La tentative d’enlèvement du journaliste Pascal Ntakirutimana mardi soir a été une véritable douche froide pour toute l’équipe d’Iwacu. Alors que le journal célèbre ce mois de juin ses 16 ans d’existence, ce rapt raté rappelle tristement un événement douloureux : en juillet 2016, un autre enlèvement nous a ravi pour toujours notre collègue Jean Bigirimana.
Mais qui est Pascal Ntakirutimana ? C’est un pacifique et brillant jeune journaliste, titulaire d’une maîtrise en science politique. Pourquoi s’en prendre à lui ? J’ai épluché tous les articles qu’il a rédigés et je n’ai trouvé aucun écrit déséquilibré ou diffamatoire. Est-ce la dernière interview qu’il a menée avec le Professeur Julien Nimubona ? Dans cet entretien, le politologue, connu pour son franc-parler, critiquait la mauvaise gouvernance du parti au pouvoir, mais de manière argumentée et scientifique. Une interview, aussi critique soit-elle, constitue-t-elle un délit de presse ? Par ailleurs, on nous avait annoncé en grande pompe la « dépénalisation des délits de presse ».
Je vois déjà les soutiens du pouvoir et autres trolls clamer que les journalistes sont des citoyens comme les autres et ne sont pas intouchables. C’est vrai : nous sommes soumis à la loi comme tout le monde. Mais la justice s’exerce-t-elle par des enlèvements nocturnes et des méthodes de gangsters ? Si les autorités ont des reproches à faire à notre collègue, il existe des voies légales à emprunter. Iwacu n’est pas un média clandestin : il a une direction, une adresse. Le Conseil National de la Communication, autorité de régulation des médias, doit se prononcer et dénoncer cette tentative d’enlèvement.
Cette affaire est grave. Soit il s’agit d’une action isolée de quelques policiers agissant de leur propre chef, ce qui confirmerait qu’il y a au Burundi une « violence décentralisée », pour citer un collègue. La notion de « violence décentralisée », d’après les spécialites, fait référence à des actes de violence qui ne sont pas centralement orchestrés ou ordonnés par une autorité centrale claire, mais qui sont plutôt commis par des individus ou des groupes agissant de leur propre initiative.Ce serait grave car cela signifierait que n’importe qui au Burundi, journaliste ou non, peut être enlevé.
Soit c’est une action planifiée et exécutée par une autorité de sécurité, ce qui serait encore plus gravissime. Dans tous les cas, Iwacu prend à témoin les Burundais et le monde : les autorités sont responsables de ce qui peut arriver à Pascal Ntakirutimana ou à ses collègues.
Tout cela est vraiment affligeant. Comme s’il existait au Burundi des forces pour torpiller les quelques avancées vers l’apaisement et l’Etat de droit que nous souhaitons tous. Ainsi, selon le classement mondial de la liberté de la presse 2023 de Reporters Sans Frontières (RSF), l’organisation dont je suis membre, le Burundi avait globalement réalisé quelques progrès par rapport aux années précédentes. D’après ce classement, le Burundi est passé de la 134e place mondiale en 2022 à la 114e place en 2023, gagnant 20 places.
À la veille des élections, cette tentative d’enlèvement d’un journaliste envoie un terrible présage et un funeste message. Comme si, au fond, rien n’avait vraiment changé dans le traitement de la presse indépendante au Burundi. C’est aussi un terrible message envoyé aux jeunes journalistes, confortant l’idée que le journalisme est un métier dangereux au Burundi. Ce climat explique la désaffection de nombreux journalistes envers le véritable journalisme indépendant et critique. De nombreux collègues, par crainte de représailles, abandonnent ce type de journalisme pour se tourner vers une pratique qui se rapproche davantage de la communication ou de l’‘entertainment’ comme disent les Anglais. Cette tendance compromet la mission essentielle des médias de fournir une information libre et impartiale.
Je pense beaucoup à Pascal Ntakirutimana, à qui je transmets toute ma sympathie et mes vœux de courage. Je lui souhaite, ainsi qu’à tous les collègues, de continuer courageusement le métier que nous avons choisi et que nous aimons. Force à toi, Pascal. Restons ensemble, debout !
Diplômé de l’ ESJ (Ecole Supérieure de Journalisme) de Paris et Lille, Antoine Kaburahe a fondé le Groupe de Presse Iwacu. Il est aussi écrivain et éditeur www.iwacu.site.
En 2015, faussement accusé d’être impliqué dans le coup d’Etat au Burundi, comme de nombreux responsables de médias, il est contraint à l’exil. Analyste reconnu, défenseur de la liberté de la presse (membre de Reporters Sans Frontières) ; il poursuit une carrière internationale .
