Lundi 23 décembre 2024

Opinions

Burundi : une schizophrénie ambiante

Je m’apprêtais à écrire sur une approche comparative de la façon dont le Burundi et le Rwanda appréhendent leurs destins tragiques depuis la fin du XIXème siècle quand j’ai lu la lettre ouverte de notre compatriote David Gakunzi adressée au président de la République Française, François Hollande. Cela m’a détourné de cette intention première pour m’arrêter à l’attitude que nous les Barundi adoptons le plus souvent face à notre histoire.

D’abord, je constate que toutes les grandes tragédies qui ont secoué le pays n’ont jamais connu de dénouement judiciaire suffisamment clair pour que toute la nation les intègre dans son héritage historique et surtout culturel de manière intelligente, objective et apaisée. Depuis « L’affaire Rwagasore » jusqu’aux crimes perpétrés aujourd’hui en toute impunité à Muyinga, à Kirundo, à Gatumba, à Kamenge, à Musaga ou Rumonge… une chape de plomb recouvre les sujets et tous avons peur de creuser pour mieux comprendre afin de condamner les vrais coupables et surtout innocenter celles ou ceux qui le méritent. ((Je reconnais un travail exceptionnel qui est fait aujourd’hui par certains représentants de la société civile comme dans « L’affaire Ernest Manirumva ». Pourvu que ça dure et s’étende à d’autres segments de la société.)) Aucune recherche digne de ce nom n’est encouragée pour que la vérité triomphe sur la rumeur, que la vérité l’emporte sur les on-dit, que la lumière de l’objectivité efface les ténèbres de la lâcheté, l’hypocrisie et la veulerie.

Ensuite, je note une propension à vivre par procuration. Il y a, de nos jours, une tendance à endosser ou singer le Rwanda comme si ce pays était le miroir de nos propres turpitudes enfin vaincues ou du moins traitées. Et ce que nous ne parvenons pas à dire ou faire chez nous, nous le projetons dans les réalités Outre-Kanyaru comme si elles étaient nôtres. Si notre compassion pour les victimes du génocide des Tutsi Rwandais est compréhensible, qu’en est-il des victimes de tels massacres chez nous ? Que signifie faire le deuil du voisin quand nos propres cadavres sont encore frais dans notre maison ?

Je ne crois pas en une sensibilité sélective. Et tant que cette attitude schizophrénique nous hantera, la paix des cœurs et celle du pays ne se reconstruiront jamais.

Forum des lecteurs d'Iwacu

16 réactions
  1. Dr NTIHEBUWAYO Isaî

    Parlez bcp du Rwanda en comparaison avec le Burundi, le Génocide Rwandais est fait sur qui? Qui l’a fait réellement? Quel ethnie qui a manqué beaucoup de le leurs? Ne chante ce que vous ne connaissez pas: Au Rwanda il y avait combien de Tutsi sauf les militaires et certains civiles tandis que les Hutus était tout le pays, alors on tue beaucoup en prenant fuite qu’en prenant le pays? Wakwica benshi kubatari bahari canke kubari bahari?)

  2. Terimbere

    Je pense que l’on devrait essayer d’etre objectif dans nos discussions!
    Dans cet article, J-MN n’a attaque personne, une chose rare!?! Il a emis des autocritiques fondees a notre egard, nous les Burundais!
    Qu’est-ce qu’il y a d’anormal???

  3. Burundi : cette fois-ci nous sommes prévenus!
    François Bugingo
    http://m.journaldequebec.com/2014/04/14/burundi–cette-fois-ci-nous-sommes-prevenus

  4. BARARWANDIKA

    Monsieur Ngendahayo ,je me perds dans votre argumentation.Gakunzi n’a fait que le devoir d’intellectuel comme vous écrivez souvent vos papiers. Quelle est sa faute pour rappeller le drame du Rwanda?
    Toi aussi dans ton mémoire sur Nayigiziki sur les transes de Karinga tu t’intéressais sur les péripéties de ce Rwanda d’avant le génocide est-ce que tu étais atteint de schizophrénie.?
    Je te demande d’être humble dans tes analyses où tu es tombé sur ta tête ,je te croyais guéri après avoir tellemment changé de partis, une prostitution politique sans nom.

