Rareté, hausse des prix, lamentation, …, les produits Brarudi font polémiques depuis un certain temps. Les lamentations fusent de partout. Les pertes sont énormes que ce soit du côté des vendeurs, des propriétaires des mini-dépôts ou des consommateurs. Qui profitent de cette situation ? Surtout que certains chiffres montrent que la production n’a pas diminué. Et les témoignages des Congolais en disent long. Que faire pour s’en sortir ?
« Où est-ce que je peux trouver de l’Amstel beer quel que soit le prix ? » « Où est-ce que je peux trouver un Fanta pour ma mère alitée à l’hôpital ? » « Je n’ai plus de choix. Si je trouve de l’Amstel, de la Primus, du bock, je prends. Il faut s’habituer à tout, avoir un ventre non sélectif. Amazi yose azimya umuriro (tout eau éteint le feu) », … C’est ce genre d’échanges qui domine ces derniers temps dans les plateformes, groupes WhatsApp. La cause : la pénurie des produits Brarudi qui est devenue chronique.
Aujourd’hui, avoir une bouteille d’Amstel beer au prix officiel est devenu un rêve dans beaucoup de coins de Bujumbura. Pour les consommateurs, le problème de prix ne se pose plus. « Le plus important, c’est d’en trouver », confie Désiré Ciza, un amateur de l’Amstel beer. Cet homme de Nyakabiga signale que le 1er janvier 2025, il a acheté cette bière à 10 000BIF la bouteille. Et ce, après avoir parcouru plusieurs quartiers et bars à sa recherche. « C’est vraiment terrible. Je n’avais que 20 000BIF dans ma poche après avoir acheté de la nourriture à ma famille. Dans les conditions normales, avec cette somme, je pouvais avoir trois bouteilles et une brochette. », fait-il observer.
Le prénommé Edgard, un jeune de Rohero, lui est amateur de la Primus. Il trouve que la situation est grave. « Vous voulez que je vous dise quoi ? On est dépassé. On ne sait plus ce qui se passe. Allez demander à la Brarudi ou au gouvernement. Ils sont responsables de ce chaos », lâche-t-il en colère. Après quelques minutes de silence, il signale que dans son quartier, il peut passer quatre jours, voire une semaine sans trouver une seule bouteille de sa bière préférée. « Je me demande comment les propriétaires de bars et de mini-dépôts parviennent à payer les loyers ainsi que la taxe municipale sans travailler ? », s’interroge-t-il.
Une question qui taraude aussi l’esprit de ces derniers. S’exprimant sous anonymat, un gérant d’un bar à Rohero indique que les pertes sont déjà énormes. « Je ne peux pas dire combien mais sachez que nous sommes au bord de la faillite. En plus du loyer, nous avons une dizaine d’employés à payer. L’impôt de l’OBR aussi. Or, nous pouvons passer deux, trois, quatre jours sans aucune bouteille de bière. C’est grave. », témoigne-t-il.
Ce qui les pousse à hausser les prix pour essayer de combler le vide. « Mettez-vous à notre place. On n’a pas de choix. Quand on parvient à avoir quelques caisses des produits Brarudi, on est obligé de chercher les moyens de nous rattraper même si ce n’est pas possible. »
Les mini-dépôts presqu’écartés de la chaîne de distribution
Sans donner plus de détails, il signale que pour ne pas fermer son bar, il accepte les exigences des délégués de la Brarudi en payant une certaine somme d’argent comme pot-de-vin. Même si la situation des bars n’est pas bonne, cet homme avoue que les propriétaires des mini-dépôts souffrent plus qu’eux. « D’habitude, ce sont les mini-dépôts qui étaient chargés de nous servir. Mais, aujourd’hui, certains délégués servent directement les bars. Donc, les mini-dépôts n’ont plus de travail même si certains d’entre eux ne sont pas loin de ce chaos.»
Ici, cet homme fait allusion aux mini-dépôts appartenant aux proches, parentés des délégués de la Brarudi ou des propriétaires des Méga SSD. Il signale que certains propriétaires des Méga SSD ont aussi des mini-dépôts mais qui ne sont pas enregistrés sur leurs noms. « Pour eux, c’est le moment de faire des bénéfices. », souligne-t-il.
