Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Léon Masengo.
Votre qualité principale ?
L’honnêteté
Votre défaut principal ?
Je me fâche vite quand les gens ne respectent pas le temps. Vous comprenez que je dois faire beaucoup d’efforts pour comprendre nos sociétés africaines qui pensent que le temps est une denrée intarissable. ‘’Nous allons rattraper le temps perdu’’ ; Je déteste cette phrase. Le temps perdu est passé, il ne reviendra jamais. C’est un des éléments qui justifie la pauvreté dans nos pays africains. J’adore les Anglais quand ils disent : ‘’Time is Money’’ (le temps c’est de l’argent).
Nous y reviendrons souvent dans nos programmes radio.
La qualité que vous aimez chez les autres ?
Être juste
Le défaut que vous ne supportez pas chez les autres ?
L’égoïsme
La femme que vous admirez le plus ?
La femme responsable.
L’homme que vous admirez le plus ?
L’homme visionnaire.
Votre plus beau souvenir ?
L’Investiture de Feu président Melchior Ndadaye.
Votre plus triste souvenir ?
L’assassinat du Président Melchior Ndadaye et les massacres qui ont suivi. Que Dieu nous épargne la répétition de ce qui nous est arrivé ce jour du 21 octobre 1993.
Quel serait votre plus grand malheur ?
La répétition des massacres interethniques au Burundi et ailleurs.
Le plus haut fait de l’histoire burundaise ?
La signature de l’Accord de Paix d’Arusha.
La plus belle date de l’histoire burundaise ?
Le 01 juillet 1962, le jour de l’indépendance.
La plus terrible ?
21 octobre 1993 ; l’assassinat du Président Ndadaye.
Le métier que vous auriez aimé exercer dans une autre vie ?
Être au service des vulnérables : oeuvre caritative.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans le journalisme ?
Je crois en l’importance de l’information, en la force de celui qui détient l’information et accepte de la partager pour l’intérêt général. Dans la société, tout est communication et dans nos sociétés de l’oralité, tout ce qui est dit à la radio est parole d’Evangile. Voilà pourquoi j’en profite pour demander à tous les confrères et consœurs de mettre au centre de tout ce que nous faisons l’intérêt de tous ; prioritairement les plus vulnérables.
Quel est le personnage qui vous inspire dans ce métier ?
Le journaliste français Christophe Boisbouvier. Il nous a visités un jour à la rédaction Bonesha et nous avons beaucoup appris de lui.
La Radio Bonesha venait de passer près de six ans sans émettre. Quel souvenir gardez-vous de cette période ?
Une période dure, un combat de David contre Goliath, de grande patience. Des journalistes se sont transformés en de petits commerçants ambulants, en de vendeuses de cacahuètes, d’autres encore sont restés cloîtrés dans les maisons dont ils arrivaient à payer les loyers très difficilement. Merci à l’actuel président qui a compris. Nous attendons encore de lui un appui matériel et financier pour faire face aux différents problèmes auxquels nous nous heurtons. Ce problème lié à la fermeture de la station avait terni l’image du pays inutilement.
Vous faites du journalisme depuis une quinzaine d’années. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué de tout ce temps-là ?
C’est un métier noble, épanouissant qui rémunère l’estime et le respect. Pour l’argent, il ne faut pas trop y compter. C’est un métier qui peut permettre de déjeuner avec un président et dîner ou partager une natte le soir avec un citoyen lambda. Les risques du métier sont aussi nombreux allant de la prison jusqu’à la mort ; mais allez-y les gars, c’est un bon métier.
Que faire pour rendre la presse burundaise plus indépendante ?
Développer beaucoup le professionnalisme à travers des formations. Développer des médias plus autonomes financièrement pour améliorer les conditions des journalistes et leurs productions. C’est très dangereux quand les radios utilisent des journalistes sans salaires.
Quelles mesures phares prendriez-vous si vous étiez ministre de l’Information ?
Dépolitiser les médias
Créer un Centre de perfectionnement pour journalistes
Mettre en place une loi sur la presse en évitant le flou entretenu dans certaines dispositions
Exiger un traitement équitable des citoyens dans tous les médias
Rendre les médias plus forts professionnellement, techniquement et financièrement.
Quelles décisions mettriez-vous en avant si vous étiez président du CNC ?
-Réclamer plus d’indépendance du Conseil
-Eviter les sanctions allant jusqu’à la fermeture des médias ou à l’emprisonnement des journalistes.
-Dialogue régulier avec les responsables des médias.
-Multiplier les sessions de formation
-Dépénaliser les délits de presse.
Votre passe-temps préféré ?
La natation.
Votre lieu préféré au Burundi ?
Nyanza-Lac au bord de lac Tanganyika mais en général tout le littoral du lac me plaît.
Le pays où vous aimeriez vivre ?
Le Burundi. Nous avons un beau pays. Nous avons l’obligation de le rendre plus vivable que nous l’avons trouvé.
Le voyage que vous aimeriez faire ?
Singapour.
Votre rêve de bonheur ?
Que tous les Burundais aient accès à une alimentation et un habitat décents.
Votre plat préféré ?
Ooh mon Dieu…. J’aime tous les bons plats sans beaucoup de préférences. Je ne suis pas un fin gourmet.
Votre chanson préférée ?
‘NKUNDA ABANTU’ de Bernard et Alfred
Les trois mots qui résument la Bible : Bonjour- Merci- Pardon, j’essaie de les vivre.
Quelle radio écoutez-vous ?
RFI
Avez-vous une devise personnelle ?
Mon premier principe, c’est que la grande richesse, ce sont les Hommes.
La deuxième richesse, c’est l’honnêteté
La troisième richesse, c’est l’humilité.
Croyez-vous à la bonté humaine ?
Beaucoup…. Malheureusement, la chaleur humaine tend à diminuer. Aujourd’hui tout est intérêt.
Aimons-nous les uns, les autres, comme Dieu nous a aimés.
Pensez-vous à la mort ?
Oui régulièrement puisqu’à chaque seconde, nous nous approchons de notre fin ultime.
Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ?
Merci de nous avoir créés ainsi tous les délices qu’il y a dans ce monde et merci pour votre miséricorde face à ceux qui trempent dans l’exploitation d’autrui.
Merci pour le paradis que tu nous offres.
Propos recueillis par Alphonse Yikeze