Ce 13 février, le Burundi était à l’honneur. Le monde du café était là. Les professionnels du café ont exposé, débattu, sur tous ses angles. Du Japon, Inde, Colombie, Brésil, mais aussi le Gabon ou la Côte d’Ivoire, le Malawi avec sa récolte de moins de 2 000 tonnes, tous les continents étaient représentés.
L’histoire du café aurait débuté par un berger éthiopien qui remarqua l’effet des fruits du caféier sur ses chèvres. Il en parle au prieur, qui en fait une préparation. De là, il passe en Arabie, où la boisson se répand, pour arriver à Marseille au 14ème siècle. Depuis, que de chemin parcouru! L’historien Alexandre Hatungimana attire notre attention sur les enjeux politiques autour de la culture du café. L’ONG International Alert lui emboîte le pas. L’obligation de planter et d’entretenir le café serait à l’origine de la première vraie révolte des paysans du Burundi contre la colonisation, en… fuyant vers les pays anglophones voisins. Plus de 120 000 paysans auraient émigré vers l’Ouganda. Pour A. Hatungimana, le problème reste le trop d’Etat dans le secteur.
Un secteur dynamique, durable
C’est en Afrique de l’Est où la place du café dans l’économie est la plus importante. Mais le diagnostic du président de l’Intercafé est sans appel : faible productivité, manque de ressources financières. Mr François Nkurunziza est d’avis qu’un cadre légal stable, dans un environnement privatisé, redynamiserait le secteur. La privatisation doit aller à son terme. Interrogé sur le sort du projet du café de spécialité Ngoma Mild, qui fut à un moment très apprécié au Japon, il répond que la filière n’a pas pu le pérenniser. L’organisation East Africaine du café, qui regroupe 11 pays membres, a contribué à la formation des agents de la filière café burundaise. Notre café est mieux connu dans le monde.
Joseph Ntirampeba, qui préside la Confédération Nationale des Associations des Caféiculteurs (CNAC) demande plus de transparence dans la fixation du prix de la matière première. Il partage l’avis de l’Intercafé sur la privatisation, en précisant que les caféiculteurs doivent être parmi les repreneurs. Ils paieront le prix. Selon lui, rendre durable le développement de la caféiculture, c’est accroître la part des caféiculteurs dans les fonds gérés par l’Intercafé.
Une bonne idée
Notre secteur bancaire avait répondu présent, comme sponsors, comme conférenciers. La Directrice Générale de Kenya Commercial Bank Burundi, Gloria Nyambok, fut très applaudie. Elle est consciente de l’impasse financière du secteur café. Sans garantie, les banques sont impuissantes. Elles doivent à leurs actionnaires beaucoup de prudence. Le négoce du café exige beaucoup de fonds, nul n’aurait assez de maisons. Seules les multinationales resteront dans le secteur. Jusqu’à présent, la garantie par les stocks est faite par l’autorité de régulation du café. Les banques ne pourraient compter que sur la régulation étatique, pour certifier la quantité et la qualité du café acheté à crédit.
Mme Nyambok fait une proposition. Il y a de la place pour un nouveau type d’acteur : le gestionnaire d’entrepôt agréé (en anglais « collatéral manager »). « Nous devons promouvoir cet entreprenariat local, comme il en existe dans d’autres pays. » Son rôle est de garantir aux banques que les stocks financés sont bien là, en quantité, en qualité. Cependant, un bémol : arrive un jour une baisse dramatique des cours.
Le championnat des préparateurs du café
Le moment fort de la Conférence Exposition fut sans aucun doute la compétition des meilleurs préparateurs du café (en anglais « barrister »). Pour la première fois, des Burundais se sont frottés à ceux de l’Ouganda, de l’Afrique du Sud… Ephrem Sebatigita, sans doute le plus atteint par le virus du café, parle avec passion de ce métier. Il est fier d’avoir œuvré dans la réussite de la compétition. Il nous présente les champions du Burundi. Hélas, Abdallah (du café ‘’la silhouette’’), qui avait gagné la compétition nationale, fut éliminé. Il n’a pas respecté les 15 minutes prévu. Arrivé deuxième de la compétition internationale, le barrister du Club du Lac, Giga, mérite toutes les félicitations.
Nos hôtels et nos restaurants ont fait le plein. A l’Hôtel Club du Lac Tanganyika, sur le sable fin, sous des tentes venues express de Nairobi, l’anglais y dominait. Une ambiance de fête. Il y avait comme un parfum du monde en devenir.
Comme dans toute messe, l’adepte rentre avec l’espoir, celui du secteur café : équilibre et dynamisme. Pour cela, apprenons des autres. Comme au Kenya, le Burundi gagnerait si les gens de la ville plantaient du café, là d’où ils proviennent, à la campagne. Les agronomes, seuls, ne sauraient gérer efficacement le secteur. C’est une industrie. C’est du commerce. Il y a de la finance. La Bourse de New York fixe les cours.
1. Quand le secteur prive ajoute de la valeur:
L’entrepreneur ougandais Andrew Rugasira, directeur general de Good African Coffee a pris part (avec Paul Polman, directeur general de la multinationale Unilever) a un panel de discussion lors de la 37e session du Conseil des gouverneurs du Fonds International de Developpement Agricole-FIDA (session tenue a Rome, Italie du 19 au 20 fevrier 2014).
Il a raconte comment son entreprise travaille avec 14.000 cafeiculteurs ougandais qui lui fournissent du café Arabica a son usine de Kampala en Ouganda. Le produit fini est vendu directement aux magasins aux Etats-Unis, Europe et ailleurs.
La compagnie encadre les cafeiculteurs en vulgarisant les bonnes methodes de production du cafe arabica et a cree 17 cooperatives d’epargne et credit pour eux.
« Nous avons vu les fermiers transformer leurs communautes », temoigne Andrew Rugasira.
2. Le nigerian Kanayo F. Nwanze, president de FIDA a declare:
« Nous investissons dans la population rurale…parce que nous croyons que ca peut etre un business qui rapporte beaucoup et qui est tres performant, une digne occupation qui produit de la nourriture, cree des emplois, fait vivre des familles et met les pays sur la voie de developpement durable et inclusif… »
(voir « Grounds for optimism: Governing Council spotlights benefits of investing in rural people », http://ifad-un.blogspot.com).
Merci.
Thank you so much Charles for this beautiful and uplifting article. At a time when predominantly negative news are coming from Burundi on a daily basis, it’s conforting to see that positive energies are also in action to improve dauily lives of all Burundians. It’s also an undeniable exploit that the organisers managed to pull this off despite the storms that ravaged our beautiful capital city. My sincere congratulations! Your are truly an inspiration to many in Burundi and beyond its borders! As a member of the Burundi Diaspora living in the UK, I have positively noted the following passage of the article: ‘Pour cela, apprenons des autres. Comme au Kenya, le Burundi gagnerait si les gens de la ville plantaient du café, là d’où ils proviennent, à la campagne.’ My suggestion would be that the professional of the sector think about mechanism and structures that could allow Burundians living in cities and abroad to invest in plantations. Coupled with ‘fair trade’ principles, this would also permit them support their wider families, local communities and the entire county. It’s a shame, however, that the ‘NGOMA MILD’ brand couldn’t take off until now, and I trust the specialists of the field are thinking about ways to relaunch it. Congratulations again! Komera k’umuheto muri orwo rugamba rw’iterambere!