Interrogé, un propriétaire d’un mini-dépôt n’en revient pas. « Nous n’avons plus de travail. Nous sommes en chômage forcé. Parce que nous pouvons passer plus d’une semaine sans travailler. Du 1er au 8 janvier, nous n’avons été servis qu’une seule fois. Imaginez-vous les conséquences. » Dans les conditions normales, il confie qu’il pouvait avoir plus d’1 million BIF de bénéfice par mois. Mais, actuellement, il ne s’attend même pas à 500 mille BIF. Or, il doit payer ses deux employés, le loyer et la taxe municipale.
Les bouchers ne sont pas épargnés
Cet état de fait n’épargne pas les bouchers. Le prénommé Bosco vivait de ce métier depuis 20 ans. « Aujourd’hui, notre situation est critique. Nous ne pouvons pas bien travailler sans les produits Brarudi. Vous savez aussi que la viande est périssable. Donc, c’est facile de passer une semaine sans travailler. » Il signale que les pertes sont incommensurables.
Avec des chiffres, il indique que dans les conditions normales, il lui était facile d’avoir plus d’un million de BIF de bénéfice. « Aujourd’hui, tout est l’arrêt si je pourrais dire ainsi. Oui, on peut exiger que pour avoir une bouteille de bière, il faut faire une commande d’une brochette. Ce qui est injuste. Nous ne pouvons pas continuer à forcer les gens à consommer de la viande sans qu’ils le désirent. »
Il ajoute que cette astuce fonctionne aussi quand il y a de la bière. Ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. « Le cabaretier peut passer trois ou quatre jours sans aucune bouteille. Là, nos viandes en stock pourrissent », déplore-t-il.
Le nord de Bujumbura vît le même calvaire
Dans la zone urbaine de Cibitoke de la commune urbaine de Ntahangwa, avoir une bière est réservé aux plus rusés. La distribution est plus que floue. Le grand distributeur des produits Brarudi est situé devant les bureaux de la zone à l’ancienne permanence du parti Uprona.
Des chariots remplis de casiers et des vélos sur lesquels on voit des casiers soigneusement rangés font la queue. Ils attendent tous le début de la distribution pour ravitailler les dépôts dans les quartiers.
Ces derniers ont déjà des listes des vendeurs qui ont pris soin de se faire inscrire et de payer à l’avance. Tout est conditionné et on ne se choisit pas la quantité ni les sortes de produits. Chacun a droit à un nombre bien limité.
Le prénommé Félix, qui a un petit cabaret, ne mâche pas ses mots pour manifester son mécontentement. « Pour avoir des casiers de bière, on nous impose un casier d’eau gazeuse Vitalo. Je le prends mais, c’est une perte parce que personne ne se pointe dans mon bar pour prendre cette eau. », déplore-t-il.
Il avoue que pour avoir des bières quand il y a eu ravitaillement, il faut que tu entretiennes des relations particulières avec les distributeurs. Et ce ravitaillement se fait en alternance de un ou de deux jours. Selon lui, les livraisons semblent ne jamais suffire. Il a l’impression que les boissons s’évaporent. « Ça fait deux jours que je n’ai pas de bière et les messages de mes clients ne cessent de tomber. Chacun me demande si la bière est disponible, mais je n’y peux rien. » La grande majorité de ses clients se rabattent sur les boissons en plastique.
Il fait savoir que les bières qu’on lui donne sont consommées et épuisées en moins de deux heures et qu’il limite aussi les clients. « Je limite les clients et je limite aussi le nombre de bières que je donne. Je me base aussi sur leur fidélité. Pour un nouveau client, je lui dis tout simplement qu’il n’y en a plus parce que, souvent, mes vrais clients font des réservations à l’avance par téléphone. »
De faux palliatifs
Le prénommé Floribert, un autre cabaretier, a été obligé de changer son bar en boutique. Il dit que la rareté des produits Brarudi a failli lui faire fermer son bar parce qu’il ne parvenait plus à payer le loyer.
Dans sa boutique, on y voit que des boissons en plastique. Des jeunes, assis sur des tabourets, s’en donnent à cœur joie. Ils y passent la quasi-totalité de la journée et une grande partie de la soirée. Certains ont déjà perdu leur équilibre quand il s’agit de se lever pour rentrer. D’autres rentrent dans un état comateux.
