Dans la province de Cibitoke, les femmes commerçantes subissent de plein fouet les conséquences de la pénurie des carburants. Les denrées alimentaires, autrefois transportées vers d’autres provinces, restent bloquées faute de moyens de transport. De plus, la quantité qui était destinée à l’exportation en RDC envahit également le marché local depuis la fermeture des frontières.
« A vélo, le panier se transporte à 8 000 FBu alors qu’il était à 1 000 FBu avant cette crise. Nos dépenses dépassent nos revenus. Nous ne gagnons plus rien et la panique s’installe dans nos foyers. Nous avons dû modifier notre régime alimentaire faute de moyens. Les enfants rêvent de manger du riz, mais nous ne pouvons plus nous le permettre », déplore une commerçante du marché de Rugombo.
A ce marché situé dans la commune du même nom, l’effervescence est palpable. Les allées sont bondées de vendeurs et d’acheteurs se déplaçant dans toutes les directions. On y propose une variété d’articles allant des vêtements aux matériaux de construction. Aux alentours de 10h, l’heure est idéale pour vendre les denrées alimentaires. Dans la partie consacrée à la nourriture, aux fruits, aux légumes, aux viandes et poissons, les produits sont disposés sur des étals, vendus au kilo ou en petites mesures.
Les vendeuses de fruits et légumes, notamment les mangues, les ananas et les tomates, tentent d’attirer les clients : « Achetez chez moi. Mes produits sont de bonne qualité. Je vous ferai une réduction ». Cependant, certaines somnolent tandis que d’autres, impuissantes, observent leurs étalages délaissés. Une commerçante plus âgée, interrogée, avoue sa fatigue : « Je fais une pause même si mes tomates commencent à pourrir. Nous sommes trop nombreux à vendre ici et la récolte a été abondante ».
Augmentation du prix de transport
« Les coûts de transport ont explosé. Le pire, c’est que les véhicules de transport se font rares et nous devons nous battre pour en obtenir un. Avant, je payais 10 000 FBu pour un sac de mangues. Aujourd’hui, cela me coûte 15 000 FBu. Une fois à Bujumbura, mon gain était de 6 000 à 7 000 FBu. Actuellement, je ne dépasse pas 3 000 FBu », raconte Gérardine Hakizimana, une commerçante au marché de Rugombo.
Pour elle, la hausse des frais de transport réduit considérablement sa marge bénéficiaire. Augmenter les prix n’est pas une option. Car, la concurrence à Bujumbura est rude. « Si je monte mes tarifs, personne n’achètera chez moi. Je me contente du peu que je gagne », confie-t-elle avec inquiétude. Atteinte de diabète, elle redoute de ne plus pouvoir subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants. « Ce commerce m’a permis de payer les études de mes enfants et mon régime. J’espère que le gouvernement trouvera une solution avant des faillites en masse », plaide-t-elle.
Une autre commerçante souligne la diminution du nombre d’acheteurs. Autrefois, des clients venaient de Mabayi grâce à des moyens de transport accessibles. « Avant cette pénurie, nous écoulions 4 à 5 paniers de tomates par jour. Aujourd’hui, nos produits pourrissent faute de clients », révèle-t-elle. Faute de carburant, elle transporte désormais ses tomates sur le taxi-vélo. Elle déplore aussi le fait qu’il n’y a plus de clients congolais qui passaient souvent. Les frontières sont actuellement en effet fermées.
Rouvrir les frontières
Édith Irankunda, représentante de l’Association des Commerçantes transfrontalières, souligne les difficultés croissantes liées au transport des marchandises des champs vers les marchés. La fermeture des frontières de Mparambo-Rubenga et Ruhwa a forcé environ 600 commerçantes transfrontalières à partager le même marché que les vendeuses locales. « Avec notre arrivée, l’offre a dépassé la demande. Ce qui a provoqué des pertes et des marchandises invendues », déplore-t-elle.
Les commerçantes sont contraintes de baisser leurs prix. Cela entraîne des pertes considérables. Certaines ont perdu tout leur capital et se retrouvent au chômage tandis que d’autres tentent de survivre tant bien que mal. « L’autonomisation des femmes était en bonne voie. Aujourd’hui, voir certaines femmes abandonner leur commerce est désespérant », regrette-t-elle. Et d’appeler à une réouverture rapide des frontières. « Que l’on ouvre au moins la frontière de Mparambo-Rubenga et que l’approvisionnement en carburant soit rétabli !», plaide-t-elle.
Carême Bizoza, gouverneur de la province de Cibitoke, reconnaît les difficultés liées au transport et à l’inflation. Mais, il invite les commerçants à s’adapter. « Dans le commerce, il y a des hauts et des bas. Il faut avancer avec son temps », déclare-t-il. Il dénonce par ailleurs l’attitude de certains commerçants qu’il qualifie d’insatisfaits en toute circonstance.
Concernant la réouverture des frontières, il assure que des négociations sont en cours entre les Etats burundais et congolais. « Au moment opportun, ces frontières seront rouvertes car cela profitera aux deux parties ».
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