Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Elsie Uwamahoro.
Votre qualité principale ?
La sincérité. J’exprime mes pensées et mes sentiments sans les déguiser.
Votre défaut principal ?
La méfiance. Je suis souvent sur mes gardes et je calcule parfois trop avant de décider.
La qualité que vous préférez chez les autres ?
La simplicité. Le fait d’être naturel et montrer la vraie image de soi.
Le défaut que vous ne supportez pas chez les autres ?
La duplicité. J’ai horreur de la fausseté et du double jeu!
La femme que vous admirez le plus ?
Il m’est difficile de faire le choix entre Michelle Obama, Serena Williams et Angela Merkel.
L’homme que vous admirez le plus ?
Sans hésiter. Nelson Mandela
Votre plus beau souvenir ?
Ma qualification aux Jeux Olympiques de Rio 2016. Je traversais une période difficile de ma vie, ce qui avait remarquablement affecté mes performances sportives. Mon rêve était de faire 3 éditions des J.O et j’y suis arrivée.
Votre plus triste souvenir ?
Un visa accordé tardivement qui a failli bousiller une bourse d’étude. Le jury de sélection a été bienveillant en permettant que je fasse la section de cours ratée avec la promotion suivante.
Quel serait votre plus grand malheur ?
Quitter ce monde sans épuiser tout le potentiel qui est en moi.
Le plus haut fait de l’histoire burundaise ?
L’indépendance du Burundi
La plus belle date de l’histoire burundaise ?
Le 1er juillet 1962
La plus terrible ?
Le 21 octobre 1993
Le métier que vous auriez aimé exercer ?
Gynécologue et Militaire, les deux combinés. J’aurai aimé être une Générale de l’armée. (Rires).
Nageuse, comment l’êtes-vous devenue ?
Je ne saurai pas l’expliquer. Je dirai un talent que Dieu a mis en moi et que j’ai eu l’opportunité de manifester dans des conditions difficiles.
Au plus haut niveau pendant un long moment. Quel est le secret de votre longévité ?
La discipline, le travail acharné et la confiance en soi.
Quel souvenir gardez-vous de votre 1ère participation aux Jeux Olympiques ?
Passer presque tout un mois avec tous les athlètes de haut niveau de tous les sports vivant dans un même village et se retrouvant assis face à face dans un même restaurant gigantesque ouvert 24h/24h.
Voyez-vous une nageuse burundaise, un jour remporter une médaille olympique ?
Pourquoi pas. Le chemin est encore long, mais je reste toujours optimiste dans la vie.
La femme burundaise, la trouvez-vous suffisamment représentée dans les instances de prise de décisions (politiques, économiques, sportives, etc.) ?
Un grand pas a déjà été franchi. Je reste convaincue que si les femmes continuent à travailler dur et à manifester leurs capacités, elles se feront encore plus de place.
Qu’est-ce qui doit être fait pour motiver davantage les filles de poursuivre leur carrière sportive ?
Les pouvoirs publics doivent valoriser le sport féminin autant que celui des hommes en le professionnalisant. Une sensibilisation au changement de mentalité est nécessaire pour briser les tabous que la culture a ancrés dans les têtes des gens.
Votre souvenir du 1er juin 1993(le jour où feu président Ndadaye a été élu) ?
Je n’ai pas vraiment un souvenir de ce jour. J’étais encore une gamine.
Votre passe-temps préféré ?
Siroter un café et manger un morceau de cake au bord du lac en respirant de l’air frais.
Votre lieu préféré au Burundi ?
Tout ce qui est campagne m’attire. J’ai déjà fait toutes les provinces du Burundi.
Le voyage que vous aimeriez faire ?
Sur ma liste, il y a la Grèce et le Ghana.
Avez-vous une devise ?
Tout est possible dans la vie. Il suffit d’y croire.
La dot, faut-il la supprimer ?
Oui et non. A mon avis, l’essentiel est que cela puisse se discuter.
Un mari idéal, comment doit-il être ?
(Rires). L’idéal ça n’existe pas. Un bon mari, c’est un partenaire de vie conscient que la relation est un espace où deux êtres imparfaits et indépendants se rencontrent avec l’objectif de s’entraider à atteindre leur potentialité et à devenir la meilleure version d’eux-mêmes.
Votre rêve de bonheur ?
Voir les gens autour de moi réussir et exprimer leur originalité.
Votre plat préféré ?
Une bonne brochette de chèvre avec des frites de banane.
Votre chanson préférée ?
« Born to win » de Sinach. C’est un hymne que je chante chaque matin.
Si vous étiez ministre du Genre, quelles seraient vos mesures urgentes?
-Plaider pour le renforcement de la parité dans tous les domaines professionnels.
-Introduire une politique sur le traitement particulier des femmes dans les milieux professionnels pendant les périodes de grossesse et d’allaitement.
-Lutter contre toutes les violences basées sur le genre, que ce soit pour les enfants, les femmes et les hommes.
Si vous étiez ministre de la Jeunesse et des Sports, quelles seraient vos urgentes mesures ?
-Valoriser le sport de haut niveau en initiant des académies dans chaque sport pour se focaliser sur la compétition et la performance dès le bas âge.
-Introduire la notion de double carrière en collaboration avec le ministère ayant l’éducation dans ses attributions pour permettre aux sportifs de combiner les études et le sport dans le but de former des futurs dirigeants et formateurs dans le sport.
-Renforcer la formation des entraîneurs et de tout l’entourage des sportifs, sans oublier le volet loisirs pour le sport de masse.
-Introduire une politique sur la réinsertion professionnelle des anciens sportifs de haut niveau ayant représenté le pays.
Croyez-vous à la bonté humaine ?
Oui. Je crois dans la bonté du coeur de chaque humain, Dieu y a mis sans doute l’envie et la capacité de faire le bien. Ces sont les circonstances de la vie ou les réactions à ces circonstances qui changent les gens.
Pensez-vous à la mort ?
Oui. Et je n’ai pas peur. (Rires). C’est un passage pour tout le monde. L’essentiel est de partir après une heureuse vieillesse, âgée et rassasiée de jours.
Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ?
Je le remercierai de m’avoir permise d’être une de ses belles créatures et d’avoir découvert le pourquoi de mon existence sur la Terre.
Propos recueillis par Hervé Mugisha