Le budget général de l’Etat exercice 2023-2024 est de 3 952,9 milliards BIF contre 2 392,3 milliards BIF du budget précédent, soit un accroissement de 65,23%. Des députés apprécient la mise en place du budget-programme, axé sur la performance et les résultats, malgré des préoccupations sur la gestion du déficit budgétaire s’élevant à plus de 700 milliards BIF.
« Le budget-programme est un outil de gestion des finances publiques qui consiste à élaborer, présenter et exécuter le budget sur la base de programme budgétaire. Il est axé sur la performance et permet de relever les défis de l’amélioration de l’efficacité des politiques publiques en passant de la logique des moyens à une logique de résultats », a défini Audace Niyonzima, ministre des Finances, du Budget et de la Planification économique, lors de l’adoption du budget général de l’Etat exercice 2023-2024 à l’Assemblée nationale, ce 12 juin.
Selon lui, le budget-programme a été élaboré dans la logique de budgétisation axée sur les performances. Les dépenses budgétaires sont prévues et gérées par les programmes budgétaires qui constituent l’unité de spécialisation et de vote des crédits budgétaires : « Ces programmes résultent du découpage des politiques publiques et des stratégies sectorielles avec une déclinaison en actions et en activités ».
Et de préciser que les institutions constitutionnelles, étant des institutions de coordination, n’ont pas des programmes budgétaires et leurs allocations budgétaires constituent des dotations.
Avec le budget-programme, ajoute-t-il, les activités sont rattachées aux indicateurs de mesure de performance et des cibles de résultats attendus découlant de la réalisation des activités : « Les structures responsables pour chaque activité ont été bien définies et constituent une base d’évaluation des performances individuelles et institutionnelles ».
Parmi les innovations dans ce nouveau mode de gestion des finances publiques, le ministre des Finances évoque notamment la primauté de la logique de la performance à travers la recherche accrue de l’efficacité et de l’efficience de la dépense publique en vue d’améliorer le niveau de vie des citoyens.
Il cite aussi la contractualisation et la responsabilité des acteurs de l’exécution du budget : « Ces derniers doivent signer des contrats de performance traduisant l’obligation de rendre compte ou d’atteindre les résultats attendus fixés dans les projets annuels de performance ».
Selon Audace Niyonzima, il y aura désormais, avec le budget-programme, l’annulation ou la réaffectation à un autre programme budgétaire d’un autre ministère ou à une autre institution constitutionnelle des crédits non-engagés au cours du trimestre donné par rapport aux plafonds d’engagements trimestriels élaborés sur base des plans de travail et budget annuel (PTBA).
Un déficit budgétaire de 728,9 milliards BIF
« L’accroissement sur les dépenses totales de l’Etat est dû d’une part à l’augmentation de l’investissement sur les ressources nationales passant de 794,03 milliards à 1 058,9 milliards BIF pour la mise en œuvre des projets prioritaires du gouvernement et d’autre part, aux dépenses courantes qui passent de 1 204,5 milliards BIF à 2 027,8 milliards BIF en 2023/2024, soit un accroissement de 68,3% », explique le ministre des Finances.
Selon lui, les recettes et dons sont à 3 224,07 milliards BIF en 2023/2024 alors que les dépenses totales de l’Etat s’élèvent à 3 952,9 milliards BIF. Ainsi, le déficit global du projet du budget général 2023/2024 s’élève à 728,9 milliards BIF contre 197,4 milliards BIF pour l’exercice précédent : « Il est expliqué par la hausse du budget alloué à l’investissement selon les priorités retenues par le gouvernement pour booster l’économie nationale, à l’amélioration des infrastructures publiques, au paiement des intérêts de la dette intérieure ainsi qu’à la mise en œuvre de la politique salariale équitable ».
Pour combler ce déficit, le projet de budget prévoit le financement extérieur net s’élevant à 148, 1 milliards BIF et le financement intérieur net de 580, 8 milliards de BIF.
En outre, pour augmenter les recettes, le gouvernement prévoit l’instauration dans le secteur bancaire d’une nouvelle taxe sur l’activité financière dite « TAF » en remplacement de la TVA sur les opérations bancaires ainsi que la contribution spéciale et l’imposition des intérêts sur les bons et obligations du trésor. Une taxe sur la fortune de 5% est aussi instaurée à partir de l’acquisition du troisième immeuble.
