Au premier sondage d’opinion réalisé par le Gradis en partenariat avec le réseau Afrobaromètre (AB), Christophe Sebudandi indique que les Burundais soutiennent fortement la démocratie. Ils remarquent cependant que l’impunité menace ce mode de gouvernance par excellence.
<doc7438|right>{Que vise votre enquête et dans quel cadre s’inscrit-elle ?}
Ce genre de sondage est un outil qui éclaire les décideurs. De plus, il ouvre la voie à une catégorie de la population qui ne participe pas à la prise de décision. C’est une sorte de message et de plaidoyer envers les décideurs. Toutefois, ce n’est pas une motivation nationale. C’est un partenariat entre le Gradis et le réseau africain Afrobaromètre de chercheurs indépendants. Le sondage a porté sur les concepts de démocratie, gouvernance, identité, leadership des institutions, conditions de vie des gens, etc.
{Quels sont les résultats de l’enquête ?}
Personnellement, j’ai été agréablement surpris. Les Burundais soutiennent fortement la démocratie. Ils estiment que c’est le système par excellence de la bonne gestion du pays. Ils rejettent catégoriquement qu’un seul parti politique reste de fait et se présente en solo aux élections. De plus, ils soutiennent que les médias donnent la parole à qui veut la prendre sans le contrôle du pouvoir. Ils s’inscrivent en faux contre l’intervention militaire en cas de situation plus difficile. Cependant, des Burundais pensent que l’impunité constitue un frein au respect des principes démocratiques car elle profite aux officiels de hauts rangs. 71% d’entre eux voudraient que dans le processus de la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle, que les coupables soient jugés et punis quel que soit leur rang. Motif : consolider la paix et la réconciliation.
{Le pardon prôné par le parti au pouvoir n’entre-t-il pas en contradiction aux desiderata de la population ?}
Beaucoup d’observateurs et d’activistes ont prouvé la nécessité de juger des coupables comme les Burundais viennent de l’exprimer à travers ce sondage. En principe, la démocratie, c’est l’écoute de la population. Mais nous regrettons que, dans ce cas-ci, les autorités aient pris leur propre chemin. C’est une entorse à la démocratie et un non-respect des desiderata de la population. Si les considérations de la population ne sont pas prises en compte, le mécanisme de la justice transitionnelle est voué à l’échec.
{Quid des intentions de vote ?}
Le parti au pouvoir représente 54%, l’opposition 13% alors que les indécis et les réticents ou silencieux représentent 32%.
{D’après vous pourquoi cette réticence ?}
Ils refusent de dire pour qui ils vont voter de peur d’être persécutés ou assassinés comme cela a été le cas dans le passé chez des militants des partis de l’opposition. D’autres préfèrent porter une double casquette pour leur survie. C’est pour cette raison que nous avons intitulé cette enquête ‘ Le Cndd-Fdd et l’Uprona contre le parti du silence’. Toutefois, tout n’est pas totalement joué. Il y a lieu d’avoir un équilibre aux élections de 2015.
{Quel crédit faut-il donner à votre travail ?}
Au niveau de l’échantillonnage, le Gradis est supervisé par Afromètre. Nous travaillons également avec deux universités de renom, celle de l’État du Michigan aux États-Unis et celle de Capetown en Afrique du Sud. Nous avons pris un échantillon de 1200 personnes, pris au hasard. Il est représentatif d’après les règles de la statistique. On peut donc étendre ces résultats sur l’ensemble de la population avec une erreur de plus ou moins 3% dans un intervalle de 95%.
<quote>Afrobaromètre est un réseau de chercheurs africains indépendants et non-partisans. Il organise une série d’enquêtes comparatives d’opinion pour mesurer les attitudes de la population envers la démocratie, la gouvernance, l’économie, le leadership des institutions, la citoyenneté, etc.
La première série d’enquête a eu lieu entre 1999 et 2001 dans 12 pays africains. Il en est à sa 5ème série qui inclut 35 pays dont le Burundi pour la première fois. Gradis, est donc le partenaire national d’Afrobaromètre choisi à l’issu d’une compétition.</quote>