    • tuvugukuri

      Bien dit Baragwandika!!Et j aurais aimer une reponse venant de Ngendahayo a tes propos..Ce muganwa se croit plus malin kabisa..
      En tout cas moi sui habituer a ses manoeuvres de chroniqeur toujours penchant.

    • SENYAMWIZA

      Mr NGENDAHAYO J.MARIE a tout essayé, il a tout tenté avec ceux qui ont dirigé notre pays depuis une vingtaine d’années mais rien ne lui a réussi. Il revient maintenant avec un argumentaire, on ne peut plus flou, pour nous donner des leçons. GAKUNZI n’a fait que relater les faits historiques. A ce que je sache Mr GAKUNZI ne fait pas partie des décideurs politiques de ce pays donc ce n’est pas à lui de prendre les décisions par rapport à notre passé qui ne passe pas. C’est à vos anciens amis du CNDD-FDD à la commande depuis 10 ans de prendre leur responsabilité. Tenez: ils nous ont promis une Commission Vérité et Réconciliation mais ce qu’ils nous servent à la place c’est la très contestable Commission Terre et autres Biens, c’est la création et l’armement des milices IMBONERAKURE qui nous rappellent les INTERHAMWE de sinistres mémoires…. ! En conclusion donc, ce n’est pas à GAKUNZI que vous devriez vous attaquer mais aux décideurs politiques du CNDD-FDD, un parti politique dont vous êtes fondateurs et membre influent avant que vous ne tombiez en disgrâce… ! Un conseil de sage cher Monsieur NGENDAHAYO: si ce que vous avez à dire n’est pas pertinent alors taisez-vous car la plupart des internautes d’i Wacu vous connait, malheureusement pour vous .…. !

      • Jean-Marie Ngendahayo

        Cher Senyamwiza,

        Pourquoi tant de violence et d’animosité pour me faire savoir votre désaccord sur ce que j’ai été à vos yeux et ce que j’écirs aujourd’hui?
        Le jour viendra où j’écrirai mes mémoires, en attendant il me semble tout de même injuste – suspect? – que chaque fois que j’écris quelque chose il faille revenir sur une description – erronée et pour l’essentiel, du reste! – calamiteuse de mon passé.
        Premièrement, je pars du texte de monsieur Gakunzi pour méditer sur une inclination générale chez nous au Burundi vis-à-vis des réalités rwandaises. Ensuite, je pense qu’il ne revient pas aux autorités du pays d’avoir le monopole de la parole et de la pensée. Ne nous infantilisons pas et poursuivons cette nouvelle habitude d’échanger les idées et nous contredire quand c’est justifié ou nous stimuler si cela est pertinent.
        Pourquoi m’inviter au silence? Je ne pense pas avoir critiqué qui que ce soit ou quoi que ce soit sans argumenter et sans le faire au nom de valeurs positives universellement admises. Maintenant, que je me trompe est autre chose. Et c’est bien pour ça que nous débattons.
        Enfin, savez-vous que c’est uniquement dans les dictatures que l’on condamne le délit d’opinion?

        Fraternellement

  5. KABADUGARITSE

    Bravo grand-frère! Habarirwa icumva hakerekwa ikibona!

  6. Terimbere

    Merci pour cet article qui parle d’un sujet tres important pour notre patrie, et merci aussi pour la qualite, la clarite et surtout pour l’impartialite de ces ecrits!
    Cher J-MN, c’est le Burundi qui a fait de vous ce que vous etes, je parle de l’education et de votre expertise! Vos talents sont tres utiles et devraient positivement contribuer pour ameliorer notre societe!
    Par notre passe, trop peu de bonnes choses ( pour ne pas dire qu’elles n’existent pas) sont venues du Rwanda, et je ne suis meme pas sur, si le Rwanda pense meme a nous!
    Il est toute fois difficile de faire un travail comparatif car les systemes politiques de ces deux pays sont aujourd’hui diametralement opposes!
    J’ai tout de meme constate une chose: Au Burundi, malgre tous les maux qu’on a connus, on n’est jamais arrive a la notion de DESHUMANISATION!
    Grande estime!

