Justin Nyakabeto, expulsé au quartier 5 n°48-49, demande à la Banque Nationale pour le Développement Economique (BNDE), son employeur, de sortir de son silence pour s’exprimer sur son cas. Mais celle-ci estime qu’il ne lui appartient pas d’authentifier les documents administratifs.
2 mai 2013. Justin Nyakabeto reçoit le dernier avertissement de la Commission Nationale Terres et autres Biens (CNTB). Celle-ci lui demande de quitter dans les plus brefs délais la maison sise quartier 5 n°48-49 dont il se réclame toujours propriétaire. Il doit la restituer à la famille Mpitabakana Stanislas qui dit avoir été spoliée lors des évènements sanglants de 1972. Le même jour, M. Nyakabeto s’adresse à la BNDE, son employeur. Il estime qu’elle est bien placée pour défendre son cas pour deux raisons : d’abord parce que la maison litigieuse a été enregistrée au nom de la BNDE pendant toute la période de remboursement du crédit d’un million quatre cents mille francs burundais (1 400 000Fbu)qu’il avait contracté à l’achat de cette maison. Ensuite, Justin Nyakabeto avance que les documents fournis par Bernard Kayibigi, vendeur, ont été vérifiés par les services de la BNDE.
« La maison n’a jamais été enregistrée au nom de notre institution »
Le secrétaire général de la BNDE nie toute responsabilité : « Justin Nyakabeto a consenti provisoirement au transfert, au profit de la BNDE, du droit qu’il détenait sur la maison à titre de garantie de remboursement du crédit. » Le déblocage des fonds, selon lui, étant conditionné à la réalisation de cette formalité. Le numéro deux de la BNDE signale que M. Nyakabeto a présenté la déclaration de vente notariée entre lui et Bernard Kayibigi, le vendeur et le contrat de cession notarié également. En outre, il indique que la BNDE a conditionné le déblocage des fonds par la réception de la part du service des affaires foncières du certificat d’inscription ou de transfert du droit foncier : « Ces documents faisaient foi jusqu’à preuve du contraire. Une fois que les services compétents y apposent leurs sceaux, ils étaient présumés authentiques.»
La BNDE insiste sur le fait que l’étude a été faite sur base des documents présentés par le client lui-même, c’est-à-dire M. Nyakabeto : « Le dossier de demande de crédit a été analysé conformément aux procédures et règles appliquées pour tous les clients et crédits du même type. »Cette institution réfute son implication de près ou de loin dans cette affaire puisque le crédit a été totalement apuré.
« Nous sommes prêts à défendre notre cause »
Yvonne Nahimana, l’une des filles de Bernard Kayibigi, est juriste de formation. Elle réplique: « Quand il y a un doute sur des documents notariés, c’est le Ministère Public qui se saisit du cas et mène des enquêtes qu’il va transmettre à la juridiction compétente.»
Mme Nahimana revient également sur les zones d’ombre soulevées dans la dernière publication du journal Iwacu. Elle estime que la vente entre Mme Immaculée Ntakatarusha et Pierre Bizimana est légale : « Nulle part dans le Code civil n’est mentionné que le contrat de vente nécessite la présence de témoins. »
Elle explique également pourquoi il n’y a jamais eu de transfert entre son oncle et Mme Ntakatarusha : « Ils étaient en confiance et le transfert ne s’avérait pas urgent parce qu’il fallait réunir encore beaucoup de documents.»De surcroît, cette mère de quatre enfants fait remarquer que son oncle est mort quelques mois après l’achat.
Affaire close ?
Par contre, Yvonne Nahimana estime que si Mme Ntakatarusha se sentait réellement lésée, elle aurait opposé au service des titres fonciers le transfert de la maison à Bernard Kayibigi, son père (zn charge de l’héritage de Pierre Bizimana après sa mort, ndlr).
Alors que la CNTB estime que l’affaire est désormais entre Justin Nyakabeto et la famille Kayibigi, Mme Yvonne Nahimana n’est pas de cet avis : « Mme Ntakatarusha a vendu la maison à mon oncle. En témoigne le crédit qu’il a aussi contracté à la BCB le 30 juin 1972. Il achètera la maison le 24 octobre 1972. » Et d’avertir la famille Mpitabakana : « Elle doit prévenir les ayants droits de Pierre Bizimana de toute éviction conformément à l’article 279 du code civil de 1888 qui stipule que ‘ le vendeur est tenu d’expliquer ce à quoi il s’oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s’interprète contre le vendeur’. »