Les progrès accomplis depuis plus de 10 ans pour l’intégration de la réadaptation et particulièrement de la kinésithérapie dans le système de santé du Burundi sont très significatifs. C’est le constat fait par le Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida (MSPLS) et tous les intervenants de cette pratique médicale. C’était au cours de la célébration de la journée mondiale de la kinésithérapie qui a eu lieu ce vendredi 22 septembre. Malgré ces avancées saluées, l’association des kinésithérapeutes du Burundi confie que les besoins en la matière restent énormes.
Les cérémonies de cette journée mondiale de la kinésithérapie édition 2023 ont été organisées par le Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida (MSPLS), en partenariat avec l’APEFE (Agence de coopération belge de la fédération Wallonie-Bruxelles et de la Wallonie, intervenant au Burundi depuis 2011 dans le domaine de la médecine de réadaptation et de la kinésithérapie) et l’ONG COPED (Conseil pour l’Education et le Développement actif depuis 2008 dans ce même domaine). Elles ont été célébrées au Centre National de Référence en Kinésithérapie et Réadaptation médicale (CNRKR) situé dans les enceintes du Centre Hospitalo-Universitaire Roi Khaled de Kamenge.
« Nous saluons les efforts du Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida et de ses partenaires au développement pour améliorer le domaine de la médecine de réadaptation et de la kinésithérapie », a indiqué le Dr Ildephonse Nduwimana, président de l’Association des Kinésithérapeutes du Burundi (AKB). Parmi les progrès accomplis depuis une dizaine d’années, il a cité la formation d’un noyau initial de kinésithérapeutes à l’étranger ; la création d’une trentaine de centres et services de kinésithérapie publics et privés à travers le pays et enfin l’ouverture récente de la Filière de Formation en Kinésithérapie et Réadaptation (FFKR) à l’Institut National de la Santé Publique (INSP) de Bujumbura.
Malgré ces belles avancées, les défis restent nombreux, a souligné le président de l’AKB. « Beaucoup de personnes souffrent de maladies nécessitant des soins de kinésithérapie mais n’y ont pas accès » soit par ignorance de l’importance de ces soins, soit par manque de lieux où se faire soigner, soit par manque de moyens financiers ou manque de couverture par les mutuelles et les assurances santé.
Parmi les maladies et affections les plus fréquentes qui nécessitent des soins de kinésithérapie au Burundi, il faut citer les séquelles des accidents de la route, le diabète, l’hypertension artérielle qui provoque les AVC, le mal de dos, les maladies respiratoires comme l’asthme et même les affections uro-gynécologiques qui se manifestent par des problèmes d’incontinence après les grossesses multiples.
« Le nombre de services de kinésithérapie au niveau national reste insuffisant, d’autres manquent d’équipements ou de personnel et cela se répercute sur les services offerts », a expliqué le Dr Ildephonse Nduwimana.
Il a demandé aux partenaires au développement de renforcer leurs appuis dans le domaine. l’AKB souhaite également une collaboration avec les autres professionnels de santé pour sensibiliser la population sur les bienfaits de la kinésithérapie. Il a souligné que la kinésithérapie précoce aide fortement à prévenir les handicaps qui empêchent les gens de fonctionner normalement dans leur vie quotidienne.
Le Dr Jérôme Ndaruhutse, délégué du représentant du bureau de l’Organisation Mondiale de la santé (OMS) au Burundi, a confirmé que la couverture des services de réadaptation, en particulier la kinésithérapie, est insuffisante. « A l’échelle mondiale, 2.4 milliards de personnes vivent avec des maladies nécessitant une réadaptation. Dans les pays à faibles revenus, plus de 50% des personnes qui ont besoin de ces services n’y accèdent pas »,
Il a réitéré l’engagement de l’OMS à soutenir les efforts du Gouvernement pour alléger le fardeau des maladies handicapantes et des besoins en réadaptation qui en sont la conséquence. Il a également souligné la contribution de l’OMS ; en partenariat avec l’APEFE, pour l’élaboration, aux côtés du MSPLS du « Plan Stratégique de Réadaptation au Burundi 2023-2027 ». « L’objectif principal de ce plan est d’accroître toutes les interventions en réadaptation adaptées aux besoins des gens dans leur communauté », a précisé le Dr Jérôme Ndaruhutse.