  7. Ndagijimana

    @Ngendahayo
    « … mieux comprendre afin de condamner les vrais coupables et surtout innocenter celles ou ceux qui le méritent»

    Les assassinats, génocides et massacres ethniques ou politiques de tous les temps au Burundi ont toujours été imputés principalement aux tenants du pouvoir et à l’armée nationale, cela va de soi. C’est pourquoi ils devraient être les premiers à présenter des excuses nationales (conjointes) avant même d’engager d’autres mécanismes ou procédures de justice ad hoc. Il y a toujours un début à tout!

  8. borntomakelovenotwar

    Bonne réflexion. Je suis 100% d’accord avec toi.
    (Et que contenait la lettre que vous évoquez ?)

    • Jean-Marie Ngendahayo

      A « Borntomakelovenotwar »,
      Il s’agit d’une lettre ouverte adressée au president François Hollande l’invitant à avoir le courage et l’honnêteté de poursuivre le processus de contrition commencé par son prédécesseur Nicolas Sarkozy au sujet de la complicité de la France dans le genocide des Tutsi au Rwanda en 1994. La lettre est très bien écrite aussi bien du point de vue de la forme que de celui du fond.
      Fraternellement

      • Jean-Marie Ngendahayo
      • borntomakelovenotwar

        J.M.Ng., à propos de la lettre de D.Gakunzi et un peu d’amalgame:
        1. Le problème est que le Rwanda veut faire porter toute la responsabilité à la France. Sinon, les français auraient déjà demandé Pardon. Malheureusement, vouloir assimiler les français aux Interahamwe alors que ces même français ont quand même sauvé certains tutsi passe à côté, surtout pour une grande puissance. Les russes, les américains, les chinois ont nié les crimes/génocides qu’ils ont personnellement commis. Les français ne sont pas différents. La Communauté Internationale n’existe pas, mais existent les Intérêts des grandes puissances. L’ONU était présente avec une force considérable, qu’a-t-elle fait ? Ils ont vidé les lieux pour une vingtaine de casques bleus tués. Ces gens étaient venus faire de l’argent et pas pour protéger des civils. En Somalie pareil pour les USA, la Syrie est une actualité accablante pour les intérêts russes et américains. AU Rwanda, les casques bleus étaient surarmés et les FAR avaient été désarmés pendant le cessez-le-feu et les armes contrôlées par la MINUAR. Comment, quand, Qui a remis ces armes aux génocidaires ? Comment a-t-on organisé pour que le FPR fasse une infiltration dans tout le pays ? BREF : Les grandes puissances s’étaient convenu ou avaient eu des malentendus et ont le Rwanda dans le chaos total. Elles doivent toutes avoir le courage de demander pardon.
        2.Croire que le FPR a été JUSTE un libérateur des Rwandais est archi-faux, il en a massacré aussi assez. Vous n’avez qu’à entendre les militaires du FPR : Ben RUTABANA dit : il y a eu des commandants qui ont tué pour le plaisir de tuer. Que dire de l’Ouganda qui a soutenu le FPR et le sang que ce dernier a versé ? C’est bien lourd. Il y a donc aussi des criminels. C’est comme au Burundi, croire que le Cndd-Fdd n’a été que libérateur est archi-faux. On peut e demander même si la liberté et la démocratie étaient leurs principales causes et aspirations, à voir ce qu’ils font pendant ces 9 ans ?!
        3. Tous les criminels sont sont criminels, Kagamé, ses hommes, comme les français et les FAR qui les ont soutenus. L’ONU dans son ensemble et ses militaires qui ont laissé les gens se faire massacrer de toutes parts alors qu’ils avaient les moyens de les protéger.
        4. Aux burundais actuels comme aux autres africains, seuls les Burundais peuvent compatir pour les burundais. Faites-vous la paix, la Communauté Internationale ne viendra que pour ses intérêts. Sinon, pour ces grandes puissance, s’il faut que des milliers de burundais meurent pour les intérêts des grandes puissances, ces dernières vous livreront toutes les armes dont vous aurez besoin. Méfiez-vous donc.

        • bcbg

          Tu ne crois pas si bien dire!!!!

      • Sibazuri

        Ceux qui connaissent Gakunzi David à ancien Athenée de Bujumbura peuvent ici temoigner de son combat ,son bravour et surtout sa lutte pour l’égalité de tous , sa voix et son combat pour la liberation de Mandela…

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