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Politique

Afrique : la démocratie en panne. La question des minorités posée

06/06/2013 Commentaires fermés sur Afrique : la démocratie en panne. La question des minorités posée
En marge des festivités des 50 ans de l’Union Africaine à Addis Abeba, rencontre des chefs d’État africains dans le cadre du Comité d’orientation de l’Agence de développement de l’Union africaine (Nepad) ©Nepad
En marge des festivités des 50 ans de l’Union Africaine à Addis Abeba, rencontre des chefs d’État africains dans le cadre du Comité d’orientation de l’Agence de développement de l’Union africaine (Nepad) ©Nepad

« In African tradition, minority was not to be crushed by the majority … » Mandela, Long Walk to Freedom.

Dans la tradition africaine, la minorité ne se faisait pas écraser par la majorité. Toute la problématique de la démocratie en Afrique provient de cette pertinente observation de l’homme politique sud-africain, devenu une véritable icône planétaire, pour sa lutte contre l’Apartheid.

Les intellectuels africains, et particulièrement les politologues et philosophes, sont interpelés pour réinventer la démocratie africaine à laquelle il est urgent de trouver des solutions idoines à la fois sur la base de nos traditions et des valeurs universelles. Au modèle européocentrique conçu par les philosophes du Siècle des Lumières comme Hobbes, Locke, Montesquieu et bien d’autres, il va falloir que les Africains s’inventent un modèle original de démocratie inclusive.

Quel constat actuel ?

Aussi bien au Nord qu’au Sud-Sahara, la démocratie est en panne en Afrique. Les pays traversent une période extrêmement tendue : élections fraudées et manipulées, suivies de violences, absence de vision politique aussi bien des vainqueurs que des vaincus contestataires qui n’acceptent pas la défaite. Les institutions politiques africaines reposent pour la plupart sur du sable mouvant que le moindre soubresaut met littéralement à terre. L’exemple du Mali est à cet égard édifiant et loin d’être unique : voilà un État dont on disait il y a si peu qu’il était un modèle de démocratie et de gouvernance politique exemplaires en Afrique mais qui a fondu en quelques semaines lors du coup d’Etat récent. Lequel a donné la voie aux islamistes radicaux de s’emparer sans coup férir de la moitié nord du pays. La coalition militaire africaine de CEDEAO appuyée par l’armée française va sans doute venir à bout de ces islamistes sans pour autant couper le mal à la racine des maux qui affligent le continent africain.

Les causes sont nombreuses mais on peut en dénombrer les principales qui sont notamment liées à l’inégalité scandaleuse dans la redistribution des richesses. Les partis politiques ne rivalisent pas d’ardeur pour gagner les élections afin de mettre en place un programme politique et économique destiné à créer et redistribuer équitablement les richesses de ce continent potentiellement très riche. Le but ultime est d’obtenir la victoire, – arrachée souvent par les violences des pouvoirs souvent en place et de l’opposition-, en attendant qu’ils soient chassés à leur tour. Il s’agit de rafler la mise par la corruption et d’autres moyens douteux en vue de contenter et récompenser les militants et laisser les vaincus sur le carreau. D’où un sentiment de rancœur et de vengeance permanent en attendant les prochaines échéances électorales. Un cercle vicieux.

La question des minorités …
La vraie cause des dysfonctionnements de nos démocraties réside dans l’incapacité à intégrer les vaincus et autres composantes ethniques minoritaires dans l’allocation des ressources, à travers notamment les ressources provenant des richesses minières et pétrolières et le budget général de l’Etat. Ce dernier est considéré comme la mère nourricière à laquelle ont accès les favoris du pouvoir qui affichent souvent une insolente et insoutenable arrogance vis-à-vis des millions de citoyens qui peinent à nouer les deux bouts du mois.

Et de se poser la question, comme l’observe le célèbre biographe et journaliste Jean Lacouture, sur cette capacité d’une poignée d’hommes et de femmes à s’approprier un pouvoir sans limites : « Quoi de plus mystérieux que le pouvoir ? Cette faculté qu’a un homme, ou un petit nombre, de plier le plus grand nombre à sa loi, qui n’est pas la loi. Rousseau s’en étonnait déjà».

La perspective du doublement de la population de l’Afrique d’ici l’horizon 2050, passant de 1 à 2 milliards d’habitants posera d’immenses défis aux dirigeants. Il s’agira de nourrir et de créer des centaines de millions d’emplois à une population jeune et urbanisée qui ne se contentera plus de vagues promesses de la classe politique. Les récents soubresauts en Afrique du Nord ne sont que le prélude de ce qui pourrait se passer dans un proche avenir dans nos pays s’il n’y a pas de sursaut salvateur de toutes les couches de la société entière pour trouver et appliquer des solutions appropriées aux mutations en cours.
Il va donc falloir réinventer sans tarder une gouvernance politique et économique basée sur une direction politique collégiale qui saura intégrer toutes les composantes de la société. Nous faisons donc appel à nos plus illustres intellectuels éparpillés aux quatre coins du monde pour sortir l’Afrique de l’ornière tracée par des décennies de dictature dont nous avons la peine à nous débarrasser définitivement.

Si le principe démocratique d’une voix homme/femme est sacré, il faudra cependant trouver des correctifs pour que les minorités puissent figurer dans les institutions politiques pour protéger leurs droits sans empêcher ni paralyser la majorité de gouverner, suivant un programme consensuel basé notamment sur la redistribution équitable des richesses nationales.
Avec force discours, les dirigeants africains célèbrent en 2013 le 50ème anniversaire de la naissance de l’OUA – Organisation de l’Unité Africaine – devenue ultérieurement UA-Union Africaine. C’est l’occasion pour les Africains de s’interroger sur l’avenir de notre continent en invitant les citoyens à repenser et à débattre de fond en comble le fondement de leurs institutions politiques pour un avenir meilleur des générations présentes et futures.

A cet égard, le discours en 2007 de Barack Obama à Accra serait le point de départ pour un renouveau du continent en mettant l’accent sur le renforcement des institutions politiques plutôt que sur le charisme personnel des dirigeants.

De toute façon, ces derniers sont assis sur un siège éjectable et finissent tôt ou tard par être chassés du pouvoir, souvent par des moyens violents, pour les avoir sclérosées ou dévoyées. A quoi bon s’accrocher frileusement au pouvoir pour en être écarté sans gloire ?
La gouvernance économique s’en trouve également affectée à cause de la faiblesse des systèmes judiciaires et de la corruption qui affectent négativement le développement économique et social de nos pays. Qui sont obligés de compter sur une assistance financière extérieure qui pourrait être suppléée ou même remplacée graduellement par des investissements directs étrangers plus significatifs. Sans oublier de mentionner les immenses potentialités des ressources financières en provenance des diverses diasporas nationales qui ne demandent qu’à être investies sur leur continent. Cela suppose que les conditions d’accueil pour les capitaux devront être améliorées constamment.

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