Samedi 17 août 2024

Société

Burundi/Médias : Floriane enfin libre !

17/08/2024 2
Burundi/Médias : Floriane enfin libre !
Retrouvailles entre Floriane et son papa

C’est ce vendredi 16 août, au coucher du soleil, que la journaliste Floriane Irangabiye de la radio en ligne ’’Igicaniro’’ basée au Rwanda, condamnée à une peine de 10 ans de prison pour ’’atteinte à l’intégrité du territoire national’’, est sortie de la prison de Bubanza suite à une grâce présidentielle. Un moment de fortes émotions.

Le soleil commence à décliner laissant entrevoir ses quelques rayons rouges à travers les palmiers et le mirador ouest de la prison de Bubanza quand, soudain, un brouhaha monte de cet établissement pénitentiaire. Un cliquetis des clés et un crissement du vieux portail aux multiples cadenas séparant cet autre univers du monde libre.

Cette porte faite de barres de fer, à double battant, s’ouvre. Une silhouette apparaît : « C’est la journaliste ! », s’écrient les quelques prisonniers et les  policiers postés à l’entrée de la prison.

C’est une Floriane toute rayonnante, le make-up irréprochable, portant des hauts talons, arborant une longue tenue en tissu-pagne aux couleurs vives qui franchit ce portail. Elle est tellement pressée de partir, de quitter cet endroit qu’elle oublie même de signer dans un registre de sortie. Elle est vite rappelée, elle revient, réclame un stylo et signe dans quelques secondes dans ce registre bleu.

Elle a hâte d’embrasser tout un monde venu l’accueillir : ses parents, sa petite sœur, ses proches, ses avocats, et quelques officiels présents.

Des étreintes interminables pleines d’émotions, la maman de Floriane entonnera même un chant religieux pour remercier le ciel pour ce moment : « Satan est en déroute ! », lancera-t-elle en serrant très fort sa fille. Floriane ne parvient pas à retenir ses larmes, elles dégoulinent sur ses joues quand elle serre très fort sa petite sœur, Déborah.

Un moment qui fait vite oublier les deux heures passées à attendre l’arrivée du directeur de la prison de Bubanza pour la signature du billet d’élargissement de Floriane.

Cet administratif qui se met un peu à l’écart fait signe aux avocats et rappelle qu’il y a d’autres papiers que cette journaliste doit signer avant de partir.

Me Éric Ntibandetse amène vite sa cliente dans un des bureaux pour cette formalité. La nuit tombe, les  trois journalistes présents rappellent aussi qu’il y a la presse.

Éloquente, Floriane répond aux questions avec brio : « Je suis très heureuse parce que je viens de retrouver ma famille, je viens de sortir de la prison de Bubanza où je venais de passer quelques mois mais après une année et plus de 9 mois d’emprisonnement ».

Elle ne marque pas de pause, elle enchaîne : « C’est un grand soulagement pour ma famille, mes enfants, mes proches. Je n’oublierai jamais cette date du 16 août 2024 avec la grâce présidentielle que je viens de bénéficier de la part du chef de l’Etat, c’est un geste louable, noble de sa part en tant que Père de la Nation ».

S’il a pu faire cela pour moi, s’il a pensé à moi, reconnaît-elle, je lui revaudrai cela toute ma vie, c’est une page de ma vie qui s’écrit, certainement que ne je n’oublierai jamais.

« La prison, n’est pas à souhaiter même pour ton ennemi »

Floriane embrassant sa maman juste à sa sortie de prison

« Je remercie tous ceux qui ont lancé un appel vibrant, en particulier l’UE, elle n’a cessé de me soutenir, elle a peut-être tout fait pour que ce jour ait lieu, je remercie l’ensemble des organisations de défense des droits humains, je remercie ma radio, ’’Igicaniro’’, elle a tout fait pour que je ne tombe pas dans les oubliettes », souligne-t-elle avant de poursuivre. « Je tiens à remercier les organisations internationales, comme RSF, Tournons la Page et en particulier Amnesty International ».