D’après Audace Niyonzima, il y aura aussi l’introduction de la taxe spécifique sur la messagerie mobile, le prélèvement spécifique sur les frais de services financiers mobiles, la taxe spécifique sur les frais des services à valeur ajoutée et la taxe spécifique annuelle par IMEI « International Mobile Equipment Identity » sur les terminaux mobiles.
Dans ce projet de budget 2023/2024, les grandes allocations budgétaires sont, entre autres, les salaires et traitements (359,9 milliards BIF), la réhabilitation de la piste de l’aéroport Melchior Ndadaye ( 50 milliards BIF), l’entretien des troupes militaires-polices ( 143,4 milliards BIF), le programme d’autonomisation économique et d’emploi des jeunes (PAEEJ) avec 32 milliards, programme national de subventions en engrais pour un montant de 256 milliards BIF ainsi que la construction des bâtiments administratifs (35 milliards BIF).
Des préoccupations sur la gestion du déficit budgétaire
Pour le député Sylvestre Ngendakumana, le recours à l’endettement intérieur et aux financements extérieurs pour combler le déficit budgétaire est inquiétant : « On a déjà un taux élevé d’endettement intérieur. Ce n’est pas rassurant qu’on continue de s’endetter ».
Il fustige la hausse des taxes sur les services de la téléphonie mobile pour élargir l’assiette fiscale. Pour lui, cette hausse se répercutera sur les usagers des téléphones dont la plupart font déjà face à la cherté de la vie : « Avec ces taxes, l’accès à la téléphonie mobile va être difficile. Les compagnies continueront de gagner, mais le consommateur en souffrira ».
Même son de cloche avec le député Léopold Hakizimana. Il regrette que la grande partie des recettes provienne des impôts sur les ménages : « Plusieurs ménages vivent dans des conditions de vie précaire. Avec la hausse des taxes et impôts, on risque de les enfoncer ». Pour lui, il faut que le gouvernement trouve d’autres ressources pour augmenter les recettes. Et de proposer que la reconstruction du marché central de Bujumbura figure parmi les priorités du budget-programme.
Le député Agathon Rwasa appelle à la priorisation des secteurs de l’éducation et de la santé qui ne sont pas parmi les grandes allocations budgétaires dans ce projet de budget 2023/2024. Il déplore qu’on ait alloué 131 millions BIF à la fourniture scolaire et pédagogique : « Compte tenu des besoins dans les écoles, cette somme est insuffisante. L’éducation et la santé sont stratégiques. Avec la vision Burundi pays émergent en 2040 et développé en 2060, ces deux secteurs doivent être prioritaires, car l’avenir du pays en dépend ».
Le député Olivier Suguru salue la mise en place du budget-programme. Il recommande l’organisation des formations et renforcement des capacités dans les ministères sectoriels sur la mise en application de ce budget-programme.
Et de demander si ce budget tient compte du taux de change actuel et du taux de l’inflation. Pour lui, le recours à l’endettement intérieur pour combler le déficit budgétaire risque de créer davantage l’inflation.
Pour le président de l’Assemblée nationale, Daniel Gélase Ndabirabe, il faut augmenter la production pour éviter le déficit budgétaire : « Il ne faut pas non plus dépendre aux financements extérieurs. Nous sommes dans un combat contre la pauvreté. Il faut l’intérioriser et développer des mécanismes de défense pour éradiquer la pauvreté ».
Le voisin du nord a doublé son budget dans 5ans, de 2 milliards de dollars à 4.5milliars,cela veut dire qu’il y a eu création des richesses surtout avec des investissements dans l’industrie locale.Un exemple à suivre par le Burundi
Le budget général de l’Etat exercice 2023-2024 est de 3 952,9 milliards BIF. Au taux du marché interbancaire de devises, c’est environ 1,40 milliard de USD. Comme toujours, une manie de vite se comparer au cousin du Nord : le Rwanda. Lui, passe à 5 030,1 FRW, soit environ 4.40 milliards USD pour la même année 2022/23. Et pour 2021, PIB annuel, respectivement Burundi vs Rwanda 2,35 milliards d’EUR vs 9,35 milliards d’EUR et PIB par habitant 187 € vs 695 €. Quasiment la même superficie, presque le même nombre de population, presque les mêmes ressources naturelles.
Ceci ne veut pas dire que le Rwandais vit mieux que le Burundais, mais de façon générale; il y a risque que les médecins vont continuer à voir ailleurs. Surtout que le partage du peu qu’il y a laisse à désirer.
La seule différence: le leadership.