Le gouvernement burundais se dit satisfait du pas déjà franchi
Le Dr Oscar Ntihabose, Directeur Général de l’Offre des Soins et des Accréditations (DGOSA) qui représentait Mme le Ministre de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida a souligné dans son allocation que 15 hôpitaux publics et sous convention disposent déjà de services de kinésithérapie. Il a confié que le souhait du MSPLS est d’installer ces services dans toutes ces formations sanitaires et même dans les hôpitaux privés.
Parmi les actions déjà menées, il a relevé l’intégration des services de kinésithérapie dans les normes sanitaires du Burundi, la création en 2016 du Centre National de Référence en Kinésithérapie et Réadaptation (CNRKR) ainsi que la création en 2019 de la Filière de Formation en Kinésithérapie et Réadaptation (FFKR) à l’Institut National de Santé Publique (INSP).
Le Dr Oscar Ntihabose a salué les appuis des partenaires au développement qui ont contribué à la volonté du MSPLS de faire face aux affections handicapantes qui nécessitent des soins de réadaptation et en particulier la kinésithérapie. Il a remercié l’organisation belge APEFE, spécialiste de ce genre de projets de développement de la réadaptation dans les systèmes de santé, qui a commencé à travailler depuis 2011 aux côtés du MSPLS et du COPED ; l’Université Catholique de Louvain qui a permis la formation de nombreux cadres en kinésithérapie et l’OMS pour sa contribution à l’élaboration du plan stratégique de réadaptation du Burundi 2023-2027.
Dans son allocution, l’Ambassadeur du Royaume de la Belgique au Burundi, Mr Michael Wimmer, a félicité le CNRKR pour les services de qualité qu’il offre à ses patients, sans oublier l’ensemble des kinésithérapeutes du Burundi. « La Belgique s’engage à accompagner les plans stratégiques sectoriels santé du Burundi, en particulier celui qui concerne la médecine de réadaptation et la kinésithérapie ». Il a vivement souhaité que, dans les années à venir, les soins de kinésithérapie soient délivrés à travers tout le pays, particulièrement pour les plus vulnérables. Il a terminé en soulignant la perspective pour le Burundi de devenir un pôle de développement de la réadaptation dans la sous-région.
Les cérémonies de célébration de la Journée Mondiale de la Kinésithérapie ont été une occasion d’effectuer une journée portes ouvertes au CNRKR de Bujumbura, avec visite guidée du centre, démonstration de soins de kinésithérapie et consultations gratuites. Des stands rassemblaient également une vingtaine d’exposants, parmi lesquels des pharmacies qui proposent des produits de soins en réadaptation, de même que la plupart des centres et services de réadaptation publics et privés actifs à Bujumbura.
Un soulagement chez les patients
Parmi les patients qui ont bénéficié d’une consultation gratuite au CNRKR nous avons recueilli les témoignages de Jules Jumaini et Mme Goreth, vivant en mairie de Bujumbura et qui souffrent de paralysies causées par l’AVC (Accident vasculaire cérébral).
« C’est la deuxième fois que je fais une crise d’AVC. Mais cette fois-ci, c’est toute la partie gauche de mon corps qui est paralysée, témoigne Mme Goreth ». Conseillée de faire 10 séances de kinésithérapie, elle salue l’existence d’un centre de kinésithérapie dans un hôpital public. « Lorsque le médecin m’a dit de faire de la kiné, j’avais eu peur que je n’aie pas d’argent. Mais ici, je bénéficie de toutes les séances car elles sont couvertes par la mutuelle de la fonction publique ». Et de renchérir en affirmant que depuis qu’elle a commencé à faire la kiné, elle arrive à faire une trentaine de pas par jour.
Jumaini, de la zone urbaine de Cibitoke, salue la patience du personnel du CNRKR. « Il y a des patients qui refusent de faire certains exercices proposés par les kinésithérapeutes mais ceux-ci restent toujours patients car je pense qu’eux aussi savent qu’il y a certains exercices difficiles et douloureux », a-t-il justifié.
Cependant, Mr Jumaini a demandé que ce centre soit muni d’une pharmacie pour acheter certains médicaments prescrits. Et de déplorer que ces derniers coûtent cher dans les autres pharmacies. Un prix variant entre 22 et 25 mille francs burundais.
Les patients présents lors de ces consultations affirment que la création des services de kinésithérapie est d’une grande importance. Ils ont demandé que des services de kinésithérapie soient créés au niveau des communautés pour faciliter les déplacements des malades.