Le boutiquier dit que si rien n’est changé, tous les jeunes qui s’adonnent à ses boissons en plastique, faute de produits de la Brarudi, sont en train d’hypothéquer leur santé, voire leur avenir. « Il faut que je gagne ma vie et le commerce est tout ce que je peux faire. Aussi longtemps que ces boissons seront légales, je les vendrais pour ma survie et celle de ma famille. », regrette-t-il.
Des jeunes grouillent autour de sa boutique tels des zombies en fumant et en s’interpellant à tue-tête. Avant la carence, ils étaient ses fidèles clients. Floribert fait savoir qu’ils ne l’ont jamais abandonné mais qu’ils ne sont plus intéressés par les produits Brarudi. Il ajoute que les rares cas où ces produits sont disponibles, certains de ces jeunes les achètent ailleurs et viennent les consommer à partir de chez lui.
« Je m’apprête à vendre les caisses de ces produits Brarudi parce qu’elles ne servent plus à rien, mais des fois je me dis que la situation peut changer d’un moment à l’autre. »
Des pertes aussi chez l’Etat ?
Certaines sources pensent aussi que l’Etat enregistre des pertes. « Il paraît que sur chaque bouteille consommée, il y a de l’argent qui rentre dans les caisses de l’Etat. S’il n’y a presque plus ces produits, cela signifie que l’Etat est affecté aussi », indique un prénommé Innoncent, un jeune universitaire.
Il signale aussi que les bars et les mini-dépôts paient la taxe municipale. « Tout cela rentre dans les caisses de l’Etat. Sans doute que ces entrées vont diminuer », pense-t-il. Un avis qu’il ne partage pas avec le prénommé Bosco, un septuagénaire croisé au centre-ville. « Je ne comprends pas comment l’Etat peut accepter de perdre des taxes et des impôts alors qu’il a un capital dans la Brarudi. Les autorités savent à quoi elles sont en train de jouer. », souligne-t-il en effet.
Sidéré, cet homme dit détenir des informations selon lesquelles la grande production des produits Brarudi est vendue en République démocratique du Congo (RDC). « Pensez-vous que c’est par naïveté que le gouvernement a autorisé cela ? Peut-être que c’est bénéfique pour lui. Entretemps, nous souffrons », déplore-t-il, notant qu’il est illogique d’aller vendre sur le marché externe alors que la demande locale n’est pas satisfaite.
Contacté, Stany Ngendakumana, porte-parole de l’Office burundais des recettes (OBR) reconnaît que la pénurie des produits Brarudi a des répercussions sur les recettes fiscales. Appelé à fournir des données illustratives, il signale que la collecte des chiffres précis pour faire une comparaison sur une certaine période peut prendre suffisamment du temps.
Iwacu a tenté, à plusieurs reprises, à avoir la version de la Brarudi sur cette situation, sans succès.
En RDC, ils coulent à flot
Alors qu’à Bujumbura et à l’intérieur du pays, les produits Brarudi se raréfient, de l’autre côté de la Rusizi, ils sont abondants. « Les produits Brarudi sont devenus presque des produits locaux. Parce qu’à Bukavu, on les trouve dans tous les bars, dans tous les hôtels, etc. Aujourd’hui, il n’y a que des produits Brarudi qui y sont consommés. Ils sont plus appréciés dans presque toutes les communes et les vingt quartiers de la ville de Bukavu. On n’en manque jamais », témoigne Claude Kashonga, un habitant de Bukavu, au Sud-Kivu.
Il précise que toutes les catégories d’Amstel y sont présentes : Amstel beer, Royale, Bock. Il estime que ces produits sont disponibles contrairement aux produits Bralima. « Dans un bar, vous trouverez facilement que sur sept consommateurs, cinq prennent les produits en provenance du Burundi. Même quand tu prends un verre de trop, il n’y a aucun problème de se réveiller à temps pour aller au travail contrairement à la bière locale.
Il ajoute que même les visiteurs qui viennent de Kinshasa préfèrent la bière en provenance du Burundi. Etienne Mulindwa, un autre habitant de Bukavu abonde dans le même sens. « En tout cas, je ne vois pas la carence des produits Brarudi à Bukavu. Partout où on va, 60% des produits consommés sont ceux de la Brarudi. On les trouve à des prix variés selon les endroits mais ils restent abordables », informe-t-il.
