Lors de la deuxième émission consacrée sur {Le pluralisme au fil de l’histoire burundaise}, les deux anciens présidents, Pierre Buyoya et Sylvestre Ntibantunganya, ont mené un débat d’un très haut niveau.
<doc3749|center>Au sujet des facteurs internes qui ont rendu nécessaire le pluralisme politique à la fin des années 80, les deux hommes n’avaient pas toujours le même regard. Ainsi, Sylvestre Ntibantunganya n’a pas hésité à revendiquer son rôle « d’infiltré » dans l’Uprona qu’il était censé servir alors qu’il travaillait déjà clandestinement pour Frodebu.
Pierre Buyoya, interrogé sur le verrouillage politique lors de son accession au pouvoir a tenu à rappeler que c’était l’époque du parti unique. « Avec le sommet de la Baule, Mitterand a sommé les pays africains d’accepter le multipartisme, sous peine de perdre les aides au développement. » Pierre Buyoya a indiqué que la Baule a été le « déclencheur » de la démocratisation en Afrique mais, pour le Burundi, ce sont aussi les événements de Ntega Maragangara qui l’ont convaincu, a-t-il affirmé, dans son idée de prendre le problème ethnique à bras le corps.
Ainsi, l’ancien président s’est longuement expliqué sur le « gouvernement de l’unité » avec un premier ministre hutu et un gouvernement composé à 50% hutu et 50% tutsi et toute une série d’initiatives dont la Charte de l’unité nationale.
« En 1993, le Frodebu était sûr de gagner »
Les deux hommes ont ainsi revisité l’histoire récente du Burundi. On sentait bien que sur certaines questions, comme le gouvernement de transition, ils avaient deux points de vue diamétralement opposés. Sylvestre Ntibantunganya soutenait que son parti était conscient de remporter à coup sûr les élections « un homme une voix », compte tenu de l’histoire. « Nous avions même peur de la victoire. Nous disions, nous allons gagner mais ils vont nous tuer ». Pierre Buyoya lui affirme que la question d’un gouvernement de transition ne lui a jamais été formellement proposée…
Mais au-delà de ces coups feutrés, assenés avec courtoisie mais conviction, il faut souligner la qualité du débat mené par deux journalistes burundais, Carine Fyiroko (RPA) et Amrani (Rema FM) et Valérie Nivelon (RFI) pour faire parler les deux hommes politiques sur l’expression du pluralisme au Burundi, que ce soit le pluralisme politique, ethnique, de la société civile, des médias.
Au moment où on assiste à des blocages dans le dialogue politique entre le pouvoir et l’opposition, Sylvestre Ntibantunganya et Pierre Buyoya ont tout de même montré que l’on peut ne peut être d’accord mais dialoguer et arriver à trouver un compromis. C’est peut-être un des acquis d’Arusha.
Rappelons que ces émissions ont été conçues avec l’ensemble des médias publics et privés majeurs du pays ; c’est-à-dire les radios, les télévisions et la presse écrite représentative, non pas sous la forme de publireportage, mais véritablement d’une organisation concertée et solidaire. Des radios étrangères sont partenaires du projet (radio Okapi, RFI, etc.) Le projet « Conférence pour mémoire » a bénéficié du soutien constant, de l’appui technique et financier de la coopération suisse.