Ces derniers temps, les galeries commerciales prolifèrent au centre-ville de Bujumbura. « Tendance vers une ville-galerie », craignent certains observateurs. Néanmoins, l’Office burundais de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Construction indique qu’il s’agit d’exploitations temporaires, pour la plupart.
Les galeries marchandes captent les yeux au centre de la ville de Bujumbura et ses environs. Elles ne sont pas peu nombreuses à commencer par les plus connues : Galerie idéale, Ok bazar, Kilimandjaro, Diko, Manirakiza, Village Market, Lilia etc. Toutes renferment de petits et grands magasins. A la galerie Lilia, certains magasins ont accès au boulevard de l’Uprona tandis que d’autres sont en face de la route pavée qui passe devant l’Eglise Saint Michel. Tout près de la passerelle qui passe au-dessus du boulevard. La galerie est toute neuve, mais les magasins sont presque tous occupés par des commerçants locataires. On peut y trouver diverses marchandises. Déjà de l’extérieur, tu peux voir des magasins pour plaques solaires, instruments de musique, des frigos, machines électriques, pneus etc.
A la galerie Idéale comme d’autres galeries des environs, c’est plus le commerce des téléphones portables qui est florissant. Des milliers de petits magasins en métaux sont installés. Pour certains, deux personnes ne peuvent pas prendre place pour s’asseoir. Ils sont très exigus. « Mais c’est régulièrement plein de monde », témoigne un réparateur de téléphones portables. Difficile même de se frayer un chemin. Des clients et vendeurs se bousculent. Il y a ceux qui veulent acheter des téléphones, les faire réparer, acheter des accessoires, etc.
D’autres galeries comme Diko, Hakizimana et Village market, on y trouve des magasins où on fait le commerce et la location des vêtements, la vente des chaussures, des livres, des ustensiles de cuisine, … Sans oublier des services tels que des salons de coiffure, la pédicure et manucure, secrétariats publics et petites imprimeries, pharmacies etc. Les galeries sont nombreuses et ont des ressemblances au centre-ville de Bujumbura et sur ses différentes grandes artères. Elles se font remarquer également dans les quartiers comme Bwiza.
Suite à l’absence du marché central ?
« C’est peut-être parce qu’il n’y a plus de marché central à Bujumbura », pensent certains commerçants qui travaillent dans ces galeries. S’il y avait un marché central, pensent G.N commerçante à la galerie Village Market, les commerçants s’installeraient dans le marché au lieu des magasins qui sont d’ailleurs très chers. Pour B.A, réparateur de téléphone à la Galerie Idéale, des fois les galeries ne remplissent pas les conditions de sécurité. « Pas de passage pour un camion des pompiers par exemple. » Il regrette que les couloirs soient bouchés par des ajouts de petits magasins. Néanmoins, nuance-t-il, cela permet à beaucoup de personnes de gagner de l’argent pour subvenir à leurs besoins. Selon les commerçants locataires de certaines galeries, une galerie est un investissement sûr. « Le locataire doit payer son loyer, sinon, les autres sont prêts pour le remplacer. », a témoigné une locataire de Village Market. Et quand un locataire est chassé, renchérit une autre, le propriétaire en profite pour exiger une avance d’au moins deux mois. Nos sources pensent que ce sont les bénéfices garantis qui poussent ceux qui en ont les moyens de construire les galeries. « Quand bien même tes marchandises ne sortent pas, nous devons nous arranger pour payer le loyer », affirme une vendeuse de vêtements à la galerie Manirakiza.
Les galeries remplacent petit à petit les marchés chez certains citadins de Bujumbura. Pour beaucoup, il faut aller dans une galerie pour faire des achats. Mais certains s’inquiètent de leur prolifération dans la ville de Bujumbura. « Faut-il des galeries pour le centre-ville ? », s’interroge L.S, un citadin qui a voyagé dans la sous-région. Il se demande si vraiment ces galeries suivent le schéma directeur de la ville.
Le schéma directeur en cours de validation
« Le schéma directeur de la ville de Bujumbura est en cours de validation. Il sera validé par un décret du président de la République », répond Jean Pierre Gatore, commissaire général de l’Office burundais de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Construction (OBUHA). Quant aux galeries en question, il indique que pour la plupart, il s’agit des exploitations temporaires. « Et l’exploitation temporaire dure 5 ans renouvelables. Ce sont des constructions qui peuvent être détruites à tout moment. »
Il reconnaît pourtant que la plupart des galeries sont construites en désordre et qu’ils ne demandent pas de permis de construire. « Ils demandent un contrat d’exploitation temporaire qui dure 5 ans. » Néanmoins, si un projet développement vient, tranquillise M. Gatore, les propriétaires de ces galeries peuvent détruire. « C’est pourquoi ils ne construisent pas en dur ». D’après lui, ils peuvent faire un démontage. En principe, ajoute-t-il, si quelqu’un construit une galerie sans permis de construire, il est fautif. Pour suivre cela, le commissaire de l’OBUHA confie que son office collabore régulièrement avec l’administration. « C’est l’administration qui nous aide à vérifier si quelqu’un a des documents. » Si le chef de quartier ou l’administrateur constate qu’ une personne est en train de construire, souligne-t-il, il doit lui demander un permis de construire et faire recours à l’OBUHA pour aller voir si cela respecte la loi. « Il faut que l’administration joue son rôle. Si elle nous avertit qu’une personne n’a pas un permis de construire, nous exigeons la suspension. C’est ce que nous faisons», a-t-il conclu.
