Par la protection et l’entretien de la réserve naturelle et forestière de Bururi, les Batwa de la colline Kiganda améliorent leur qualité de vie. Certains responsables estiment qu’ils ont davantage besoin d’un changement de mentalité.
Mercredi 8 septembre, vers 16h. Sur la colline Kiganda, dans le village des Batwa, se dressent une trentaine de maisons couvertes de tôles. Les portes et les fenêtres sont colorées, les murs sont cimentés. Aux alentours, plusieurs sortes de cultures : des bananerais, de jeunes avocatiers, des maracujas, du manioc… Même des plantes qui constituent de la nourriture pour le bétail. Peu de personnes sont présentes dans ce village, les enfants sont en train de jouer. Une femme sur place dira que les autres sont à Bururi car c’est le jour de paye. « Ils font des travaux d’entretien de la réserve de Bururi et vont à Bururi pour être payés», répondra une femme en congé de maternité. Elle a son nouveau-né dans ses bras.
« Nous travaillons pour 4000 BIF par jour, mais nous épargnons 1500», confiera Joselyne Nsabimana, 28 ans, une femme Mutwa rencontrée au bureau de l’OBPE à Bururi. Elle et plusieurs autres femmes Batwa sont venues pour la paye. Certaines ont perçu leurs salaires, d’autres attendent leur tour avec impatience. Grâce à l’épargne, elles assurent que leurs familles installées sur la colline Kiganda se sont achetés des terres et construits des maisons couvertes de tôles.
Satisfactions
« Actuellement je suis propre, je trouve du savon pour lessiver mes vêtements. J’entretiens mes cheveux et prends soin de mon visage », témoigne Joselyne Nsabimana. Selon elle, ceux qui ne la connaissent pas acceptent difficilement que c’est une femme Mutwa.
Concilie Kankindi, mère de six enfant et grand-mère de deux petits-fils saluent qu’elle a actuellement une source de revenu : « Maintenant, j’ai une maison couverte de tôle et je touche de l’argent pour subvenir à mes besoins. Cela suffit pour moi. »
Les Batwa de Kiganda interrogés semblent satisfaits de leur vie actuelle. Mais ils regrettent qu’ils n’aient pas encore d’animaux domestiques pour le fumier : « Les terres ne peuvent donc pas être fertiles. » Ils aimeraient que les sommes qu’ils sont en train d’épargner soient utilisées soit dans l’extension des terres arables, soit dans l’achat des animaux domestiques ou dans la cimentation de leurs maisons.
Selon Jérôme Nishishikare, conservateur responsable de la réserve naturelle et forestière de Bururi, ces Batwa ont un emploi grâce à un projet en cours de restauration et de résilience des paysages du Burundi qui succède à un autre semblable. Ce dernier a permis à plus de 30 ménages de Batwa riverains de la réserve d’épargner 19 millions BIF. Une somme qui leur a permis, fait-il savoir, de s’acheter plus de 3 hectares de terres et de se construire des maisons de 5 sur 7 m. Ce cadre de l’OBPE reconnaît que les 2500 BIF qu’ils encaissent chaque jour ne suffisent pas pour couvrir tous leurs besoins : « La date mensuelle de paye arrive alors qu’ils ont déjà contracté beaucoup de dettes. »
Du pain sur la planche
« Ces Batwa n’ont pas assez de champs ou d’animaux domestiques comme d’autres communautés», ajoute M.Nishishikare. Quand leurs salaires tardent un peu, il observe leur tendance à retourner vivre illégalement dans la réserve naturelle : « Ils y vont pour chercher du bois de chauffage qu’ils vendent à 2000 BIF, chercher de l’herbe etc. »
Cet encadreur des Batwa qui travaillent dans la réserve craint qu’ils ne retombent, à la fin du projet, dans la misère : « Ils assimilent difficilement l’idée d’épargner. Nous les forçons de le faire. » Pour lui, des sensibilisations sont plus que nécessaires pour convaincre les Batwa de penser à leur avenir. Et d’insister : « Quand bien même on débloquerait pour eux des milliards, rien ne peut réussir s’ils ne changent pas de mentalité. » Mais quand ils sont consultés pour des projets les concernant, nuance-t-il, ils se mettent sans hésiter au travail.
Contacté, Emmanuel Nengo, représentant légal de l’association « Unissons pour la promotion des Batwa (Uniproba), juge essentielle la sensibilisation sur la pérennisation des acquis : « Ils doivent comprendre que le bienfaiteur ne sera pas toujours là pour entretenir leurs maisons.» L’ancien député se réjouit du pas franchi par les Batwa de Bururi « qui vivaient avant de la mendicité ». L’important, poursuit-il, c’est qu’ils sachent que leurs enfants doivent étudier. Aux bienfaiteurs, il demande de penser à insérer la distribution du matériel scolaire et la sensibilisation dans leurs projets pour que les Batwa comprennent que l’éducation d’un enfant est un véritable capital à long terme.
Le chef de cabinet du gouverneur de Bururi, Juvent Ndayikeza, confie que 90% des Batwa de la commune Bururi vivent dans des villages communautaires, « 6 à 7 villages. » Et jusqu’en 2017, précise-t-il, tous les Batwa de cette commune vivaient dans des maisons qui ne laissent pas fuiter l’eau des pluies. Il se félicite du niveau de vie déjà atteint et fait savoir que l’administration provinciale continue de chercher d’autres projets pour leur trouver un travail.
« Certains responsables estiment qu’ils (les Batwa) ont davantage besoin d’un changement de mentalité(sic).Pourquoi diable les gens dites « evoluees » ont cette facheuse habitude d e vouloir a tout moment imposer aux autres leur facon de vivre et leur vision du monde? Les Batwa en tant que peuple autochtone ont vecu et survecu a toutes sortes de changements,crises et menaces pendant plusieurs milliers d’annees.A chaque occasion, ils ont pu s’adapter sans necessairement « changer leur mentalite. » Il faudrait plutot les aider a garder et a ameliorer leurs conditions de vie sans toutefois les acculturer en les forcant a s’assimiler aux habitudes et comportements etrangers a leur culture qui finiraient par detruire leur identite de gardien de la nature et de la biodiversite.