Durant trois mois, Carine Nduwimana, 5 ans, a été battue et astreinte à des corvées par une amie de sa mère. Les défenseurs des droits de l’enfant s’indignent et demandent que justice soit faite.
<doc7585|left>Native de la commune Gishubi, une petite fille était maltraitée lors de son séjour dans le quartier de Buyenzi, 13ème avenue. Son calvaire a pris fin le weekend du 24 mars, en retrouvant sa famille.
Sa vie a basculé lorsqu’elle quitte sa famille au début de l’année, au mois janvier 2013, confiée à ladite amie pour quelques jours. C’est à partir de là que le calvaire de la petite Carine commence. Chaque jour, elle puise de l’eau avec deux bidons, fait la vaisselle et d’autres tâches ménagères. A la moindre erreur, elle est rouée de coups. Elle porte des marques sur le visage, les bras et les jambes. La fillette raconte que la dame la battait avec {ikimoko} (une sorte de chicotte) et {umucumbisho} (une grosse palette en bois utilisée pour malaxer la pâte chaude). Le soir, elle dormait par terre, sur un tapis usé, sans aucune couverture : « Un jour, elle l’a battue et nous avons signalé les faits », révèle une voisine.
Celle-ci précise que cette « mère d’accueil »a bien été incarcérée durant quelques heures dans le cachot de la commune Buyenzi. Maisi comme c’’est une mère célibataire, elle vit avec son fils de 6 ans, et attend son deuxième enfant, la police ne pouvait pas l’emprisonner. Par ailleurs, personne n’a entamé des poursuites judiciaires. La mère indigne peut donc retourner chez elle, libre. Toutefois, le chef du quartier précise que l’intéressée ne restera pas impunie : « Nous attendons qu’elle mette au monde pour la poursuivre en justice. C’est inhumain ce qu’elle fait subir à la pauvre petite. »
<doc7586|right>Une vaine première dénonciation
Le voisinage était au courant des faits, mais le calvaire de Carine s’est poursuivi pendant plusieurs semaines. Un jour, alors que la fillette portait difficilement deux bidons remplis d’eau, un homme l’aperçoit. Celui-ci est un ami de Christine Ntahe, présent dans le quartier pour faire réparer sa voiture. Sidéré, il s’enquiert du cas de la fillette auprès des gens qu’il croise. « Il a demandé au garagiste comment une mère peut infliger une telle corvée à un enfant. Le garagiste lui a alors dit qu’elle est maltraitée par sa tutrice », raconte Christine Ntahe.
Informée , l’ancienne journaliste, grande amie des enfants vulnérables , alerte les autorités administratives pour que l’enfant quitte au plus vite cette famille. La fillette est recueillie par une autre femme du même quartier en attendant de connaître sa famille d’origine. C’est lors des échanges avec la fillette que l’ancienne journaliste apprend l’identité des parents. Elle prend contact avec sa mère : « Quand je lui ai appris ce qu’on faisait à sa fille, elle était effondrée. Car elle croyait que sa fille était en de bonnes mains, elle ne s’était même pas inquiétée. Elle a demandé qu’on lui ramène sa fille. »
Christine Ntahe demande et reçoit de l’aide au FVS/Amade (Famille pour Vainqueur du SIDA / Amies à la Défense des Droits des Enfants) pour emmener Carine chez sa mère. « Sa famille, les voisins, les administratifs de la commune Gishubi attendait impatiemment le retour de la petite. Il y a avait un climat rempli de joie et d’émotion. » Depuis son retour, sa mère est aux petits soins pour sa benjamine orpheline de père.
Un trafic humain …
Ce cas, selon Prisca Niyonzima, coordinatrice du projet GRAPP (Great Lakes Anti-trafficking Protection Partnership) au sein de l’ONG Heartland Alliance, illustre un trafic humain et celui de la maltraitance des enfants : « Apparemment, la dame n’a pas dit toute la vérité sur ses intentions envers la petite. » Même constat pour Goreth Girukwishaka, coordinatrice de l’Observatoire Ineza pour les droits de l’enfant (OIDEB). C’est un abus de confiance, affirme-t-elle, elle a utilisée la ruse pour parvenir à ses fins. Il faut aussi interroger pourquoi la mère ne s’est pas inquiétée du sort de sa fille et surtout dans quel cadre la petite Carine est partie vivre chez la prétendue amie de sa mère. Et de poursuivre que cette dernière devrait être poursuivie en justice : « Une enfant de 5ans qui vit dans la capitale devrait normalement être à l’école maternelle et non jouer les domestiques. Elle était une esclave »
Cela nous renvoie aussi sur le travail des enfants. La loi est claire. Un enfant ne peut pas travailler tant qu’il n’a pas atteint 16 ans révolus. « L’agresseur doit répondre de ses actes, être punie conformément à la loi ! Elle a commis plusieurs délits. » La coordinatrice de l’OIDEB souligne qu’il est, par ailleurs, strictement interdit de lever la main sur un enfant, même sa propre progéniture. Les deux coordinatrices affirment que la petite a besoin d’un accompagnement psychosocial pour surmonter les traumatismes qu’elle a subis, sinon elle pourra penser que toutes les mamans sont des barbares…