Eclairage/ « Il ne faut pas que des galeries pullulent »
Dr Ir Marc Rugerinyange propose des galeries et autres constructions écologique bien aménagées et en hauteur pour que tout le monde se sente en ville.
On observe une prolifération des galeries en ville de Bujumbura. Est-ce que cela est bon pour son image et son paysage ?
De prime abord, toutes les villes doivent avoir un schéma directeur, un plan directeur de construction parce que le développement d’une ville, ce sont les routes et les constructions des immeubles : commerciales, habitations… et l’aménagement compte tenu de la protection de l’environnement. C’est pour que la ville soit propre et ait une image d’une capitale surtout économique qui fut la capitale politique.
Ces galeries ne vont-elles pas montrer une mauvaise image de la ville ?
Je ne peux pas me prononcer sur ça. Mais, les galeries devraient être construites d’une manière appropriée au développement de la ville.
Comment ?
Ailleurs, il faut des malls bien construits, bien aménagés pour que tout le monde se sente en ville. Parce que quand vous entrez dans une galerie et que vous ne savez pas l’entrée ni la sortie, il y a lieu de se poser des questions. La ville doit se développer conformément au plan directeur. Et ce plan directeur doit tenir compte de beaucoup de paramètres. Et un paramètre qu’il ne faut pas oublier, c’est le paramètre environnemental et écologique. Nous ne pouvons pas vivre dans une ville désertique où il n’y a pas de plantation. Il devrait y avoir des arbres, des espaces verts, des espaces pour piétons, pour vélos, pour véhicule. On doit en tenir compte et faire un schéma adapté à l’heure où nous sommes. Tout développement suppose regarder un peu plus loin parce qu’on sera obligé à un certain moment de démolir ce qu’on a construit.
Revenons au centre-ville
Le centre-ville est la rencontre de tout le monde. Ça devrait avoir une construction propre, belle, qui épouse le paysage topographique de Bujumbura.
Ce n’est donc pas le cas ?
Je ne dirais pas que c’est le cas. Mais, je me dis qu’on va corriger. Si vous passez au centre-ville, vous voyez quand-même qu’il y a des constructions actuellement qui sont en train d’être érigées qui suivraient les normes. Je n’ai pas encore vu ce plan directeur, sinon, j’allais faire un commentaire par rapport à ça. Mais, tous ceux qui ont construit sans suivre le chemin directeur, un jour ils vont perdre pas mal de choses parce qu’ils sont obligés de suivre le plan directeur.
Et ces galeries ?
Il faut qu’elles suivent les normes. Il faut faire la lecture de la loi et du plan directeur de l’aménagement de la ville de Bujumbura et aussi consulter ceux qui ont des connaissances en la matière pour construire. Il ne faut pas que les galeries grouillent. Il faut que ça soit dans un bon aménagement, dans de bonnes constructions et dans de belles constructions qui remplissent toutes les conditions requises pour la ville.
Au rythme actuel, Bujumbura ne risque pas de devenir une ville galerie?
Oui, au rythme où nous sommes on peut le dire. Mais aussi, il ne faut pas oublier que c’est la capitale économique bien qu’elle ne doive pas être construite anarchiquement. Il faut que ça suive les normes. Sinon, si chacun construit sa galerie comme il veut, sans autorisation, sans regarder là où il est, ça serait un problème. Mais je pense que les maisons, les immeubles commerciales, il y a des normes pour les construire. Il ne faut pas que chacun installe un conteneur, l’aménage comme il veut où n’importe comment. Il faut que ça soit bien construit, et surtout respecter l’aménagement de l’espace.
Pourquoi ?
D’ici peu, on n’aura pas un espace pour construire. J’encouragerais de construire des immeubles comme des malls dans la ville de Bujumbura parce que la population ne cesse pas d’augmenter. Ce qui fait que la gestion de la ville de Bujumbura sera très difficile. Au centre-ville, un immeuble peu caser beaucoup de gens sans gaspiller l’espace qui est déjà très limité. C’est un élément très important. Pourquoi construire une galerie ici, une galerie là-bas alors que l’on pouvait faire des galeries en hauteur ? Nous devrions économiser l’espace.
Qu’est-ce que les responsables devraient faire ?