Il fait savoir que dans les endroits VIP, une bouteille est vendue à 7 000, 8 000 et 9 000 francs congolais tandis que dans les endroits ordinaires c’est entre 5 000 et 6 000 francs congolais. « La quantité est suffisante », avoue-t-il, notant que la bière locale est en peu chère.
De leur côté, les délégués de la Brarudi indiquent qu’il y a eu une diminution de la production. C’était au cours d’une réunion tenue le 13 janvier 2025, à Bujumbura. « Mais, l’entreprise a adopté des stratégies visant à satisfaire ses clients », ont-ils tenté de rassurer sans donner plus de détails.
Plusieurs profiteurs du chaos
Les profiteurs sont de plusieurs ordres dans ce désordre. Au moment où les autres Burundais pleurent, il n’y en a qui profitent de cette anarchie. Le délégué de la Brarudi est notamment pointé du doigt. « Il est corrompu. C’est lui qui vend clandestinement les produits qui étaient destinés à notre zone. Il reçoit des pots-de-vin et il s’est même substitué aux propriétaires des Mega. Quand le camion de la Brarudi approvisionne le Méga de la 10e avenue, après quelques minutes, tu vois des voitures qui viennent de Rohero, du centre-ville, etc. Et, elles repartent bien servies alors que les mini-dépôts et la quasi-totalité des bars de Bwiza ne reçoivent rien. C’est vraiment injuste », se lamente un cabaretier de Bwiza.
D’après lui, ce délégué recevrait un pot de 1 200 000 BIF par semaine de la part de chaque personne venue d’ailleurs.
S’exprimant sous anonymat pour des raisons sécuritaires, Idrissa, un habitant de la même zone pointe du doigt aussi certains administratifs. « Parmi eux, certains ont des bars, des bistrots s’ils ne sont pas des associés. Alors, quand il y a un peu de produits Brarudi, ils font des deals avec les délégués. Ils reçoivent leurs parts et s’en foutent du reste de la population. Je suis sûr que si tous les administratifs étaient impliqués dans la lutte contre la fraude autour des produits Brarudi, il n’y aurait pas beaucoup de lamentations », souligne-t-il.
Il trouve que tous les administratifs devaient prendre l’exemple de l’administration de la commune urbaine de Ntahangwa. « Là, les prix sont respectés. J’ai entendu qu’il y a même un délégué de la Brarudi qui a été arrêté. Pourquoi pas chez nous ? Pourquoi ces administratifs font semblant de ne pas entendre les cris de la population ? Cela sous-entend qu’ils gagnent quelque chose de ce chaos. », soupçonne-t-il.
Certains propriétaires des Méga, des mini-dépôts et des bars sont aussi indexés. Plusieurs sources interrogées indiquent en effet que certains responsables des Méga SSD possèdent aussi des bars. « S’ils reçoivent par exemple 500 casiers, ils partagent 150 casiers aux différents mini-dépôts. Le reste, ils l’acheminent dans leurs bars. Ce qui leur fait gagner un double bénéfice : ils vont recevoir les commissions de la Brarudi et l’intérêt sur chaque bouteille. C’est franchement injuste. »
Des tricheries se font aussi observer dans les bars en cachant les produits et en procédant à la hausse des prix, dénonce cet homme, la quarantaine. Il ajoute que d’autres exigent qu’avant d’avoir une bouteille d’Amstel beer, de Primus, … « tu dois faire une commande d’une brochette ou tu acceptes de boire le Fanta dénommé Vitalo ».
Il fait savoir que le prix d’une bouteille d’Amstel est souvent fixé à 7 000 BIF voire plus. Il se demande où sont les services étatiques pour faire respecter les prix qu’ils ont eux-mêmes fixés. « Sinon, la population est laissée à elle-même. »
Que faire ?
