Le 4ème round est censé être le dernier. Il devrait, selon la facilitation, se conclure par un accord signé en présence des chefs d’Etat de l’EAC. Un projet ambitieux.
Cette session se fait sans la participation des ténors du CNARED ainsi que ceux de la société civile réunie au sein du mouvement anti-troisième mandat. Pour la coalition de l’opposition en exil, la facilitation devrait ajourner cette session dont l’inclusivité est mise à mal. Elle dénonce par ailleurs ce qu’elle qualifie de piège pour réconforter le président Nkurunziza dans sa démarche de se cramponner au pouvoir. Le CNARED parle également d’un gouvernement absent à ce round.
A ce propos, Bujumbura indique qu’une délégation est bel et bien présente. Comme en témoigne la présence de l’ambassadeur ainsi que le chef du bureau de liaison à Arusha auprès de l’EAC. « Une délégation qui peut s’enrichir avec le temps, » apprend-on à Bujumbura.
Ce round est placé sous le signe de la discrétion. Alors que les sessions antérieures se passaient en plein centre-ville d’Arusha, cette fois-ci, la facilitation a opté pour un coin tranquille, à plus de 30 km de la ville. Un hôtel très loin des maisons d’habitation.
Et la facilitation a interdit aux journalistes l’accès au lieu de rencontre. Un membre de ce bureau a indiqué que la facilitation veut s’assurer d’un débat qui se passe entre les protagonistes et pas avec tout le public pour s’assurer du meilleur résultat possible.
Formation des groupes
Deux semaines pour régler définitivement la crise que traverse le Burundi depuis 2015. Les participants sont déjà sur place, l’ouverture officielle s’est faite ce mardi.
Mais dès l’ouverture quelques couacs. Le facilitateur dans la crise burundaise a proposé la formation de deux groupes. Le premier constitué des partis, acteurs politiques et anciens chefs d’Etat. L’autre groupe de la société civile, confession religieuse, les femmes et la jeunesse. C’était sans compter sur les positions diamétralement opposées des protagonistes.
Mercredi déjà, les groupes s’étaient disloqués en cinq camps. Un camp des partis politiques pro gouvernement, celui des acteurs et partis politiques de l’opposition. De l’autre côté s’est formé un camp de la société civile composé par les organisations Parcem et Olucome. Nous avons identifié aussi le groupe des anciens chefs d’Etat. Ceux qui ne se retrouvent pas dans l’un des camps forment le dernier groupe. Ces camps auront chacun un président et un rapporteur. Ensuite commenceront les débats sur le fond.
Un agenda élaboré
Dès lundi, le bureau de la facilitation a annoncé les points qui seront abordés au cours de cette session. La facilitation table sur cette rencontre pour vider la crise burundaise. La preuve : elle a prévu qu’à l’issue de ce 4ème round les participants aboutissent à un accord signé en présence des chefs d’Etat de la communauté est africaine.
Pour y arriver, 8 points feront objets de discussion. Il s’agit notamment de débattre à propos de l’Accord d’Arusha, la fin de l’impunité ainsi que le renforcement de la démocratie. Un point qui ne passe pas du côté du gouvernement est celui de la mise en place d’un gouvernement d’unité nationale. Selon Bujumbura et ses alliés, hors de question de penser au partage du pouvoir, la démocratie oblige. « Il faut passer par les élections pour prétendre au pouvoir. »
>>Réactions : Sur le gouvernement d’unité nationale
Léonce Ngendakumana : « Une nécessité »
« La mise en place d’un gouvernement de transition ou d’unité nationale est une nécessité, » selon le vice-président du parti Sahwanya Frodebu. Selon lui, l’essentiel aujourd’hui est de statuer sur les objectifs de ce gouvernement. A savoir la lutte contre la criminalité, les emprisonnements arbitraires etc…En vue d’une bonne préparation des élections dont le Burundi et la région seront fiers.
Evariste Ngayimpenda : « Un gouvernement qui a la confiance des Burundais»
Pour cet acteur politique de l’Uprona non institutionnel, les conclusions des pourparlers d’Arusha doivent être exécutées par un gouvernement qui a la confiance de tous les Burundais. Selon Evariste Ngayimpenda, il faudra donc statuer sur la mise en application de ces résolutions et se poser la question de savoir si le gouvernement en place a la confiance de tous pour assurer cette tâche ou pas.