Contact: [email protected]
Je viens de poster une conversation que j’ai eu avec Mr Gacece concernant le génie de ces gens de la CNDD-FDD
Mr Gacece comme vous le constatez, je ne vais m’arrêter. Avant de vous dire ce que je pense, j’aimerai vous donner l’opportunité de donner votre point de vue concernant l’évolution de la situation médiatique au Burundi. Vous devriez avoir plus d’info de puis notre dernier echange.
Merci.
Jean Pierre Hakizimana
Mr Gacece,
Vos questions auront été répondues avant qu’il soit trop tard si le Burundi avait une presse libre. Regardez les cas des pauvres qui périssent dans les prisons de SNR et Pénitentiaires qu’ont ils fait. Et ceux qui sont morts juste ! Imaginez ce qui serait arrivé à un journaliste d’investigation qui aurait pointé au 5eme villas?
Si vous avez la chance de passer par Bruxelles, observez le nombre de journalistes Burundais qui y sont. C’est incroyable! Qui pensez vous les y envoyés?
Ce qui se passe au Burundi est « classic text book d’un systeme pourri ». De la tête jusqu’en bas!
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Gacece
@Jean Pierre Hakizimana
Une presse, même libre, ne voit pas tout… mais surtout, ne regarde pas tout. Et tout le monde sait qu’on ne peut voir que ce qu’on regarde scrupuleusement.
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Jean Pierre Hakizimana
Certainement qu’elle ne voit pas tout mais elle peut oser poser de bonnes questions auxquelles les autorités seraient obligées de méditer dessus/débattes, etc, etc,,,,, vous voyez ou cela mèneraient. Peut être changer la mentalité et culture Burundaise. Bayesian theory!
Le Burundi est un pays ou l’information n’existe presque pas dans une période d’abondance d’offre et consommation d’information! Et ceci n’est pas un accident. La nouvelle loi de la presse!
La réalité est que quiconque qui a osé poser une question à été traité comme un enemi(e) de la nation donc obligé de partir en exile pour sauver sa peau sinon c’est la torture, prison, etc, etc, Mr le president le sait bien car il a travaillé avec/pour lui: Ce mr était un tyran dommage que l’on le remet pas au tribunal International pour crime contre l’humanité. Mais je soupçonne que ceci produirait une avalanche politique car les projecteurs seraient immédiatement sur les grandes tètes Burundaises. C’est pour cela que, je pense, il fallait le retirer de la circulation, le juger vite fait et le caser. Il ne faut pas le laisser parler car Mr sait trop!
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Jean Pierre Hakizimana
Voici un example:
https://www.iwacu-burundi.org/un-journaliste-diwacu-echappe-a-une-tentative-denlevement/
Quand l’Etat terrorise!
CQFD!
Gacece
@Jean Pierre Hakizimana
Arrêtez s’il vous plaît!
N’importe qui peut se déguiser en policier, utiliser une camionnette aux vitres tintés et tenter de kidnapper quelqu’un… Pourquoi pas des bandits?
On ne connaît pas non plus la vie personnelle de ce journaliste et les ennemis qu’il pourrait s’être faits dans sa vie personnelle ou professionnelle.
Toute personne voulant éliminer son ennemi sans se faire inquiéter peut y recourir… et faire porter le chapeau à la police ou à l’État.
Et bien le couperet est tombé. Et on sait pourquoi on avait voulu lèenlever. Mais encore une fois je ne comprends pas pourquoi l enlever. Un mandat en bonne et due forme etait juste requis.
LeCNC a sorti une lettre de mise en gar4de pour le Directeur d Iwacu
Quelle lâcheté.
Si le pouvoir n’a pas apprécié ce que le Professeur a dit.
Qu’il s’attaque à lui et non à ce journaliste.
D’ailleurs l’argumentation du Professeur Nimubona (Limpide et sans complaisance) n’est pas plus acerbe que les avis de sieurs Rufyiri ou du président de FOCODE
Je ne sais si le pouvoir l’a compris c’ est ce type de situation qui fera que le Burundi ne s’en sortira pas, qu’il ne pourra prétendre à aucune aide de la part des bailleurs de fonds y compris les organisations internationales . Le Burundi n’a qu’à se tourner vers les fossoyeurs de la démocratie et des droits de l’homme , vers Wagner et la Russie . C’est triste pour notre pays.
Habitant en Europe , je ne vois pas comment convaincre un Belge , Un Néerlandais ou un Allemand que le Burundi est un pays de « lait ou de miel » . Et on dira « inyankaburundi » ! Inyankaburundi ce sont ces cliques qui enlèvent les gens , ces corrompus et corrupteurs !!!