Faute de pouvoir conserver leurs produits, les vendeurs de bière et de jus de banane de Mugina doivent se plier au prix fixé par les clients.
<doc6965|left>Marché de Nyeshenza, 10h 30. La foule est immense à ce marché situé à plus de 15km du chef lieu de la province de Cibitoke. Des camions venus pour charger la bière de banane sont aussi nombreux. Une bonne journée s’annonce, semble-t-il, pour les détenteurs de ladite bière. Pourtant, c’est la désolation pour eux. Les montants qu’ils s’attendaient à encaisser sont loin d’être réalistes. Motif : leurs grossistes viennent après avoir fixé le prix du bidon à l’avance et il doit être respecté par tout acheteur. D’après les vendeurs, ces acheteurs dont la plupart viennent de Bujumbura, s’arrêtent à quelques mètres, avant d’arriver sur le lieu d’approvisionnement, pour discuter du prix. « Aujourd’hui, j’ai vendu à 3000Fbu le bidon de vin de 20 l. Or j’espérais en tirer au moins 6000Fbu », se désole une vendeuse. Elle indique qu’avec 5 bananes dont l’une lui a coûté 3000 Fbu, elle pouvait avoir deux bidons.
Même regret chez Marie, une autre vendeuse. Elle a payé 35.000 Fbu pour avoir ses 12 bidons de vin de banane. Or, elle ne pouvait encaisser que 2500 Fbu par bidon, soit 30000fbu. La bière et le vin de banane ne se conservent pas aisément, ce qui ruine d’autant plus les producteurs. « Ici, le marché se tient les lundi et les vendredi et si on décide de conserver le produit pour le vendre à bon prix, on perd en qualité. Je suis alors obligée de vendre à n’importe quel prix pour ne pas perdre doublement », déplore encore Marie.
Cette femme suggère à l’administration de mettre en place une usine de conservation et/ou de fabrication des dérivés de la banane. « Que le gouvernement mette en valeur notre banane ! L’usine pourrait améliorer les revenus de nos différents ménages et contribuer au développement du pays, une fois notre bière exportée ! »
Du côté des acheteurs, c’est plutôt la loi de l’offre et de la demande qui réglemente les prix. Emmanuel Zihabandi, président de l’association des vendeurs de vins de banane, précise que les prix varient d’un jour à l’autre : « C’est comme du haricot. Quand il y en a plein, les prix chutent et c’est notre bénéfice. Et quand il y en a peu, les prix augmentent et c’est au tour des fournisseurs d’en profiter. Bref, les prix sont négociés. » Et pour les réunions qu’on leur reproche, M. Zihabandi explique que c’est pour attendre que les vendeurs, qui viennent de loin, arrivent tous au marché afin de pouvoir diversifier les choix.
L’administration est consciente du problème
« Les vendeurs sont plus perdants que les acheteurs. Ces derniers peuvent acheter à 1000Fbu un bidon de 20l et quand ils arrivent à Bujumbura, ils revendent la même bière à 800Fbu la bouteille», ajoute Jean- Baptiste Baziri, conseiller technique de l’administrateur communal de Mugina, chargé du développement. Puisqu’ils ne peuvent pas conserver leurs produits, poursuit-il, nos paysans en arrivent à jeter les invendus.
A court terme, le conseiller indique que sa commune prévoit de regrouper ces producteurs en association afin qu’ils aient aussi du poids pour pouvoir défendre leurs intérêts sur le marché. Pour le long terme, il sollicite le gouvernement ou toute autre personne capable de venir en aide à sa commune afin de pouvoir implanter une usine de conservation et/ou de fabrication des dérivés de la banane. « Avec l’usine, je reste optimiste que les recettes mensuelles communales pourront de loin dépasser les 5 millions de Fbu récoltées actuellement. Du moment que l’on peut faire des exportations » espère-t-il.
D’après le conseiller, actuellement les taxes sont calculées à 1500Fbu le fil de 120l, un prix qui date de 1990.