y a d’abord la collecte manuelle. Seulement, elle s’avère difficile et c’est fatiguant. Et certaines graines restent dans l’eau. Ce qui fait qu’elles peuvent germer d’un moment à l’autre.
L’autre technique est le contrôle avec des herbicides. C’est-à-dire des produits chimiques qu’on peut utiliser pour neutraliser cette plante. Malheureusement, il y a risque de détruire des plantes qui ne sont pas ciblées. Ce qui peut avoir aussi un impact négatif sur les autres êtres aquatiques.
Ajoutons aussi la technique de lutte biologique. Celle-ci s’avère plus efficace. Et là, il s’agit d’utiliser d’autres organismes pouvant consommer cette plante envahissante.
Certains pays ont commencé la valorisation de cette plante. Ne serait-elle pas une autre solution au Burundi ?
Je pense que cela peut être une solution pour le Burundi. Parce que dans d’autres pays, il y a déjà la valorisation de cette plante. A Madagascar par exemple, la jacinthe d’eau est utilisée pour la fabrication de certains produits comme les nattes, des corbeilles, etc. Cela s’est même avéré bénéfique pour les communautés qui vivent autour des écosystèmes aquatiques où se trouve la jacinthe d’eau. Donc, elle devient nécessaire pour relever en peu le niveau de vie de ces populations qui utilisent cette plante comme source de revenus. Bref, elle peut être doublement bénéfique.
Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze
Bonjour
J’ai beaucoup aimé l’analyse du Professeur Associé Claver Sibomana relative à exploitation de cette jacinthe d’eau par les Communautés qui vivent au tour de cette dernière pour relever leur niveau de vie.
L’artisanat peut se développer autour de cette « matière première » et les activités génératrices de revenus vont suivre quitte à tirer beaucoup de familles de la pauvreté et du coup on aura eu une occupation.
A vos plumes alors pour pondre des projets susceptibles d’aider ces populations une fois financés par les différents partenaires ( PNUD et autres)
Un coin d’oeil aussi au Professeur de sensibiliser et d’inciter ses étudiants à faire la recherche sur cette jacinthe et effets sur l’écosystème.
Merci
Emmanuel. N
Montréal Canada