« Le grand problème reste au niveau des délégués de la Brarudi. Ils ont perturbé la chaîne de distribution. Aujourd’hui, les bars sont servis par les Méga SSD alors que ce travail revenait aux mini-dépôts », déplore Vincent Ndayegamiye, président de l’Association des mini-dépôts des produits Brarudi,
Il estime qu’il faut respecter le circuit de distribution qui est le suivant : Brarudi-Méga-Mini dépôt-bar. « Il faut que le travail des délégués de la Brarudi se limite à vérifier si les produits sont bien arrivés aux destinataires. »
Interrogé sur les pots-de-vin dont bénéficieraient certains délégués de la Brarudi selon les témoignages recueillis ici et là, M. Ndayegamiye répond qu’il ne peut pas confirmer cela sans preuves. « Seulement, ce sont eux qui créent ce désordre. Peut-être qu’ils en profitent. »
Il remercie d’ailleurs l’implication de l’administration de la commune urbaine de Ntahangwa dans la lutte contre ce chaos. Cependant, il indique que ces administratifs sont en peu bloqués par le fait que les délégués ne rendent pas quotidiennement les quantités servies. Il indexe également certains propriétaires des Mega.
Une situation préoccupante aussi chez l’Association burundaise des consommateurs (Abuco). « La pénurie des produits Brarudi est très préoccupante d’autant plus que c’est la grande société de production des boissons dans le pays. Ainsi, elle joue une importance capitale sur le plan économique et social », analyse Pierre Nduwayo, président de l’Abuco.
Sur le plan social, il signale qu’elle emploie une grande main d’œuvre qui fait vivre de nombreuses familles. Sur le plan économique, Pierre Nduwayo indique que la Brarudi paie des impôts et taxes dans les caisses de l’Etat. « La quasi-absence de production implique une baisse de revenus avec de fâcheuses répercussions sur la vie du pays. »
Le président de l’Abuco trouve que tout doit être mis en œuvre pour permettre à la société de continuer l’activité et de contribuer à la vie socio-économique du pays. « Il y a des prix qui ont été fixés par la Brarudi. Et, jusqu’aujourd’hui, elle n’a pas encore dit qu’elle a des problèmes au niveau de la production. Cette entreprise a le quasi-monopole alors que l’Etat a des parts des capitaux dans cette usine. »
D’après lui, il faut que la Brarudi rende publiques la quantité des produits mise sur le marché et leur destination. « Là, tous les acteurs concernés pourront bien analyser la situation et trouver une solution. »
La transparence
Pour sa part, l’organisation Parcem lie cette situation à la gestion opaque des devises. Ainsi, elle plaide pour la transparente. « La Brarudi est une entreprise stratégique vu son importance dans le pays au niveau fiscal et au niveau des produits qu’elle met sur le marché. Elle incarne par excellence la réussite de l’investissement direct étranger. Ces difficultés devraient être évitées à tout prix parce qu’elles compromettent l’image économique du pays », relève Faustin Ndikumana, son directeur national.
Il trouve que la pénurie des devises a toujours été récurrente. Si la Brarudi tente d’exporter, c’est le marché intérieur qui souffre. « Donc, le gouvernement doit mobiliser les devises. Il faut des stratégies pour que la dernière Table ronde accouche des résultats concrets. Booster les exportations et exploiter les mines. Il ne faut pas oublier aussi la coopération parce que le Burundi en a encore besoin. »
Il fait savoir que si un produit est rare, la spéculation ne peut pas être évitée. « Les mesures que le gouvernement a prises au niveau des prix n’arrangent rien. On impose les prix. Mais, la denrée est toujours rare. C’est une situation liée au contexte national. »
M. Ndikumana trouve que si cette stratégie de mobilisation des devises accouche des résultats, on va arrêter avec ces problèmes. « Sinon, nous allons continuer à nous embourber dans ces problèmes. Alors, il faut cette stratégie du gouvernement. »
Problème de devises
De son côté, Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome, ne cache pas aussi ses inquiétudes. « Cette situation dure depuis plusieurs années, sauf que ces derniers jours, nous avons une situation alarmante du fait qu’il y a eu beaucoup de spéculations. Cette situation ne concerne pas seulement la Brarudi. Quand on observe le panorama général, toutes les entreprises publiques qui produisent des produits qui nécessitent des matières premières importées ont des problèmes. Les exemples ne manquent pas : la Sosumo, l’OTB, … La cause principale est le manque criant de devises pour acheter les matières premières.»
Il fait remarquer que cette situation favorise les spéculateurs et les personnes influentes qui ont bénéficié des marchés, mais qui, malheureusement, ne se soucient pas de la loi qu’elles violent comme elles veulent.
