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Après Genève, la réalité reprend ses droits

05/05/2013 Commentaires fermés sur Après Genève, la réalité reprend ses droits

Empêchée de se réunir à Rumonge, l’ADC-Ikibiri estime que le pouvoir ne tiendra pas les promesses faites à Genève de garantir les droits de l’opposition.

<doc5951|right>Dimanche 4 octobre. Des policiers barrent la route Bujumbura-Rumonge pendant plusieurs heures à Minago, une zone de la commune de Rumonge. Objectif : empêcher des colonnes de véhicules en provenance de Bujumbura, essentiellement des membres de l’ADC-Ikibiri, de participer à une fête organisée au stade de Rumonge par le Cndd pour le 18ème anniversaire de sa création.
Le chef de poste de la localité, sans plus de précision, indique que la mesure est venue d’en haut.

Les jeunes membres de l’ADC-Ikibiri sont empêchés par leurs leaders d’user de la violence, mais érigent eux aussi des barrières pour empêcher les autres passagers de continuer la route. Finalement, un meeting est organisé sur place et, en milieu d’après-midi, le convoi de l’ADC-Ikibiri décide de retourner à Bujumbura, et la circulation reprend dans les deux sens pour plus de 200 véhicules.

Le lendemain, Edouard Nduwimana, ministre de l’Intérieur, reconnaît dans les médias que c’est lui qui a ordonné la suspension des activités du parti CNDD prévues à Rumonge. Pour le ministre, la coalition ADC-Ikibiri, qu’il qualifie d’illégale, s’est cachée derrière le parti CNDD de Léonard Nyangoma pour organiser des activités en violation de la loi sur les partis politiques. En rappelant que Léonce Ngendakumana, président e l’ADC-Ikibiri, a juré de ne pas reconnaître cette loi ainsi que d’autres.

Un ministre de l’Intérieur trop zélé ?

« Comment le ministre de l’Intérieur peut-il nous traiter de rétifs ? Il s’acharne sur moi parce que je suis le président de l’ADC-Ikibiri. C’est un argument qui lui est facile à expliquer, mais cela ne trompe personne », réagit Léonce Ngendakumana. D’abord, explique-t-il, parce qu’aucune loi n’interdit un parti d’en inviter d’autres pour participer à ses activités, surtout que le ministre de l’Intérieur était au courant de cette activité.
M. Ngendakumana estime que le ministre aurait dû interdire les activités prévues, sans bloquer la route. « Il n’y avait aucune autorité pour nous donner des explications. Juste des policiers, des militaires et des Imbonerakure déclarant avoir reçu d’en haut l’ordre de nous bloquer », raconte-t-il, indigné.

Indignation partagée par le porte-parole du Cndd, François Bizimana : « Indignation partagée par le porte-parole du Cndd, François Bizimana  qui estime que les arguments du ministre ne tiennent pas debout: «  Quand bien même il aurait été mis tardivement au courant de notre activité, il aurait dû en instruire l’administrateur de Rumonge qui nous aurait répondu par écrit, comme nous l’avons fait ».

Au lieu de cela, remarque M. Bizimana, M. Nduwimana a utilisé la police et les Imbonerakure, ce qui n’est pas digne d’un administratif. Pour le porte-parole du Cndd, le ministre aurait pu leur parler avant de prendre une décision : « Cela démontre une absence de dialogue et de recherche d’un compromis. » Il ne comprend pas comment le ministre peut s’offusquer que des invités aux activités du Cndd arborent les couleurs de leur parti respectif, alors que cela ne pose aucun problème aux dirigeants du parti qui a invité. « Tout comme le Cndd-Fdd invite le FPR rwandais, le CCM tanzanien ou le parti communiste chinois lors de certaines de ses activités. »

<doc5952|right>Genève ne signifie pas désordre …

Pour le président de l’ADC-Ikibiri, c’est une simple provocation du ministre de l’Intérieur qui s’acharne à ne pas reconnaître une alliance qui existe selon la Constitution et la loi sur les partis politiques. M.Ngendakumana conseille au ministre de l’Intérieur de dire clairement ce qu’il veut qu’ils fassent. Sinon, il demande au président de le révoquer purement et simplement. D’après M. Bizimana, ce que fait le ministre Nduwimana engage le gouvernement et démontre un manque de cohésion de ses membres et ne s’inscrit pas dans la droite ligne des promesses faites à Genève pour favoriser le dialogue.

Philippe Nzobonariba, secrétaire général et porte-parole du gouvernement, rétorque que les engagements de Genève ne signifient pas que les partis politiques et la société civile peuvent dorénavant violer la loi qu’ils se sont engagés à respecter et créer le chaos. « Quand on bloque les routes, le devoir du gouvernement est de réagir en prenant les décisions adéquates. On ne peut pas annoncer une activité et en faire une autre, à moins que ce ne soit une volonté expresse de provoquer », précise M. Nzobonariba.

| Il est vrai que la décision d’Edouard Ndikumana contraste avec la promesse faite à Genève par le gouvernement du Burundi de garantir la liberté d’expression de l’opposition. Mais il est tout aussi regrettable que le Cndd ait demandé la permission de tenir une réunion alors qu’il projetait de fêter un anniversaire, ce qui rend compréhensible la réaction du pouvoir. En effet, quand on connaît l’acharnement du gouvernement de combattre l’opposition, il va de soi qu’il n’allait pas laisser l’ADC-Ikibiri se réunir à Rumonge, le sud étant le fief du Cndd. Sans oublier que son président, Léonard Nyangoma, est connu pour être le précurseur du mouvement rebelle au Burundi. En outre, les récents déboires de Chevineau Mugwengezo dans la même commune sont assez explicites.
Léonce Ngendakumana croit que le ministre Nduwimana n’en fait qu’à sa tête en mettant les bâtons dans les roues de l’ADC-Ikibiri. Ce n’est pas sûr. Il doit obéir aux ordres de son patron, plus que jamais décidé à rester sur le fauteuil présidentiel en 2015. La seule menace contre cette ambition, ne peut provenir que de l’ADC. D’où les arrestations continues des membres de cette coalition pour plusieurs motifs et/ou leur intimidation par les Imbonerakure pour qu’ils adhèrent de force au parti présidentiel. |

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