Les habitants de la colline Mutambara, commune et province de Rumonge fustigent des accusations mutuelles. Dans cette période préélectorale, ils appellent tous les politiques à la retenue.
Selon les habitants de la colline Mutambara, les messages qui pointent du doigt les autres sont monnaie courante en période électorale, lors des crises et en période post-conflit. Ils font savoir que les auteurs sont soit des victimes ou des politiciens qui cherchent leurs intérêts.
Alexandre Ndayizeye de cette colline donne un témoignage en partant de la crise de 1993. « Des Tutsi ont été accusés d’avoir tué le président démocratiquement élu. Et les Tutsi accusaient les Hutu de vouloir les massacrer. La suite est que les Hutu et les Tutsi se sont entre-tués », déplore-t-il.
De son coté, Jeanne Nibigira revient sur les accusations gratuites qui sont enregistrées aujourd’hui entre les membres du parti au pouvoir, le CNDD-FDD et ceux du CNL. « Ils se pointent du doigt de se voler des drapeaux ou d’être des fauteurs de troubles. Les membres du CNDD-FDD disent qu’ils vont les lessiver (kumesa) et les militants du CNL rétorquent qu’ils vont se défendre ».
Pour un autre citoyen, ces messages pour s’accuser mutuellement existent. Ils sont toujours d’actualité à l’approche des élections.« En 2020, des militants politiques se sont chamaillés et l’un d’entre eux a dit qu’il achètera de l’essence pour brûler vif ses adversaires. Il les accusait d’être des ennemis du pays. Le lendemain, une permanence du CNL a été brûlée ».
Selon ces habitants, l’objectif des auteurs de ces messages est d’intimider les autres pour les empêcher de gagner. C’est une façon de nuire à leur réputation afin de les écarter de la course. « Si de tels messages continuent, il y a des conflits, des morts, des disparitions forcées qui peuvent s’en suivre ».
Afin d’éviter les conséquences fâcheuses, ils appellent au langage pacifiste. Ils interpellent l’administration à suivre de près les politiques en campagne électorale. « C’est une période délicate. Il faut un suivi régulier », estiment-ils.
Selon Rubin Bizimana, conseiller juridique du gouverneur de la province de Rumonge, c’est possible que ces messages existent. Il indique que sa province compte une population avec des diversités ethnique et sociale. Ses résidents ont aussi des convictions politiques différentes.
« Globalement, les messages de haine ont sensiblement diminué. Cela ne dit pas que les auteurs n’existent pas ». Il donne des exemples. « L’opposition qui accuse le parti au pouvoir d’avoir opéré des fraudes pour gagner, des rapatriés qui accusent les résidents de l’autre ethnie de les avoir forcés à l’exil et d’avoir spolié leurs terres, etc. ».
Il trouve que certains auteurs le font à la suite de la mauvaise compréhension de ce qui s’est passé. D’autres le font parce qu’ils sont manipulés et instrumentalisés par des politiques qui veulent atteindre leurs intérêts égoïstes.
Le conseiller juridique du gouverneur de Rumonge fait savoir que si de tels messages sont connus par l’administration, des réunions sont organisées pour rappeler la population à la cohabitation pacifique. Le passé nous donne une leçon, mais pas une raison de division. « Nous avons pris l’initiative de visiter toutes les zones pour sensibiliser la population au vivre ensemble. L’objectif est de consolider une communauté sans haine ».
Selon Hélène Mpawenimana, spécialiste en communication et professeur d’université, les messages qui pointent du doigt les autres sont dus aux problèmes vécus dans la société.
Ça peut être des problèmes qui naissent du passé ou qui résultent d’une mauvaise gestion de la situation du moment. Il peut s’agir des événements douloureux du passé ou des tensions politiques lors des campagnes électorales.
Selon l’expert, l’objectif principal de ces messages est l’affaiblissement du groupe tenu pour adversaire et responsable de la situation. D’autres essaient de rejeter leurs responsabilités sur autrui pour se justifier, se blanchir. « Même s’ils sont coupables, ils cherchent à se faire passer pour des innocents. C’est pourquoi ils désignent les autres comme coupables. C’est une façon de jeter la responsabilité sur les autres ».
Elle fait alors observer que, coûte que coûte, le groupe indexé cherche à se défendre. Cela peut se faire, dit-elle, en paroles ou en actions jusqu’à prendre des armes pour retrouver la dignité
Hélène Mpawenimana appelle chacun à assumer sa responsabilité et/ou faire preuve de retenue. « S’il y a des erreurs, il faut s’excuser ou demander des conseils. Chaque individu doit consolider la paix et la tranquillité de tous. »
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