Les bureaux de change peuvent travailler de nouveau. Les transferts des devises autorisés. Les mesures décidées le 7 octobre par la BRB ont été accueillies avec soulagement. La situation économique était devenue intenable. Mais pour que ces mesures aient les effets escomptés, la BRB, doit mettre rapidement en place une série de mesures permettant de réduire l’écart entre le taux de change de la BRB et celui du marché noir.
Par Hervé Mugisha, Fabrice Manirakiza, Alphonse Yikeze et Egide Harerimana.
Au lendemain de l’annonce du nouveau gouverneur de la banque centrale qui annonçait que dorénavant les personnes qui reçoivent l’argent de l’étranger par transfert instantané peuvent le retirer en devises, plusieurs personnes ont investi les banques pour vérifier si réellement, l’information était vraie. Elles font quelques petits retraits en devises pour en avoir le cœur net.
Le lundi 10 octobre, parmi les clients présents dans le petit hall de la KCB sise au Boulevard de l’Uprona, beaucoup dépassent la cinquantaine. « Sûrement des jeunes retraités qui viennent retirer l’argent transféré par leurs enfants », murmure un des agents de sécurité dehors. Une information qui ne tarde pas à se confirmer quand un des clients ressort 20 minutes après avec un grand sourire. « C’est vrai, c’est redevenu fonctionnel », me confie-t-il aux anges.
Ancien officier des FDN (Force de Défense Nationale) il me fait savoir qu’avant la levée de cette mesure, pour éviter le manque à gagner, son fils au Canada, préférait faire transiter l’argent via la RDC. « Avec la levée de cette mesure, j’espère que je n’aurai plus à galérer lorsque je désire m’acheter un kilo de sucre ». Même satisfaction pour Anne rencontrée à l’Interbank Burundi. Avec la reprise des transferts instantanés via Western Union, elle espère relancer son business de vente de friperies au point mort suite au manque de disponibilité des devises. « Certes, je ne peux pas dire que j’aurai tout le montant nécessaire en même temps. Mais, au moins, je suis sûre que je ne vivrai plus des ruptures de stock parce que je n’arrive pas à m’approvisionner faute de 1000 ou 2000 dollars américains ».
Les banques telles que l’Interbank Burundi, KCB Bank ont directement repris les retraits instantanés. A la BGF, jusque mercredi 12 octobre, la mesure n’était pas encore entrée en vigueur. « Juste temps de peaufiner les derniers ajustements. Sous peu, les retraits via Money Gram reprendront », laisse entendre un responsable qui a préféré garder l’anonymat.
Les cambistes restent sceptiques
Après la levée de la mesure, sérénité totale chez les cambistes. Désormais, plus de raison de se cacher, de rester en retrait derrière les voitures, en essayant de ne pas se faire coincer par la police au moment de leurs transactions.
Toutefois, l’heure n’est pas à la jubilation. Certains d’entre eux restent encore sceptiques quant aux conditionnalités de la mise en application effective de ladite mesure. « Sûrement que les chasses à l’homme des policiers vont s’arrêter et que dorénavant, en plus de la fluidité des transactions, des particuliers voudront rapatrier leur argent. Mais, pour une libéralisation effective du secteur, la BRB doit faire davantage afin que nous ne soyons pas coupés dans notre élan », glisse John (prénom d’emprunt), propriétaire d’un bureau de change.
Sa principale crainte concerne les documents exigés pour le réenregistrement. Pour lui, ils devraient être rendus publics. « Si l’objectif est de libéraliser davantage le secteur, autant que la transparence soit de mise », laisse-t-il entendre.
Si tel n’est pas le cas, il redoute des « magouilles » dans l’octroi des autorisations. Selon certaines indiscrétions, il y a des demandes qui n’ont jamais été étudiées et dorment dans les tiroirs de la BRB avant l’entrée en vigueur de cette mesure portant retrait d’agrément des bureaux de change ne soit prise. Ce cambiste demande que soit respecté l’ordre de dépôt des dossiers. Conscient des implications de la levée de cette mesure une forte imposition en l’occurrence, il réclame: « une règlementation bien claire ».
