Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Déo Hakizimana alias « Kireko ».
Votre plus beau souvenir ?
C’est le jour où j’ai fondé le mouvement Chiro à la paroisse Murayi dans ma commune natale de Giheta. C’était en 1967. L’autre beau souvenir se situe en janvier 1981. C’est le jour où j’ai produit ma première émission « Ninde » à la Radiotélévision nationale (RTNB).
Votre plus triste souvenir ?
Il y a trop de tristes souvenirs qu’on ne peut pas énumérer ici. Mais la mort de ma mère en 1963 m’a énormément affecté.
Quel serait votre plus grand malheur ?
Mourir dans le péché, partir sans se confesser devant un prêtre.
Le plus haut fait de l’histoire burundaise ?
C’est l’indépendance du Burundi. Je pense que ce jour-là a marqué tous les Burundais.
La plus belle date de l’histoire burundaise ?
C’est le 1er juillet 1962. Je me rappelle beaucoup de choses. Depuis ce jour, le peuple burundais est devenu libre. Le colon ne nous demandait plus les œufs et le beurre. Sans oublier les coups de chicotes.
La plus terrible ?
C’est le 13 octobre 1961, le jour de l’assassinat du Prince Louis Rwagasore. La date qui marque le début d’autres évènements tragiques qu’a connus le Burundi.
Le métier que vous auriez aimé faire ? Pourquoi ?
Je suis satisfait du métier que j’exerce. Cela fait des années que je joue des pièces de théâtres et Ninde pour informer, donner des conseils à la population et je fais rire mes compatriotes.
Votre passe-temps préféré ?
C’est le moment de réfléchir à ce que je vais faire ultérieurement. Les numéros Ninde ou d’autres pièces de théâtre.
Votre lieu préféré au Burundi ?
Le Burundi est beau. Pour dire qu’il y a plusieurs lieux qu’on peut préférer. Par exemple, j’adore les chutes de Mwishanga en province Rutana et la source du Nil en province Bururi.
Le pays où vous aimeriez vivre ? Pourquoi ?
Aucun autre pays à part le Burundi. C’est le pays que j’aime beaucoup.
Le voyage que vous aimeriez faire ?
Je ne peux pas parler d’un pays quelconque car je n’ai jamais voyagé. Toutefois, j’ai entendu que l’Australie et le Canada hébergent beaucoup de Burundais. Un jour, j’aimerais y aller.
Votre plat préféré ?
J’aime manger les aliments naturels qu’on cultive chez nous à Giheta. Les patates douces, les haricots, les ignames, la pâte du manioc, les choux et les amarantes.
Votre chanson préférée ?
Il y a plusieurs chansons qui contiennent des messages qui me touchent au cœur. La chanson intitulée « Indero y’umwana iva hasi » (l’éducation de l’enfant commence depuis son bas âge) reste la première pour moi car j’ai même composé un scénario «Ninde» portant le même titre.
Quelle radio écoutez-vous ?
J’écoute deux radios seulement. La RTNB et la Radio Rema FM.
Avez-vous une devise ?
Non.
Votre souvenir du 1er juin 1993 ?
Sans mentir je n’ai aucun souvenir. Mais si vous m’accordez du temps, je pourrai faire des recherches.
Votre définition de l’indépendance ?
L’indépendance, c’est être libre. Avoir le droit de penser par soi-même. Je me rappelle qu’à l’époque on nous parlait de Rugereka, des Belges et des Allemands. Pour rester libres, nos ancêtres ont bravé tous les dangers et les ont combattus avec des lances alors que ces envahisseurs avaient des fusils.
Votre définition de la démocratie ?
C’est le fait d’avoir des dirigeants élus en toute transparence, qui garantissent le développement du pays et qui respectent les droits de l’Homme.
Votre définition de la justice ?
Je ne peux pas en dire beaucoup de choses mais c’est le respect de tous les citoyens sans violer la loi.
Si vous étiez ministre de la Culture, quelles seraient vos deux premières mesures ?
Ma première mesure serait d’inciter les jeunes à revenir aux anciennes traditions car on constate que ces jours-ci la culture burundaise est menacée. Dans le temps, les parents prenaient le temps, surtout le soir, pour les contes, les chants traditionnels avec leurs enfants. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas.
La seconde décision sera de construire une maison de formation pour encadrer les jeunes talentueux pour les théâtres, les sketches et autres jeux.
Croyez-vous à la bonté naturelle de l’homme ?
Bien sûr. Quand je vois un homme, je pense directement à l’image de Dieu qui nous a créés en tant que croyants.
Pensez-vous à la mort ?
J’y pense. Depuis ma naissance, on me parle de mes grands-parents qui ne sont plus de ce monde. Je ne les ai jamais connus. Par après, nos parents ont pris le même chemin. C’est pourquoi je sais qu’un jour je mourrai.
Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ?
Je le remercierai de m’avoir créé et de m’avoir donné une famille vaste.
Propos recueillis par Désiré Sindihebura