Concernant le fait qu’en RDC les produits Brarudi coulent à flot, Gabriel Rufyiri fait savoir que cela concerne aussi le sucre et d’autres produits burundais. « Il faut appliquer le protectionnisme. Il est impensable d’exporter alors que le marché local n’est pas satisfait. Mais on trouve les produits Brarudi en RDC, en Tanzanie et au Rwanda même si les frontières sont fermées. Cela est dû à plusieurs facteurs. »
Il indique que le premier facteur est la corruption et le trafic illicite de ces produits qui s’opèrent au vu et au su de tout le monde. « L’autre facteur est que les monnaies de ces pays ont plus de valeur que la nôtre. On gagne triplement ou quintuplement. De plus, ces pays aiment les produits burundais. Sur ce, il faut bien protéger les frontières. Est-ce que cela va être possible ? Je pense que ça serait difficile », déplore-t-il.
Le président de l’Olucome indique que cette situation de la Brarudi a un impact néfaste sur l’économie du pays. « La Brarudi est la première société qui donne les impôts et taxes au pays. L’impact est le manque de ces derniers. Dans la Brarudi, il y a une part du Burundi et une part des étrangers. Si ces étrangers trouvent qu’ils ne gagnent rien, ils vont rapatrier leurs fonds. Dans ce cas, le Burundi risque grand-chose. Le gouvernement doit vraiment chercher des solutions urgentes pour remédier à cette situation. », estime-t-il.
Selon Gabriel Rufyiri, la présidence de la République commence à s’activer. Mais, il trouve qu’il est extrêmement important que les services techniques commencent à donner des avis techniques et scientifiques sur lesquels l’autorité au plus haut sommet de l’État pourrait s’appuyer pour alimenter le pays en devises.
Comme solutions à court terme, l’Olucome propose aux autorités d’approcher les partenaires bilatéraux et multinationaux pour demander de subventionner la réserve de changes ou contracter un crédit d’au moins 500 millions de dollars. « Cette somme pourrait atténuer cette situation. Cela viendrait des analyses des experts qui vont proposer plusieurs hypothèses et l’autorité publique va décider. »
Pour Gabriel Rufyiri, les citoyens burundais ont droit de savoir ce qui se passe pour qu’ils puissent avoir une lueur d’espoir parce qu’aujourd’hui, après 2 à 3 ans, il serait très difficile de croire toujours que la situation va être résolue au moment où nous avons toujours le message qui n’est pas suivi d’actions concrètes.
« Si ce crédit est disponible, il doit y avoir une autre étape qui concerne la gestion transparente de ces fonds. Imaginez dans un pays où on peut importer par la voie illicite, par l’argent qui ne se trouve pas dans le circuit normal des banques. Les devises utilisées pour 80 % des importations ne viennent pas du circuit officiel. L’économie parallèle est en train d’émerger d’une manière inquiétante. Nous sommes en train d’atteindre une situation de non-retour. C’est la raison pour laquelle toutes les mesures qui s’imposent doivent être prises afin de protéger l’économie nationale. », estime-t-il.
Selon toujours M. Rufyiri, la deuxième solution qui va suivre après ce crédit, est de subventionner les produits stratégiques et indispensables comme les carburants, les médicaments, les semences sélectionnées et les fertilisants. « Il faut alors une transparence dans l’attribution des marchés publics. Il faut publier les dossiers d’appel d’offres et que tout le monde connaisse les gens qui gagnent ces marchés. »
Brarudi SA est une entreprise leader du Burundi forte de deux actionnaires : Heineken International, actionnaire majoritaire avec 60% des parts et l’Etat burundais. Ces deux actionnaires sont représentés dans un Conseil d’Administration de neuf membres qui s’assurent de la pérennité de l’entreprise tout en créant de la valeur pour les actionnaires dans les choix stratégiques de la Direction.Elle participe de façon significative au développement du pays avec 6% du PNB. Elle est la première contributrice au niveau des impôts et taxes.
Brarudi SA, c’est environ 482 collaborateurs et 50 000 emplois indirects, 2 sites de production à Bujumbura et à Gitega. Sa capacité de production est d’environ 152 000 bouteilles par heure avec 4 lignes d’embouteillages à Bujumbura et une ligne à Gitega.
Ce sont également plusieurs marques produites localement : Primus, Amstel, Nyongera, Coca-Cola, Fanta et Schweppes. Ces produits sont acheminés jusqu’au consommateur grâce à un réseau de distribution étendu avec plus de 70 dépôts.
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