«Avec la nouvelle Constitution, le retour à Arusha pour les pourparlers inter-burundais est dépassé». Des propos du porte-parole du ministère de l’Intérieur tenus ce mardi 14 août au cours d’une synergie des médias axée sur la Feuille de route de Kayanza décriée par l’opposition.
Cette déclaration du représentant du gouvernement suscitera une levée de boucliers. Autour de la table, le porte-parole du parti Sahwanya-Frodebu, Phénias Nigaba proteste avec énergie, le président du parti Uprona, Abel Gashatsi tente d’équilibrer les forces mais le délégué de la Coalition Amizero y’Abarundi, Tatien Sibomana fait appel à son franc-parler.
Térence Ntahiraja persiste et le répète à qui veut l’entendre : «Le dialogue inter-burundais externe appartient au passé ». C’est au moment où des émissaires du facilitateur dans le dialogue inter-burundais d’Arusha sont attendus à Bujumbura ce vendredi.
Le porte-parole du ministère de l’Intérieur le confirme et il tient à être clair : «Ce n’est pas à nous d’aller à Arusha mais c’est plutôt au facilitateur de venir à Bujumbura».
Pour Térence Ntahiraja, ceci permettra de parachever ces pourparlers inter-burundais, vider les questions de divergence afin de cheminer avec quiétude vers les élections de 2020. C’est comme la mise sur pied d’un cadre légal des élections avec notamment une nouvelle Ceni élargie à 7 commissaires, la mise en place d’un environnement propice comme le retour au bercail des hommes politiques en exil. «Non pas les 34 poursuivis par la justice burundaise. Ils peuvent se rendre ou demander pardon pour leurs manquements».
L’envoyé de la Coalition Amizero y’Abarundi ne l’entend pas de cette oreille. Pour Tatien Sibomana, un atelier convoqué par le ministre de l’Intérieur, avec son manque de neutralité connu, ne peut pas être comparé aux pourparlers sous la houlette d’un facilitateur neutre. «C’est pourquoi Arusha reste la voie privilégiée pour le règlement de la crise burundaise».
D’après lui, la gestion et la conduite des élections de 2020 seront d’une importance capitale et déterminantes pour la paix et la stabilité dans notre pays. «Si la classe politique mène à bon port ce processus, c’est le salut pour tout un peuple mais si au contraire, elle négocie mal ce tournant décisif, c’est la catastrophe, l’enlisement de la crise. Il ne fait pas se cramponner sur 2020, la date peut être reportée».
Au cours de ce débat, la question des signatures sur la Feuille de route de Kayanza suscite des passions et soulève un tollé. «Ce document obtenu à l’issue d’un atelier piloté par le ministre de l’Intérieur ne porte pas, à vrai dire, des signatures mais des paraphes», a déploré Tatien Sibomana, de la Coalition Amizero y’Abarundi.
Et ce n’est pas tout comme reproche : «L’annexe collé à cette Feuille de route de Kayanza, sans valeur juridique réelle est une liste des participants et non des signataires, il y a même des participants qui ont signé deux fois comme la représentante du parti PL, Mme Marguerite Rukohoza».
Le porte-parole du ministre de l’Intérieur, réplique, il ne se laisse pas faire, encore moins intimider par ces critiques : «Paraphe ou pas, signature ou pas, cette Feuille de route vous engage. A part le Ranac et le Frodebu, plus de 20 partis ont approuvé le contenu de ce document important pour une meilleure préparation des élections de 2020. Deux signatures de moins ne peuvent pas hypothéquer l’avenir de tout un peuple».
Les débats sur cette Feuille de route de Kayanza ne seront pas terminés, loin de là. Tout le monde restera campé sur sa position. Les discussions continueront après l’émission. Leurs voix se font entendre mêlées au jingle annonçant la fin de l’émission. Ils poursuivront leurs discussions, tous mus par un profond désir d’avoir le dessus, dans une ultime tentative de convaincre l’autre.
Au sortir du studio, dans le corridor et même avant de s’engouffrer dans leurs véhicules, sous bonne escorte, ces hommes politiques continueront à échanger, sous l’œil attentif de leurs gardes et des journalistes accourus pour suivre en direct et de visu ce débat qui n’a pas dit son dernier mot.