Le flou entoure la mort d’une personne tuée tout près de la rivière Rusizi à la frontière burundo-congolaise. Des sources sur place attribuent ce meurtre à la police venue y faire l’intervention alors que c’était dans le domaine militaire.
Samedi, 24 mars 2012 vers 13 heures. Un corps sans vie a été retrouvé dans la localité de Rujembo, secteur Kagazi, de la commune Rugombo, province de Cibitoke par la population.
Selon les informations reçues sur place, une moto, un véhicule du service national de renseignement et celui du commissariat provincial de la police, à bord duquel des policiers, se sont dirigés vers le lieu du meurtre bien avant.
Des populations qui vaquaient quotidiennement à leurs activités champêtres ont été sommées de vider les lieux. « Après trente minutes, plusieurs coups de feu ont été entendus », affirme N. T, un des agriculteurs de Rujembo qui avait été forcé par les policiers de quitter ses champs. Ces propos sont confirmés par un Congolais qui pêchait dans la rivière Rusizi à ce moment. La population environnante a été prise de panique, croyant au retour de la guerre.
Cette dernière déclare avoir vu les policiers revenir du lieu du meurtre avec leur véhicule qui roulait à vive allure. Arrivés à la Transversale 5 sur la route goudronnée Bujumbura-Rugombo, les policiers accompagnés par le chef de poste Rugombo ont tenu une petite réunion à l’endroit de la population présente. Le but, selon une source locale, était de leur expliquer que les policiers poursuivaient un groupe de malfaiteurs et que l’un d’eux y a laissé la vie. D’après la même source, les policiers ont montré un fusil de type kalachnikov, treize chargeurs garnies de cartouches et des tenues policières qui auraient été récupérés lors de l’accrochage.
Interrogé, le commissaire provincial, Joseph Kenyata, affirme que la police possédait des informations selon lesquelles des bandits armés s’apprêtaient à voler dans les ménages des environs : « La police a mené cette opération pour étouffer dans l’œuf cette tentative de vol. »
« La garde de la frontière revient à l’armée»
La population ne croit pas aux propos de la police. « Les explications données nous laissent perplexes. Il n’y a jamais eu d’affrontement entre policiers et groupes armés. Nous pensons plutôt qu’il s’agit d’un assassinat bien ciblé », raconte M.J. Il ajoute que la population a décidé à elle seule d’aller voir ce qui s’était passé. K.L., un témoin rencontré sur place, indique que le corps de la victime était criblé de plusieurs balles, de la tête jusqu’aux pieds. « Nous avons compté 12 douilles de cartouches », témoigne-t-il. La victime, continue-t-il, était de taille élancée, bien habillée et semblait être un intellectuel.
La population s’interroge aussi sur la raison d’être de l’intervention de la police dans une localité où on compte pas moins de trois positions militaires, distantes de 500 mètres seulement. « A notre avis, la tâche de garder la frontière revient à l’armée et non à la police », explique N.L., avec certitude.
Selon des sources sûres, les militaires n’ont pas été associés dans ce travail. D’après les mêmes sources, il est inconcevable que des policiers mènent des opérations dans des secteurs tenus par les militaires à l’insu de ces derniers.
La confusion est totale du côté des défenseurs des droits de l’Homme à Cibitoke. La thèse d’un crime pour des mobiles politiques n’est pas à écarter, selon eux. Sous les ordres de l’administration, la victime a été enterrée le lendemain, dimanche 25 mars, par la population.