Face à toute crise, ceux qui interviennent pour apaiser et contribuer au retour de la paix invitent les belligérants ou les partis en conflit à dialoguer. C’est de bonne guerre, si j’ose dire.
Mais il arrive, comme c’est le cas aujourd’hui chez nous, que le dialogue se doive d’être précédé de certains aménagements. Si le pays est en ébullition, c’est principalement à cause des facteurs suivants :
– Il y a volonté délibérée du chef de l’état sortant à vouloir faire fi des textes fondamentaux du pays en se représentant pour un mandat de trop ;
– Il y a un armement avéré et systématique de la milice Imbonerakure à travers le pays ;
– Il y a une attitude criminelle de la police qui réprime toute forme de manifestation qui n’est pas du pouvoir ou non affiliée à celui-ci ;
– Il y a une inféodation du système judiciaire à l’exécutif et une ignorance suspecte de certains dossiers judiciaires délicats;
– Il y a une immixtion des services de renseignement dans la gestion policière de l’état et dans l’exercice du droit revenant aux procureurs et aux magistrats;
– Il y a l’exercice d’un pouvoir de terreur, de torture et d’assassinats qui paralyse toute activité citoyenne des journalistes, des représentants de la société civile et des opposants politiques.
Un véritable dialogue ne peut donc commencer sans que ces obstacles ne soient levés. Sinon nous retournons à l’époque de la « Convention de Gouvernement » durant laquelle plus on était nocif, meilleure était la place réservée au gouvernement. Le chef de l’état avait été assassiné, rien n’était fait pour connaître les auteurs et les juger. Des massacres « à caractère génocidaire » et ethnique étaient perpétrés, mais aucune instruction judiciaire n’était diligentée. Pourtant, les politiciens « dialoguaient » et se partageaient les postes à la tête du pays. Face à ce vide institutionnel créé par des apprentis-médiateurs, le pays a sombré dans une guerre civile des plus atroces. Sans Nyerere et Mandela qui ont mis en place le processus d’Arusha qui, lui, a travaillé sur des principes de véritable démocratie les Burundais seraient encore en guerre aujourd’hui.
Aujourd’hui, remettre en cause une paix chèrement acquise grâce aux Accords d’Arusha serait irresponsable et criminel. Toute intervention devrait agir pour forcer toute personne, tout groupe d’intérêts impliqués dans cette crise à respecter ce principe sacro-saint : respecter les Accords d’Arusha et la Constitution qui s’en est dégagée. Toute autre voie est une équipée sans issue quant à l’application et surtout fatale pour le Burundi.