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Au Village de paix de Musenyi, « il faut retrousser les manches et ne pas attendre la manne »

05/05/2013 Commentaires fermés sur Au Village de paix de Musenyi, « il faut retrousser les manches et ne pas attendre la manne »

Implanté en 2008 en commune Mabanda, ce village de paix construit pour accueillir des rapatriés sans référence compte 200 maisons. Aujourd’hui, il abrite plus de 1.050 personnes. Les abris de fortune d’antan, couverts de tôles ondulées avec comme murs, des bâches bleues estampillées HCR, se sont petit à petit métamorphosés de même que ces anciens réfugiés qui redeviennent des citoyens à part entière.

<doc6399|left>Des briques adobe ou en terres cuites ont remplacés ces « murs des lamentations », les jérémiades et les pleurs ont fait place aux rires des enfants… Le village respire la vie tant bien que mal. Ceci crée même des jaloux parmi les quelques habitants des collines d’à côté, ceux qui sont restés au pays.

Une petite visite dans les différents quartiers de ce village permet de voir que la vie pour ces rapatriés a repris. Les plus courageux et les plus entreprenants ont des boutiques bien achalandées, c’est l’exemple de cette boutique de référence appelée « Peace we need ». Elle est tenue par une jeune dame, Daveness, courtoise, très attentionnée et très accueillante, des qualités qui payent. Sa boutique n’a rien à envier à celles de nos quartiers de Bujumbura. A 50 mètres de là, se dresse une autre boutique bien garnie, elle est surmontée d’une plaque solaire, on n’arrête pas le progrès. La nuit tombée, la lumière attire les clients.

Ce village de paix compte aussi deux moulins. Le premier appartient à une association de rapatriés de ce village, « Twiyubake 2 ». 12 hommes et 12 femmes, décidés à se mettre ensemble pour mener des activités génératrices de revenus. Ils font un peu d’épargne et donnent des crédits aux membres de l’association.

L’association « Twiyubake 2 » compte avoir une décortiqueuse

Le deuxième moulin situé à quelques mètres du premier appartient à une famille. Le chef de ménage s’appelle Herman Sakubu. Sa femme, Neema Habonimana, qui fait tourner la machine ce jour, explique : « On a dû serrer la ceinture, faire des sacrifices et des économies pour pouvoir acheter ce moulin ». Quand, la saison est bonne, poursuit-elle, les clients se bousculent et font la queue, le moulin tourne à plein régime. « On peut facilement avoir autour de 20.000 FBu par jour », confie-t-elle tout en poussant le manioc dans les engrenages de la machine à travers une sorte d’entonnoir métallique. Le vrombissement de ce moulin et la poudre blanche dégagée l’obligent à parler à haute voix.

|| Ce village de paix n’a pas de robinet, les rapatriés doivent aller chercher l’eau à 1 km du site. Le centre de santé le plus proche est à 8 km. Mais les écoliers sont gâtés : les classes sont situées juste à l’entrée du site. ||

<doc6401|left>Il faut retrousser les manches et ne pas attendre la manne

A quelques pas de là, une porcherie, un poulailler par ici et quelques chèvres par là. « La plupart des rapatriés de ce village de paix ont reçu des chèvres de la part de la FAO mais quelques familles seulement ont encore quelques bêtes. Il y en a qui n’ont pas résisté aux dures conditions de la région. Il fallait leur apporter du fourrage, avoir un vétérinaire pour les suivre de près », fait savoir Bonaventure Bima, un des rares à garder ces chèvres offertes par la FAO.

« La plupart de ces bêtes ont été vendues, certains rapatriés de ce village de paix ont utilisé l’argent reçu pour autre chose, mais il y en a qui se sont payé, une vache avec la somme obtenue », souligne-t-il. « Ils ont bien entendu ajouté tout ce qu’ils avaient économiser pour avoir du gros bétail et par voie de conséquence du fumier pour les champs », précise ce rapatrié, apparemment aisé. Il possède juste à côté de sa maison, une vache dans une étable, un poulailler, quelques chèvres et un bouc géniteur d’une race améliorée, le tout en stabulation.

Juste derrière sa maison une autre famille possède une vache. « On a voulu faire comme lui et on a réussi, c’est un bon exemple à suivre mais il faut beaucoup de courage », confie cette famille. « Ceux qui travaillent assidûment sont pour le moment enviés par les habitants des collines environnantes », témoigne Bonaventure Bima, cité comme rapatrié modèle dans ce village de paix.
Chaque rapatrié à Musenyi a reçu un demi-hectare de terres à cultiver en dehors de ce site. Ces propriétés sont pour la plupart situées à environ 3 km de ce village de paix. Ces champs se trouvent à Nyambande, Gitara et Kibayayu. « Il y en a qui sont bien entretenus et d’autres qui ne le sont pas, le temps de la manne est révolu, il faut que ces rapatriés habitués recevoir des aides changent de mentalité et apprennent à se prendre en charge » fait savoir le chef de ce village de paix de Musenyi, Anicet Ngenzi.

Tout le monde dans ce village de paix donne l’exemple du "Vieux", Marc Kadomo. Malgré son âge, il est parmi les rapatriés venus du camp de réfugiés d’Ulyankulu dans la province de Tabora en Tanzanie à avoir remplacé par des briques adobe les bâches bleues estampillées HCR utilisées comme murs.

Cet octogénaire, qui n’hésite pas à exhiber fièrement ses vieux parchemins attestant qu’il s’acquittait correctement de l’impôt de capitation bien avant 1969, a fabriqué de ses propres mains noueuses, tremblantes, usées, toutes les briques nécessaires pour sa maison. « Pas 1cm² du demi-hectare de terres octroyées ne reste sans être défriché », témoignent ses voisins admirateurs. Et ne tarissent pas d’éloge pour son courage, donné comme exemplaire.

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