Jacques Bigirimana : « La population a tranché »
Le président du parti Fnl quant à lui indique que le gouvernement d’unité nationale ne doit pas être un sujet à débattre. Selon Jacques Bigirimana, la population a déjà tranché en mettant en place les institutions par la voie des urnes. « C’est pour cette raison que je ne peux pas en parler. »
Jean de Dieu Mutabazi : « Il n’y a pas de négociation à Arusha»
Le président du parti Radebu prévient : que les gens ne s’y trompent pas. Les négociations n’ont pas lieu à Arusha comme cela s’est fait lors des négociations d’Arusha dans les années 2000 qui ont abouti au partage du pouvoir. Pour Jean de Dieu Mutabazi, il s’agit plutôt d’un dialogue comme on en a vu au Burundi. Il cite ici l’exemple du dialogue mené par la Cndi.
Au risque de jouer les oiseaux de mauvais augure, il faut dire que cette session est mal partie. D’abord par l’absence d’une grande partie des adversaires de Bujumbura. L’opposition interne est présente, elle pèse sur la balance. A l’image de l’exploit de la coalition Amizero y’abarundi aux élections de 2015 et cela même après avoir annoncé son retrait. Un acteur non négligeable donc.Mais ignorer l’absence du mouvement anti-troisième mandat qui a appelé à manifestation, peut se révéler contre-productif. Tous les médiateurs savent que l’on fait la paix avec ses adversaires.
Bien sûr, certains diraient qu’ils ont été invités, mais ne sont pas venus et qu’il faut les blâmer eux et pas la facilitation. Tout cela est peut-être vrai selon les raisons avancées. Mais le fait est là : leurs chaises à Arusha sont vides. Alors, on continue sans eux et on accepte de parier que l’on peut faire la paix sans eux ? C’est apparemment le choix fait. Les participants à Arusha se veulent confiants. Ils promettent de débattre et de présenter des arguments que pourraient faire valoir les opposants et la société civile en exil…
Par ailleurs, le CNARED parle de boycott du gouvernement. Néanmoins, sa chaise n’est pas vide. Le gouvernement est présent, via l’ambassadeur en Tanzanie, ce qui est normal, mais aussi l’assistant du ministre de l’Intérieur. Tout le monde en convient, ce n’est pas du « lourd ». C’est aussi un message de Bujumbura pour dire l’importance qu’il accorde à la partition qui se joue à Arusha. Une raison suffisante pour l’opposition et la société civile de penser à une mascarade ?
Il y a enfin cet accord qui sera signé entre les protagonistes à la fin de la session, à en croire le programme de Mkapa. L’accord symbolise la fin. La fin du dialogue, porteur d’espoir d’en finir avec la crise. Cela signifie qu’au bout de deux semaines à Arusha, les Burundais rentreront avec dans leurs valises la paix et la sécurité. Les garanties des jours meilleurs. La fin des hostilités. La médiation s’est lancée dans un projet ambitieux. Elle a décidé de croire que les Burundais étaient prêts à en découdre avec la crise. Trop beau pour être vrai ? Apparemment, Benjamin Mkapa a décidé de jouer sa dernière carte.
Chère Agnes,
J’ai lu votre article avec grand intérêt.
Vous dites d’emblée que « cette session se fait sans la participation des ténors du CNARED ainsi que ceux de la société civile réunie au sein du mouvement anti-troisième mandat » mais vous oubliez de préciser que le gouvernement de Nkurunziza a juré qu’il ne se retrouvera jamais sur la même table avec des personnes qui sont poursuivis par la justice burundaise. Cela semble être le cas.
@ Ayahu Jean pierre
Personne au CNDD-FDD ne semble avoir tiré de leçons de l’absence du mouvement aux premières négociations d’Arusha.
« C’est avec ses adversaires qu’on négocie un traité de paix ».
Et quand on s’y refuse, cela pourrait vouloir dire qu’on ne veut pas véritablement la paix. Sous les casquettes du clan au pouvoir, l’écho du crépitement des armes roule encore. Cela m’attriste.
@Ayuhu Jean Pierre
La CPI a ouvert il n’y a pas longtemps une enquête judiciaire sur les crimes commis au Burundi depuis l’avènement du troisième mandat de Nkurunziza et je crains que les accusateurs des autres aujourd’hui soient les accusés de demain.Wait and see!
« Mkapa joue sa dernière carte »
Jouer sa carte signifierait qu’il prend un risque quelconque; lequel?
Quel est son intérêt dans l’affaire? Négligeable!
Si les équipes sont mauvaises, Mkapa y est pour rien !!! Chers politiciens pensez à ceux qui meurent parce qu’ils sont mal soignés par faute de médicaments, pensez à cette misère de la population. Ne dites pas que vous êtes contents dans vos superbes villas avec la misère qui vous entoure.