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Air Burundi – Sobugea : qui profite qui ?

05/05/2013 Commentaires fermés sur Air Burundi – Sobugea : qui profite qui ?

Bien que la compagnie Air Burundi dispose de 90% des actions dans la Sobugea (Société Burundaise de Gestion Aéroportuaire), le personnel de cette société refuse qu’elle soit associée dans le processus de privatisation d’Air Burundi. Il avance que ce sont deux entités juridiquement distinctes et appelle les élus du peuple à la vigilance.

<doc6006|left>Dans une lettre du 25 septembre 2012, le 1er vice-président de la République transmet au parlement l’ordre du jour de la session parlementaire d’octobre. La société Air Burundi/Sobugea figure sur la liste des quinze entreprises à privatiser dans les cinq prochaines années.

Selon Thérence Mushano, 1er secrétaire du syndicat des travailleurs de la SOBUGEA, le projet de loi présenté par le gouvernement contient beaucoup d’irrégularités. D’abord, explique M. Mushano, la société Air-Burundi/Sobugea est inexistante : « La première est une entreprise publique créée en 1975, régie par le décret no 100/160 du 5 septembre 1997 tandis que la seconde est née en 1981 et régie par les statuts du 12 mars 2008. »

Dans l’exposé des motifs du projet de loi sur cette privatisation, il est mentionné que la compagnie Air Burundi compte actuellement 90 employés et la Sobugea 150 agents. « C’est archi-faux puisque, on est à 264 », fait-il remarquer. Selon lui, en droit commercial, une société mixte est une société de droit privé. Il se demande si cette confusion a été entretenue par erreur ou par ignorance.
Le 1er secrétaire du syndicat des travailleurs de la Sobugea constate que même si privatisation il y a, ces deux entreprises devraient être prises séparément : « Chacune d’elles possède son patrimoine et son statut. Contrairement à ce qui est écrit dans l’exposé des motifs, toute réforme concernant Air Burundi ne concerne pas la Sobugea. »

Ce syndicaliste déclare qu’Air Burundi abuse de sa position pour tricher et violer sciemment les procédures : « C’est l’assemblée générale des actionnaires (Air Burundi, Sabena et Socabu) qui peut décider du sort de la Sobugea et non le conseil des ministres. » Or, indique le 1er secrétaire du syndicat des travailleurs de la Sobugea, Air Burundi n’a pas encore émis son vœu à ses partenaires.
Thérence Mushano estime que c’est absurde que le personnel de la Sobugea, faisant partie de l’entreprise, ne soit pas associé : « Le sort de notre entreprise nous concerne et nous devons suivre le processus de sa privatisation en amont comme en aval.»
Enfin, Thérence Mushano souligne que l’initiative de proposer des mesures de restructuration et de redressement de la compagnie aérienne nationale est motivée par la situation précaire dans laquelle elle vit : « Ses avions viennent de faire trois ans cloués au sol parce qu’il n’a pas su les entretenir et par conséquent Air Burundi s’est vu retirer sa licence de vol. »

Selon M. Mushano, une enquête a montré qu’Air Burundi est incapable de s’autofinancer. Pour boucher ses trous, le syndicaliste affirme qu’Air Burundi puise le maximum de ses dividendes dans la SOBUGEA en tant qu’actionnaire à 90%.
« Quand un arbre n’a plus de racines pour puiser la sève, il ne peut pas faire une symbiose avec un autre arbre dont la santé est encore bonne», note Thérence Mushano, 1er secrétaire du syndicat des travailleurs de la SOBUGEA.
Il demande au gouvernement d’opérer un choix douloureux en faveur de la Sobugea pour sa souveraineté, sa stratégie et son utilité : « On peut se passer des avions d’Air Burundi mais on ne peut pas se passer des infrastructures aéroportuaires ou des équipements de l’assistance des avions.» En privatisant Air Burundi/ Sobugea, renchérit-il, on aura sauvé Air Burundi et en même temps condamné les deux sociétés à disparaître.

« Qu’Air Burundi soit cloué au sol, les activités de la Sobugea continuent »
Alexandre Nakumuryango, commissaire général du Service chargé des Entreprises publiques, avoue que c’est son service qui a proposé l’exposé des motifs au gouvernement. Il reconnaît qu’Air Burundi est une entreprise publique et que la Sobugea est une société mixte dont 90% des actions sont détenues par Air Burundi : « Conséquemment, toute restructuration d’Air Burundi concerne sa grande filiale Sobugea.» Il réfute l’abus de pouvoir de la part d’Air Burundi : « C’est la Sobugea qui fait vivre en grande partie Air Burundi. Si la première n’existait pas, la seconde ne fonctionnerait pas. »

D’après M. Nakumuryango, pour redresser Air Burundi, il faut chercher une compagnie aérienne qui soit intéressée par les services de la Sobugea. Toutefois, il constate que cela ne signifie pas qu’elle va fermer ses portes : « Le personnel de la Sobugea ne devrait pas s’inquiéter outre mesure. Aucune autorité burundaise n’a intérêt à ce que cette entreprise soit en difficulté. » Il assure que la préoccupation de l’Etat, c’est que ces deux entreprises puissent bien travailler, et surtout qu’Air Burundi fonctionne de nouveau: « C’est anormal qu’un pays indépendant depuis une cinquantaine d’années ne dispose pas d’une compagnie aérienne nationale fonctionnelle. »
Le Commissaire général indique qu’il faut qu’Air Burundi trouve un partenaire puissant et performant. Et de tranquilliser le personnel de la Sobugea en les invitant à attendre des études qui seront faites pour analyser la faisabilité de cette privatisation : « Elles permettront de déterminer les relations qui vont lier Air Burundi restructurée et la Sobugea, sa filiale. »

La Sobugea, un appât pour attirer les partenaires

Des observateurs avisés conseillent au personnel de la Sobugea d’adopter un profil bas car il constitue la personne morale qui peut être remplacée quand différents actionnaires veulent, mais dans le strict respect de la loi. L’Etat du Burundi, précisent-ils, est propriétaire de la Sobugea puisque celle-ci ne peut pas vivre aussi sans Air Burundi. Qu’il le veuille ou non, le personnel doit savoir que la Sobugea constitue un appât pour attirer d’autres partenaires. Et de proposer à l’Etat burundais de vendre Air Burundi, « qui ne gère que des problèmes aujourd’hui », à d’autres compagnies puissantes comme c’est le cas au Kenya : « Air France est l’actionnaire principal de Kenya Airways. » Ces observateurs appellent les différents acteurs dans ce conflit à chercher ensemble une voix de sortie viable pour tous.

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