Le taux de change chute sur le marché noir
Sur le marché noir, 24 heures après l’annonce de la levée de la mesure, le taux de change du dollar avait déjà commencé à chuter. Au grand dam de tous ceux qui détiennent le billet vert. Selon un cambiste rencontré à l’avenue de l’Amitié, les gens en possession des devises cherchent à faire le change de peur que la courbe tende vers le taux officiel : « Depuis ce samedi, nous recevons beaucoup de clients. Apparemment, il y avait beaucoup de devises dans le pays ».
Dans la matinée de lundi 10 octobre, date initialement prévue pour le début de l’enregistrement des bureaux de change, le nombre des gens désireux de changer leur devise allait crescendo. Une déception pour certains. « J’ai entendu que le taux chute rapidement avec la mesure de la BRB. J’aimerais faire le change avant que l’on ne retourne au taux officiel. Mais c’est déjà trop tard, je vais enregistrer des pertes », se lamente une femme rencontrée sur place.
Malgré l’enthousiasme de la levée de cette mesure, tous les cambistes s’interrogent si réellement les devises pourront de nouveau être disponibles. « C’est vrai qu’avec l’entrée en vigueur de ladite mesure, la traçabilité de la monnaie sera de mise. Plus que tout, les devises qui circulaient en dehors des circuits normaux pourront être réinjectées dans les circuits officiels. Quid de ce qui est en train d’être fait pour regagner le cœur des investisseurs étrangers ? », s’interrogent-ils. Pour eux, un seul préalable s’impose : « Le gouvernement a intérêt à assainir les conditions sécuritaires. Ainsi, permettre que le Burundi redevienne une destination privilégiée pour les investisseurs étrangers ».
La BRB s’explique
A la question de savoir si la mesure en rapport avec les retraits instantanés des devises, concerne également les ONG, Bellarmin Bacinoni, son porte-parole, est catégorique : « C’est le statu quo! ». Et de rappeler : « Les procédures sont connues, elles continuent de s’appliquer telles qu’elles sont. Rien ne change, les ONG continueront à retirer en monnaie locale le montant équivalent aux devises en leur possession. Ce, en fonction du taux officiel du jour de la BRB ». Néanmoins, il nuance : « Bien sûr, lorsque ces dernières désirent passer des commandes des équipements à l’étranger (achat des intrants, etc.), après avoir présenté les pièces attestant l’objet de la demande, elles peuvent utiliser leurs devises se trouvant sur leurs comptes à la BRB. » Par rapport à l’impact que la levée de ladite mesure sur l’économie nationale, M. Bacinoni indique : «L’étude y relative est en cours de finalisation. Sous peu, elle sera présentée publiquement ». A la doléance des propriétaires des bureaux de change désireux que les conditions d’enregistrement soient rendues publiques, le porte-parole de la banque centrale, tempère : « C’est en cours d’actualisation, d’ici lundi prochain, elles seront rendues publiques ».
Réaction
Gabriel Rufyiri : « Cette mesure seule ne va pas juguler la pénurie des devises!»
D’après le président de l’Olucome, Gabriel Rufyiri, cette mesure va avoir beaucoup d’impacts sur l’économie nationale voire sur la sécurité du pays. « La première conséquence positive est que les employés qui travaillaient dans ce secteur vont regagner leurs bureaux. Ensuite, le pays va bénéficier des impôts et taxes et même des impôts locatifs pour les maisons louées. »Les cambistes qui œuvraient dans l’ombre vont pouvoir travailler sur la place publique et leur sécurité sera garantie. « Vous savez qu’il y a des cambistes qui ont été assassinés et retrouvés dans des caniveaux. On ne sait pas le mobile de leur assassinat, mais on peut soupçonner que c’était lié à leur métier. »
Le président de l’Olucome estime qu’avec la levée du retrait d’agrément des bureaux de change, la Banque centrale va enregistrer une augmentation de devises. « Ce qui est important, il y aura une traçabilité de la monnaie étrangère, car elle sera contrôlable. Les bureaux de change vont donner des rapports au niveau de la BRB. » Mieux, les Burundais vivant à l’étranger vont subvenir facilement aux besoins de leurs familles qui se trouvent au Burundi.
Quid des ONG internationales et locales ?
