Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu,
Freddy Sabimbona
Votre plus beau souvenir ?
J’en ai beaucoup… la naissance de mon fils, ma première pièce de théâtre à 14 ans intitulé ’’La marmite de Koka-Mbala” où ma famille était présente …mais j’aime à penser que les souvenirs sont devant nous ainsi cela permet d’envisager l’éventualité de moments de bonheur à chaque instant.
Votre plus triste souvenir ?
La mort de mon père juste un an après cette première découverte des frissons du théâtre…
Quel serait votre plus grand malheur ?
Je ne conçois pas le malheur comme une fatalité mais plutôt comme un apprentissage de la vie. «Ce n’est pas ce qui t’arrive qui compte mais comment tu le prends ». C’est là l’un de mes adages préférés.
Le plus haut fait de l’histoire burundaise ?
Difficile d’en trouver un présentement au vu de l’histoire passée et présente du Burundi mais je dirais le 18 septembre 1961 où l’Uprona dirigé par le Prince Louis Rwagasore remporte les législatives choisi par les Burundais de tous bords d’un même élan et où le Prince livre un discours tout en humilité: “Vous nous jugerez à nos actes et votre satisfaction sera notre fierté”.
Cette phrase m’a toujours marqué de par sa simplicité et sa grandeur.
La plus belle date de l’histoire burundaise ?
L’histoire de Buta où les élèves ont refusé de se séparer préférant mourir ensemble en tant que Burundais et ne pas se laisser définir par des idéologies sectaires et révolues mais ont préféré mettre en avant l’humanité. La plus belle date de l’histoire du Burundi à mes yeux, humaine et profonde.
La plus terrible ?
L’histoire en soi du Burundi est la plus terrible… Car c’est comme si l’on n’apprenait pas du passé et que l’on tournait en rond dans un cycle vicieux où l’on en paye tous le prix sans jamais penser aux conséquences sur les générations futures.
Le métier que vous auriez aimé faire ? Pourquoi ?
Celui que j’exerce présentement à savoir le théâtre. Je n’aurai pas rêvé mieux malgré les obstacles et les difficultés qui loin d’être un frein sont un moteur pour avancer et s’épanouir. Le théâtre m’a permis de m’ouvrir et par là de m’ouvrir au monde.
Votre passe-temps préféré ?
Jouer au foot et lire des livres.
Votre lieu préféré au Burundi ?
Le Burundi que ce soit à l’intérieur du pays, sur le Lac Tanganyika , la Rusizi. Il se dégage une beauté et une vérité où que l’on soit au Burundi qui vous saisit et qui ne vous laisse pas indemne. Nous avons pratiquement tout, tout pour nous.
Le pays où vous aimeriez vivre ? Pourquoi ?
Le Burundi car tout est à construire et c’est excitant de pouvoir y contribuer et de pouvoir à l’instar de tout le monde y apposer sa pierre.
Le voyage que vous aimeriez faire ?
Le tour du monde.
Votre rêve de bonheur ?
Etre soi.
Votre plat préféré ?
Comme tout Burundais qui se respecte je pense: Riz, Sombé, Haricot, frites. C’est le summum du bonheur pour moi… Plus d’une semaine sans et je remets en question ma vie.
Votre chanson préférée ?
Cela dépend des moments mais j’ai une grande passion pour le Rap.
Quelle radio écoutez-vous ?
Je n’écoute pas trop la radio honnêtement…
Avez-vous une devise ?
Persévérance et Détermination.
Votre souvenir du 1er juin 1993 ?
J’avais 11 ans, je me souviens d’une liesse populaire … de couleurs vertes et rouges , bleu… propre au parti politique de l’époque… je me souviens aussi que c’est à ce moment-là que j’ai entendu des mots comme Hutu et Tutsi… des mots qui revenait sans cesse au fil des jours qui ont suivi ce 1er juin 1993 .
Votre définition de l’indépendance ?
A mon humble avis, je dirai l’autonomie.
Votre définition de la démocratie ?
C’est tout court la liberté de penser et de s’exprimer.
Votre définition de la justice ?
C’est tout simplement l’impartialité.
Si vous étiez ministre de la Jeunesse, du Sport et de la Culture, quelles seraient vos deux premières mesures ?
Quel honneur ! Je l’ignore honnêtement car je n’y ai jamais pensé… Je sais juste que je favoriserai tous les arts et je dis bien tous… Le Burundi ne sera pas uniquement le pays du tambour et du foot mais de la peinture, de la poésie, de la danse, de la sculpture, du théâtre, du cinéma, du slam, de la musique … de pouvoir exploiter tous les talents, les possibilités qu’a la jeunesse burundaise et Dieu sait combien ces jeunes sont talentueux…
Mon rêve peut-être pour revenir à l’une des questions précédentes serait de faire du Burundi un pays culturel où l’on s’évade dans des imaginaires multiples, car la culture c’est cela aussi se proposer un projet de société où il est permis d’aspirer à un autre monde et quoi de mieux que l’art, le sport pour s’y nourrir et y croire.
Croyez-vous à la bonté naturelle de l’homme ?
Oui, je le pense.
Pensez-vous à la mort ?
Non, je n’y pense pas vu que c’est un fait inéluctable… Sartre a une belle phrase dessus que j’ai fait mienne : «La mort je n’y pense pas. Elle ne vient pas dans ma vie, elle sera dehors. Un jour ma vie cessera mais je ne veux qu’elle ne soit obérée par la mort en aucun cas. Je veux que ma mort ne rentre pas dans ma vie, ne la définisse pas que je sois toujours un appel à vivre.» C’est beau non?
Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ?
Si Dieu est à l’image de l’homme, pas besoin de comparaître devant lui vu que je le croise tous les jours et que j’ai l’occasion de lui parler tous les jours.