Le manque d’équipements, l’absence de travaux pratiques, tels sont les défis auxquels sont confrontés certains CEM ayant ouvert la filière d’agri-élevage.
Construits dans le cadre des actions visant à réduire le chômage, les Centres d’enseignement des métiers (CEM) font face à de nombreux défis. Ils ont ouvert les portes avec l’année scolaire 2017-2018 et dispensent la formation d’une année dans la filière d’agri-élevage. Ils sont au nombre de 120 à travers le pays.
Thierry Ndayizeye, directeur du CEM de Nyabitaka, en commune et province Bubanza, fait savoir que 20 élèves fréquentent cette école. Le fonctionnement de ce centre se heurte à beaucoup de problèmes.
«Les élèves n’ont pas encore fait de travaux pratiques, faute d’équipements », indique Thierry Ndayizeye. Pour la pratique de l’élevage, précise-t-il, les étables, les poulaillers, la porcherie… ne sont pas encore construits. Pour ce qui est de l’agriculture, il y a un manque de propriété foncière.
Or, observe-t-il, elle est indispensable pour les travaux pratiques agricoles, et pour la culture des plantes fourragères, aliments de base pour le bétail. Et d’ajouter que même les animaux qui feront l’objet d’expérimentation n’ont pas encore été fournis.
Quant aux enseignants, M. Ndayizeye fait savoir que l’école a deux enseignants vacataires, un agronome et vétérinaire, de niveau A2.
Les élèves rencontrés se disent désintéressés par la formation. Ils se lamentent parce qu’ils n’effectuent pas de travaux pratiques. « Le problème des travaux pratiques est très épineux ». Or, fait savoir N.J., la théorie est évaluée à 30%, tandis que la pratique est évaluée à 70%.
Pourtant, poursuit-il, la formation s’échelonne sur une année alors qu’on est déjà au troisième trimestre. « Quelle sera notre bagage à la fin de l’année ? » Pour lui, la théorie ne lui servira à rien, « l’objectif étant d’apprendre la technique culturale et d’élevage afin que je serve de modèle dans mon milieu ».
Interrogés sur ces défis, François Kazoviyo, administrateur de la commune Bubanza, reconnaît que les équipements pour ces écoles font défaut. Il indique que les entreprises ayant gagné le marché pour la fourniture des équipements et des animaux et la construction des étables n’ont pas encore honoré leurs engagements.
Frédéric Congera, administrateur de la commune Mpanda, indique qu’il n’y a pas d’engouement pour la filière d’agri-élevage : « Pas d’afflux, les écoles ont accueilli peu d’élèves par rapport aux prévisions. » Ils préfèrent être formés dans d’autres métiers. Par ailleurs ces élèves indiquent qu’ils parcourent de longues distances pour arriver dans ces centres. Cette autorité communale évoque lui aussi le problème d’équipements au CEM de Gatabura. Pour lui, la filière d’agri-élevage exige un grand financement.
Le ministère tranquillise
Pascal Nshimirimana, directeur général de l’enseignement des métiers, de la formation professionnelle et de l’alphabétisation des adultes au ministère de la Fonction publique, reconnaît les difficultés auxquelles ces écoles font face. Il assure que le début est toujours difficile. Ce cadre ministériel se veut rassurant et propose quelques solutions. Face au manque de propriétés foncières dans certaines communes, M. Nshimirimana propose de louer les propriétés de personnes environnantes. « Ces propriétés vont servir de champs d’expérimentation ».
Par ailleurs, il indique que le budget alloué au fonctionnement de ces écoles reste faible. « Nous comptons approcher nos partenaires techniques et financiers pour qu’ils interviennent ». Il espère que le Fonds de soutien à l’éducation va aussi intervenir. Et de prodiguer des conseils : « Si le gouvernement veut résorber le chômage, il doit investir dans l’enseignement des métiers. »
En outre, il signale que son ministère prépare ces centres à évoluer vers l’autofinancement. «Ils vont vendre les produits d’agriculture et d’élevage ».
Quant au manque d’engouement des élèves pour ces écoles, Pascal Nshimirimana invite les parents et l’administration communale à sensibiliser les jeunes sur le bien- fondé de ces écoles.
Vers une bonne réinsertion socio- professionnelle
Pour lui, ces écoles pourront aider le gouvernement burundais à réduire le chômage chez les jeunes. « Ces jeunes doivent être dotés de technicité et de capacité en agri-élevage. Nous voulons quitter l’agriculture et l’élevage de subsistance vers l’agriculture et l’élevage professionnels ». C’est, explique-t-il, l’approche par compétence qui sera mise en avant dans la formation. « Une approche qui vise la maîtrise du métier ».
Les aptitudes acquises, espère-t-il, vont aider ces jeunes à servir de modèle dans leur milieu. Et de conclure : « Cela va leur permettre une bonne réinsertion socio-professionnelle. »