Floriane aura un mot pour les activistes des droits de l’Homme : « Je remercie tous ceux qui défendent les droits humains parce que la prison est un lieu où tu ne souhaiterais que même ton ennemi ait à passer un moment, qu’il soit petit ou long. C’est un endroit où l’on apprend ».

La prison, reconnaît cette journaliste, c’est une maison de correction. Et d’avouer qu’elle fera des efforts pour être une bonne citoyenne prête à  ’’apporter sa pierre à l’édifice pour construire un Burundi meilleur auquel chaque citoyen aspire’’ : « Au président, j’y reviens encore, je lui souhaite la paix, qu’il s’attèle au développement de ce pays, que l’économie de ce pays retrouve sa vitesse, pour que ce pays parvienne à se démarquer et j’espère en faire partie ».

Une question : comptez-vous reprendre votre métier de journaliste ? Étonnée, surprise par cette question, Floriane marque une pause, elle écarquille les yeux, visiblement, elle ne s’attend pas à cette question. Après un petit moment d’hésitation et une bouffée d’air, elle lâche : « Euh, le métier de journaliste ? Oui, mais peut-être de façon différente de la manière d’avant, parce qu’il y aurait eu quelque chose qui a dérapé de mon côté. Je pourrais faire autre chose, j’ai un diplôme et j’avais d’autres occupations auparavant », confiera-t-elle avant de prendre place dans le véhicule qui l’attend : « Il faut que je retrouve vite ma fille Chloé et mon fils Evan ».

 Le Président invité à  désengorger les prisons »

Le président de la CNIDH, la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme, a tenu à être présent sur les lieux, c’est lui qui a amené le directeur de la prison de Bubanza à bord de son véhicule double cabine. Il était très attendu.

Sixte Vigny Nimuraba appelle le chef de l’Etat à tout faire pour que la population carcérale puisse diminuer.

La défense de la journaliste Floriane Irangabiye a tenu à saluer la décision du chef de l’Etat : « C’est une décision juste et légale, elle vient à point nommé parce que la santé de notre cliente était menacée, l’exécution de la peine prononcée de 1o ans risquait de mettre en danger sa vie. Nous tenons à remercier le chef de l’Etat et lui demandons de faire de même pour les autres prisonniers parce que la condition de vie des condamnés dans différentes prisons du pays est précaire », a fait savoir Me Éric Ntibandetse.

C’était après une longue accolade avec sa cliente, la journaliste Floriane Irangabiye de la radio en ligne ’’Igicaniro’’ basée au Rwanda, condamnée à une peine de 10 ans de prison pour ’’atteinte à l’intégrité du territoire national’’ suite à ses émissions critiques envers le régime burundais.

 

 

Forum des lecteurs d'Iwacu

2 réactions
  1. Collectif des Survivants et Victimes du Genocide Hutu de 1972 au Burundi,

    Floriane enfin libre ! Good for You Floriane! Nous souhaitons plein la joie a toute la famille de Floriane Irangabiye ! (…) la prison est un lieu où tu ne souhaiterais que même ton ennemi ait à passer un moment, qu’il soit petit ou long.

    Cela étant dit la libération (souhaitable) de Floriane Irangabiye par la remise de ses peines pose une question sur la disposition de l’esprit du Chef de l’État Évariste Ndayishimiye en matière d’ équité . Cette qualité qui consiste à attribuer à chacun ce qui lui est dû par référence aux principes de la justice naturelle. Autrement dit impartialité .

    52 ans plus tard, quelle justice pour les victimes du génocide au Burundi?
    Est-ce qu’on peut dire aujourd’hui, 52 ans plus tard, que justice a été rendue?
    Il peut y avoir plusieurs raisons de pardonner, mais le pardon appartient à celui qui a souffert et ne doit pas lui être imposé.

    Pour nous, soussignes , membres du Collectif des survivants et victimes du génocide commis contre les Hutus en 1972 , en union avec toutes les autres victimes des crimes contre l’humanité qui ont été perpétrés contre des Burundais de l’ethnie Hutu, de l’ethnie Tutsi (sauf les Bahima) , de l’ethnie Twa, en 1972-1973,

    Nous sommes profondément préoccupés par l’esprit injuste et inéquitable toutes à la fois, attestées dans l’attitude du Chef de l’État Évariste Ndayishimiye , avec l’incapacité de son Gouvernement à faire respecter les lois et traités internationaux relatifs aux Droits de l’homme pour mettre fin à l’impunité pour le crime le plus grave qu’est le génocide au Burundi.

