Le Burundi et la région des Grands lacs tentent de panser leurs plaies qui restent béantes. En cas de conflits, de tensions politiques et de précarité de la vie, des appels à la violence surgissent. Les habitants de la colline Buhinga fustigent cette attitude qui peut embraser le pays et la région.
Jeanine Nyandwi est une habitante de la colline Buhinga. Elle estime que les messages d’appel à la violence sont souvent diffusés ou tenus en cas de crise ou de situation difficile. Même la commune Musongati de la province de Rutana n’a pas été épargnée.
Elle parle notamment de la crise de 2010 entre les militants de différentes convictions politiques. « Les militants du parti au pouvoir appelaient à tabasser les opposants notamment ceux du FNL. Je me rappelle que ceux de la colline Nyabisindu ont été attaqués et tabassés. A leur tour, les gens du FNL invitaient leurs militants à se défendre et à attaquer leurs ennemis ».
Même lecture chez une autre dame qui donne l’exemple de la crise de 1993. Elle indique que des gens appelaient les autres à prendre des haches pour abattre les arbres afin de bloquer les routes. L’objectif, dit-elle, était d’empêcher ceux qui pouvaient intervenir d’intervenir « Dans d’autres périodes sombres de l’histoire du Burundi, la situation a été la même avec des gens qui n’avaient pas peur d’appeler ouvertement à commettre des crimes ».
De son côté, Pierre Haringabo indique que des messages d’appel à la violence restent d’actualité surtout en période de tensions. Pour lui, ceux qui appellent à la violence sont soit égoïstes, ignorants, embrigadés ou manipulés. « Ils cherchent leurs intérêts, y compris par la violence. Par-là, ils commencent à accuser injustement les autres. Ceux qui acceptent tombent alors dans le piège ».
Evelyne Ndayizeye est aussi du même avis. Elle considère qu’il s’agit d’une manipulation pour atteindre leurs objectifs. Cette situation, dit-elle, a des conséquences néfastes. Elle parle de la méfiance, des suspicions, de la haine, des divisions, des crises et des guerres. « Tout cela a des incidences sur la vie des citoyens et sur le développement du pays ».
Ces habitants lancent un appel vibrant pour sauvegarder la paix et la sécurité chèrement acquise. Pour eux, il faut cultiver dans les esprits l’unité et l’amour du prochain afin d’arriver à un développement intégral et inclusif. « Inciter les autres à commettre la violence c’est apporter les malheurs et les souffrances. Chacun doit œuvrer pour la cohésion sociale, la paix et la sécurité de tous ».
Prôner l’unité
Selon Claudine Niyoyitungira, administrateur de la commune Musongati, les messages d’appel à la violence ne sont pas nombreux. Elle parle de certains cas notamment lors des situations de vol. « Des gens appellent au lynchage d’un voleur pour se faire justice. Il y a d’autres qui prônent la violence après avoir été manipulés et intoxiqués ».
Elle fait savoir que des réunions de sensibilisations sont organisées pour maintenir la cohésion sociale. Elle lance un appel à travailler ensemble pour un développement intégral et inclusif.
Selon Rémy Havyarimana, expert en résolution pacifique des conflits et responsable de la Maison Lueur d’espoir, la quasi-totalité des Burundais ont des blessures qui ne sont ni pansées ni soignées. « La population burundaise a traversé des périodes très difficiles de crises graves au cours desquelles on a assisté à des morts, à des viols, à des situations innommables. Ces messages d’appel à la violence sont l’expression du sentiment que l’on a, que l’on vit », explique-t-il.
D’après lui, les auteurs des messages de haine et de violence sont des malades peut-être qui s’y ignorent. « Ils ont une attitude comme en guerre. La façon donc d’arrêter ces discours n’est pas de leur dire de se taire mais plutôt de les traiter ».
L’expert en résolution pacifique des conflits précise que l’auteur des messages de haine s’adresse à son camp pour agir négativement face à l’autre camp. « Pour des gens qui sont déjà prêts à mal agir, la réaction est très rapide et la violence est grave. Un tel langage conduit aux vols, aux viols, aux emprisonnements arbitraires, aux assassinats et à la guerre », fait-il remarquer.
Remy Havyarimana indique qu’il ne faut pas s’attaquer aux conséquences mais plutôt aux causes profondes de nôtre crise. Pour joindre les actes à la parole, dit-il, on devrait tracer une ligne de démarcation pour dire plus jamais ça. « Celui qui se conduit comme en période de guerre doit subir la rigueur de la loi ».
Cet expert considère qu’il faut une volonté politique pour mettre fin à la haine et à la violence. « Tant qu’on ne vit pas la cohésion sociale, la vie n’aura pas de sens ».
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