D’après Gabriel Rufyiri, le communiqué du nouveau gouverneur de la BRB n’est pas clair en ce qui concerne les organisations non gouvernementales (ONG) internationales ou locales. « Il faut que la BRB éclaire l’opinion si les ONG peuvent ouvrir des comptes dans les banques commerciales. Nous avons besoin de cette précision, car cette mesure condamne les ONG qui sont utiles pour le pays. Il est urgent que cette mesure soit levée pour les ONG internationales et locales. »
Toutefois, le président de l’Olucome fait savoir que pour que les devises soient vraiment abondantes, il y a plusieurs mesures financières et économiques qui doivent être prises. « Ce n’est pas seulement cette mesure qui va juguler la pénurie des devises. Loin de là ! Le gouvernement doit d’abord assainir en premier lieu l’environnement des affaires. » Selon lui, il faut que les critères de « Doing business » soient respectés, notamment la lutte contre la corruption, les questions liées à la fiscalité, l’accès à la justice, l’accès aux services publics par des investisseurs étrangers …
Quant à l’autre source de devises, M. Rufyiri cite la coopération au développement. « Cette dernière comporte des exigences à savoir le respect des principes de bonne gouvernance et de la transparence en matière budgétaire. » Pour lui, il faut alors des experts capables d’élaborer des projets et de les gérer. Il propose également de booster les exportations de certains produits comme le café, le thé, le coton, les minerais … Et d’ajouter que le tourisme et la diaspora peuvent générer aussi des devises.
« A l’avenir, nous demandons à ce que toutes les mesures qui sont prises soient étudiées par des experts, car nous voyons que ces sont des mesures qui ont été prises sans aucune analyse de leur impact. »
Eclairage
Jean Prosper Niyoboke : « Le recours massif au marché noir par les acteurs financiers va diminuer.»
Pour que la levée de ces mesures ait l’effet escompté, cet économiste souligne que la banque centrale doit arrêter une série de mesures d’accompagnement permettant à ce que tous les acteurs du secteur sortent de l’informalité.
Votre commentaire par rapport à la décision de la BRB ?
Pour apprécier, il faut chaque fois une comparaison. D’abord pourquoi la décision avait-elle été prise et pourquoi une telle levée aujourd’hui ? La décision avait été prise dans une certaine conjoncture socio-économique liée au manque de devises. L’Etat procède par la mise en place d’instruments qui permettent une gestion centrée sur le rôle du marché de change qui est assuré par la Banque centrale.
Laquelle banque devait aussi surveiller tout en régulant les transactions de ces devises via des canaux situés au niveau des banques, notamment les banques commerciales. Le stock de réserves de devises disponible permettait de financer les projets prioritaires ou en tout cas considérés comme indispensables. C’étaient des mécanismes de résilience compte tenu de cette situation de manque de devises.
Concrètement ?
Comme le Gouvernement s’est engagé à payer, il serait peu raisonnable de ne pas libéraliser le marché de change. Là je soulignerai que plusieurs acteurs, notamment les entrepreneurs, ont besoin d’intrants des facteurs qui proviennent de l’extérieur. Et pour accéder à cela, il faut des devises. D’autres partenaires de la sous-région, voire internationaux, qui avaient des chantiers de projets, étaient bloqués par la récente situation. D’autant que le taux de change à la BRB ne correspondait pas au taux de change réel sur terrain.
A la fin, cette ouverture va avoir un impact sur les personnes morales (les entreprises), les ménages, les investisseurs ainsi que tous les acteurs financiers qui interviennent dans le marché de changes.
Que peut-on espérer de mieux avec cette levée ?
On va assister à l’accès d’un certain nombre de produits d’importation qui étaient devenus rares à cause du manque de devises. Parallèlement, le recours massif au marché noir par les acteurs financiers va diminuer. Cependant, il faut que ces acteurs qui interviennent dans le marché de changes soient professionnels, en d’autres mots, il faut qu’il y ait une éducation liée à l’activité des bureaux de change.
Entre autres ?
Il faut mettre fin à l’informelle, il faut qu’il y ait une cartographie des acteurs de ce secteur, qu’ils aient une licence. En gros, cela permettrait une meilleure régulation de ce marché de changes.
On espère un rapatriement des devises…
On n’espère pas, ça ira de soi. Je peux vous dire qu’il y a beaucoup de Burundais qui préféraient que leurs devises soient abritées dans des banques de la sous-région. Avec cette ouverture, ils vont sûrement les rapatrier. Et s’il y a une reprise des aides au développement, que ce soit dans le domaine des infrastructures ou du développement durable, il faut s’attendre à ce qu’il y ait des investisseurs qui suivent espérant faire affaire.