Le suivi. Être rigoureux envers les constructeurs et puis voir si réellement ceux qui sont en train de construire suivent les normes. Ils devraient d’abord déposer les plans et montrer aussi qu’ils sont capables de construire. Les villes ne sont pas pour n’importe qui. C’est pour les gens qui peuvent changer l’image de la ville. Et cette image reflète le pays. Toute personne qui arrive au Burundi regarde la ville de Bujumbura. Le développement d’une ville, c’est toujours les belles constructions et l’aménagement.
Vous estimez que les normes sont respectées ou pas ?
Je ne saurais pas vraiment apporter une réponse à ça en ne sachant pas exactement le schéma directeur. Toutefois, il y a des constructions qui ne devraient pas être encore là. Si vous entrez à la galerie Idéale ce n’est pas la même chose que quand vous entrez chez Agora. Ce n’est pas la même chose qu’avec la nouvelle Bancobu en construction…Il y a des bâtiments qui doivent être remplacés aujourd’hui. C’est la décision de l’administration. Il y a beaucoup de chose que l’on peut faire qui reflètent une belle image de la capitale.
Sinon, quelles seront les conséquences
Quand on saura qu’il y a eu des constructions anarchiques, la première chose est de les démolir. Si ce sont des choses provisoires, il ne faut pas construire en dur. Les conséquences peuvent être sociales et économiques et ça a un impact négatif sur les habitants. Obliger les gens à démolir parce que ça n’a plus l’image qu’on cherche reste un problème. Je pense qu’il faut l’éviter et suivre le plan directeur.
Comment trouvez-vous l’image du centre-ville pour le moment ?
Le centre-ville de Bujumbura est en évolution. Regarde les années 1970, 1980, 1990, on est en train de changer. Il y a des hôtels qui ont été construits, des galeries qui sont bien construites, des banques qui sont en train d’être construites. On voit quand même qu’il y a une grande évolution. Même les bâtiments administratifs comme le nouveau building du ministère des Finances, la Bancobu, la BRB. Ce qui reste, c’est l’aménagement des routes qui se trouvent dans la ville de Bujumbura. Il y a encore des lacunes.
Une vidéo de 2017 (intitulée « BURUNDI MASTER PLAN 2045″ et élaborée par la Municipalité de Bujumbura, le Ministère de l’eau, de l’aménagement du territoire, le PNUD et Singapore Cooperation Enterprise) parle d’élargissement du centre-ville de Bujumbura, de développement d’une ville jumelle et de sa zone économique spéciale (ZES) et de logements abordables pour tous.
Il est prévu que dans la ville de Bujumbura et ses environs, 2,4 millions d’emplois vont être crées entre 2017 et 2045 et que la population va atteindre 4,1 millions de gens en 2045.
https://www.youtube.com/watch?v=2ebdXvaNQ9A
1. Vous écrivez:« « Le schéma directeur de la ville de Bujumbura est en cours de validation. Il sera validé par un décret du président de la République », répond Jean Pierre Gatore… ».
2. Mon commentaire
a. Je me demande comment en l’absence de ce plan directeur, aujourd’hui à Bujumbura (CAPITALE ECONOMIQUE DU BURUNDI) l’on parvient à planifier la construction de logements à plusieurs étages, le tracé du chemin de fer Uvinza-Musongati-Gitega-Bujumbura-Kindu ou l’agrandissement du port de Bujumbura.
b. Je n’ai jamais vécu à Bujumbura et il y a deux jours, j’étais ravi de tomber sur un album de 333 vieilles photos d’Usumbura (donc pour la plupart datant du temps colonial).
L’Office du Tourisme du Congo Belge et du Ruanda-Urundi a pu publier LE PLAN D’USUMBURA EN 1954.
https://www.flickr.com/photos/pgkivu/5308054916/in/album-72157625675897472/
Le schéma directeur en cours de validation? Sincèrement moi je ne sais plus où donner de la tête. On est entrain de laisser les gens ériger vaille que vaille des galeries à gauche à droite. En même temps, il y des concepteurs qui sont entrain de se creuser les méninges pour avoir un schéma directeur. Et quand celui-ci sortira…Boum! toutes les constructions en désaccord avec ce plan seront détruites. Il y aura des pleurs et des grincements de dents. Le même phénomène s’est observé quand on a laissé les gens construire des kiosques et maisons de part et d’autre des axes routières : quand l’autorité s’est souvenue qu’il y a des normes à respecter, elle s’est mise à détruire les constructions qui ne répondent pas aux normes. C’est difficile pour moi de comprendre comment une autorité laisse les problèmes s’installer pour dire après…youpiii! on a trouvé la solution: nous sommes désolé il sera nécessaire de détruire ce qu’on vous a laissé construire. C’est vrai qu’on a pas toujours un plan tout prêt pour tout, mais il y a des cas où il faut prendre des mesures préventives pour éviter « guta abantu n’ibintu mu rudubi ».