    Crimes de génocide et atrocités que le Président de la République Évariste Ndayishimiye (Glorifié par Floriane Irangabiye et la CNIDH) refuse jusqu’ici de ratifier (pas de signature) plus de 2 ans après sa reconnaissance par les 2 chambres de Représentants.

    En violation des articles I. II. III. IV, V, VI, VII de la Convention des nations Unies pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948.

    Nous, victimes de génocide au Burundi commis par le Gouvernement de la Dynastie des Bahima, sommes profondément contrariés par le fait que le gouvernement actuel n’a pas daigné répondre aux demandes insistantes du Parlement, le représentant du Peuple souverain.

    Profondément déçus par l’attitude injuste et inéquitable du Chef de l’état Evariste Ndayishimye et son Exécutif qui n’ont jamais donné suite à nos nombreuses missives présentant les doléances de plus de six millions de victimes et de rescapés du génocide.

    Plus de 2 ans après, aucune des 7 demandes lui faites solennellement en date du 20 décembre 2021 par les deux chambres de Représentants (Parlement et du Sénat) n’a reçu de réponse positive plus de deux ans après . Il s’agit entre autres des demandes suivantes :

    1) Reconnaitre solennellement par voie législative le génocide commis par le Gouvernement du Burundi de l’époque contre les Bahutu en 1972-73 et en informer le Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies
    2) Octroyer aux survivants la date du 29 avril comme journée nationale de commémoration des victimes
    3) Demander officiellement pardon aux familles de victimes
    4) Retrait sans délai du nom infâme de « Bamenja », traîtres, donnée aux familles Bahutu endeuillée
    5) Promulguer une loi mémorielle déclarant, voire imposant, le point de vue officiel de l’État du Burundi sur les événements historiques qui ont endeuillé nos familles en 1972-73.
    6) Mettre en place un mécanisme de poursuites judiciaires contre les responsables présumés vivant autant au Burundi qu’à l’étranger
    7) Réparations pour les victimes du génocide hutu de 1972, qui doivent inclure les excuses publiques des gouvernements, ont des sites du patrimoine national tels que la construction d’une exposition permanente montrant des photos, des documents et d’autres expositions des expériences des survivants.

    Toutes ces omissions et inactions tant du Président de la République Evariste Ndayishimiye que de son gouvernement actuel, et des précédents, à l’égard des survivants et victimes du génocide de 1972 équivalent en elles-mêmes à des actes de génocide depuis sa reconnaissance par le Parlement le 20 décembre 2021 qui engage la responsabilité de l’État du Burundi en vertu du droit international.

    • Gacece

      @Iwacu
      Ce commentaire n’aurait pas dû être publié sous cette article pour diverses raisons :

      – Depuis quand permettez-vous à des associations (ou collectifs) d’émettre des commentaires en tant qu’individus? S’il veulent une tribune, vous pouvez publier leur commentaire comme article ;

      – Il est vrai que c’est un individu qui a écrit ce commentaire, mais il l’a fait au nom d’une association en apparence légale et dans ce cas, le site Iwacu aurait eu à vérifier si tous les membres (si connus) étaient d’accord avec le contenu du commentaire (mot par mot, phrase par phrase), jusqu’à l’identification de l’auteur comme faisant partie des représentants autorisés.

      – Si vous connaissiez déjà le représentant légal du collectif, l’anonymat ne devrait pas être autorisé dans ce cas-ci. Parce que n’importe qui pourrait avoir écrit ce commentaire (y compris ceux qui n’en sont pas membres). L’identification de l’auteur permettrait aussi aux autres membres du collectif de se distancier de ce qu’il a écrit s’il y a lieu, en privé ou publiquement.

      – À part le premier paragraphe qui est à mon avis une introduction à la fois maladroite et malhabile, tout le contenu du commentaire est hors sujet.

      C’est mon opinion. Vous avez vos règles et vos directives pour la modération.

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