Le marché de change désormais ouvert, les acteurs vont-ils pour autant disponibiliser les devises ?
Je peux vous dire que les acteurs sociaux et les acteurs de développement ont été beaucoup impactés par la crise des devises. Et cela parce qu’ils devaient se référer constamment au taux fixé par la BRB qui ne reflétait pas la réalité. Cet écart entre le taux de la BRB et le taux réel avait notamment de l’impact sur la formulation des projets, cela les comptables le savent très bien.
Quid des ONG qui n’ont toujours pas la capacité de retirer leurs fonds en devises ?
C’est très limitatif. Il y a des ONG qui utilisent des intrants locaux, pour ça, il n’y a pas de problèmes. Mais pour celles qui utilisent les intrants qui proviennent de l’extérieur et il se pourrait que le gouvernement soit à la recherche de ces intrants, il faut qu’il y ait aussi pour cela un contrat entre le gouvernement et ces ONG pour que le Gouvernement puisse disponibiliser ces intrants. Ce sont des décisions qui permettent au gouvernement de faire une mobilisation interne des devises.
Mais en général, ce sont les personnes morales qui avaient été beaucoup frappées par la précédente mesure. Certaines s’étaient même vu mettre la clef sous le paillasson. La récente décision va certainement jouer en leur faveur et faire à ce qu’il y ait une rentrée des devises générée par l’activité de ces acteurs.
1. Vous écrivez:« Avec la levée de cette mesure, j’espère que je n’aurai plus à galérer lorsque je désire m’acheter un kilo de sucre ».
2.Mon commentaire
a). Ubu birazwi cane ko abagabo b’abarundi benshi basesagura ubutunzi bw’umuryango babujana mu birabo kunywa za Primus na Amstel no kurya za brochettes (kandi mu rugo abagore n’abana bagowe).
b). Mugihe iyo ntwazangabo yakukurutse itoba isesagura utwo ironka/canke yaronse kera VYOBA BIBABAJE CANE kumva ko ubu bimugora cane kugira ashobore kugura n’imiburiburi ikiro c’isukari ihingurirwa aho mu Burundi nyene.
Je commences à comprendre certaines chose , l histoire des putshistes comme explication de la fermeture des frontières avec le Rwanda c est la poudre aux yeux , la vrai raison c était d empêcher certaines personnes de venir le week end retire / ou verser leurs billets verts en securité au Rwanda
Et la justice est restée et reste muette pour ces deux cités.
Tiens, tiens nous ne savons même pas ceux qui ont lâchement assassiné les séminaristes de Buta.
Mesure salutaire qui va booster les entrees de devises. Au Kenya le premier secteur generateur de devises c’est la diaspora. Ils rapatrient 3 milliards $ par an plus que le the, le cafe, les fleurs et le tourisme reunis. Meme chose pour l’Erythree qui n’a rien a exporter sauf la diaspora qui rapatrie des devises par miliards ce qui permet au regime de guerroyer a gauche a droite. Sans parler du Senegal, Mali, etc.
P/S
A l’occasion de cette mesure, une pensee emue pour le cambiste assassine Kirahwata. Emporte dans cette crise des devises. Un homme exceptionnel qui avait tant a donner au pays. Tout comme Oscar Ntasano, un autre homme de bien emporte par le mal burundais.
@Bellum
N’aho diaspora itoba ariyo yubatse inyubakwa nziza n’amabarabara meza yo muri Dakar, umurwa mukuru wa Senegal, ivyo bikorwa ndemezo n’isuku ryaho video imwe yerekana VYARANTANGAJE CANE.
Kera muri geographie muri secondaire twize ko ubutunzi bwa Senegal bwari bushinje kuri culture de l’arachide.
https://www.youtube.com/watch?v=0jGBtS8PT4s
Lero ndizeye ko n’i Burundi twotera imbere muri infrastructure n’ibindi bisata vy’ubutunzi mugihe twogira/dufise bufise amahoro hamwe n’indongozi zikunda igihugu (=patriotisme), zifise vision nziza kandi zishoboye ibikorwa (=méritocratie).