Dimanche 30 juin 2024

Politique

Abdelouahhab Makhtari : « Avec son potentiel, le Burundi pourrait être un Singapour en Afrique »

27/06/2024 4
Abdelouahhab Makhtari : « Avec son potentiel, le Burundi pourrait être un Singapour en Afrique »

Avec comme cheval de bataille la coopération sud-sud, le Maroc se dit engagé à nouer des partenariats gagnant-gagnant avec le Burundi. Selon le chef de mission à l’Ambassade du Royaume du Maroc à Bujumbura, le Burundi regorge des ressources et des potentialités importantes dans pas mal de secteurs. Il s’est confié à Iwacu.

M. le chef de mission à l’Ambassade du Royaume du Maroc à Bujumbura, vous êtes diplomate mais avant tout économiste, il n’y a pas mal d’initiatives dans lesquelles vous entendez-vous impliquer, lesquelles ?

Le Burundi est un pays ami et stratégique pour le Maroc. Diplomatiquement parlant, le Burundi soutient la marocanité du Sahara, il a ouvert un consulat général à Laâyoune au sud du pays et depuis lors la coopération s’est renforcée davantage, il y avait une feuille de route de 2020-2024, elle contient un sous ensemble d’actions concrètes qui reflète la substance de notre coopération sud-sud conduite par Sa Majesté Mohammed VI (Que Dieu l’assiste).

Le Maroc est engagé dans le renforcement des capacités, dans la coopération technique, dans l’offre des bourses, cette année, le Maroc en a donné 130 pour les étudiants burundais. Ces bourses concernent les branches techniques comme la médecine, l’architecture, l’ingénierie, le cycle master et post master.

C’est l’AMCI, l’Agence marocaine pour la coopération internationale qui accueille ces étudiants, les oriente dès leur arrivée au Maroc jusqu’à la fin de leur parcours universitaire.

Il y a même des Burundais qui s’installent au Maroc, ils ont déjà décroché un contrat de travail, ils ont une carte de séjour. Sa Majesté a déjà donné l’instruction pour que la situation des émigrés soit régularisée. Et ils bénéficient de plusieurs avantages dans les domaines sociaux comme la santé, l’éduction, au même pied d’égalité que les Marocains.

Et c’est dans ce contexte, que notre Ambassade au Burundi est engagée à renforcer cette coopération, et de participer dans toutes les initiatives lancées par le gouvernement burundais via le ministère des Affaires étrangère et de la Coopération au Développement.

La dernière fois j’ai pris part à la conférence des bailleurs de fonds, j’ai participé dans l’organisation de la semaine économique du Burundi au Maroc.

Il y avait une grande délégation burundaise qui a participé à plusieurs réunions avec notamment la CGEM, la Confédération générale des entrepreneures marocains, avec les représentants de l’OCP, l’Office chérifien des phosphates, engagé dans les fertilisants.

Il y a eu également des réunions avec les responsables des marchés interbancaires marocains, des délégués de l’AMDIE, l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations, il y a eu aussi des rencontres avec des entrepreneurs.

Et ces derniers se sont engagés à créer un Conseil d’affaires, une sorte de Chambre de commerce commune, pour saisir des opportunités d’affaires offertes de part et d’autre, mais aussi faciliter les missions de prospection afin de cibler les secteurs prioritaires.

Vous parlez de prospections, il y a toute un éventail de possibilités, quels sont les secteurs qui vous intéressent déjà ?

Je dois d’abord saluer l’engagement du gouvernement burundais pour la mise en place de plusieurs réformes, il y a par exemple la promulgation du Code minier en novembre dernier, il offre beaucoup d’avantages pour les investisseurs étrangers.

Et nous sommes engagés à faire des partenariats mixtes voire des sociétés mixtes avec des opérateurs burundais. Et tout cela c’est dans le cadre de la coopération sud-sud, dans le cadre des contrats gagnant-gagnant.

Et c’est pour cette raison que le président de la Chambre de commerce, Olivier Suguru, s’était également déplacé au Maroc dans le cadre de cette semaine de la promotion économique.

Il a partagé avec ses homologues et ceux du secteur minier des opportunités à saisir dans ce domaine qui est stratégique. Les mines constituent un secteur prioritaire pour le Burundi et pour les opérateurs marocains.

Il y a également comme priorité, le secteur touristique. Il y a un grand potentiel dans ce pays : il y a des monuments, des sites historiques, la source du Nil, il y a l’artisanat burundais et surtout le lac Tanganyika.

Il faut les internationaliser et en faire des destinations. Avec le potentiel que représente ce lac, le Burundi peut devenir une autre destination au même titre que Les Maldives, il faut y croire et y travailler.

Le Burundi regorge de produits à fort potentiel : il y a le café et le Maroc en importe des tonnes. C’est un café de qualité et de renommé. Nous essayons de maximiser nos efforts pour importer et exporter afin de mouvementer la balance commerciale vers les deux pays.

Le thé burundais est aussi un atout et l’Office burundais du thé a fait des réformes pour valoriser la chaîne logistique du produit et nous sommes là pour valoriser la capacité, le potentiel des produits burundais grâce à des partenariats gagnant-gagnant.

Il y a également un potentiel au niveau de l’artisanat, il y a des œuvres qui méritent d’être internationalisés, connus au niveau régional et mondial. Et là il faut travailler sur le marketing, les exposer par exemple au Maroc, parce que mon pays totalise annuellement environ 14,5 millions de touristes.

Il faut créer des partenariats des tour-opérateurs ou entre les gens qui font le tourisme en Afrique, faire des contrats inter agences entre les tour-opérateurs marocains et burundais.

Une autre priorité, c’est le secteur des infrastructures. En Afrique, le Burundi est classé 14ème au niveau des routes, c’est un bon atout. Là aussi il y a un engagement des entreprises marocaines de classe C, c’est du ’’high level’’, pour la construction des routes, lier les routes entre l’intérieur et Bujumbura et Gitega.

Un autre secteur où il y a des possibilités de coopération : c’est l’assainissement. Le Maroc est classé n°1 en Afrique au niveau de la gestion des assainissements et de l’eau potable. Et pourquoi ne pas faire des partenariats avec la Regideso pour la production de l’électricité, pour la gestion de l’assainissement et pour offrir de l’eau potable à la population avec une grande masse conséquente ?

Il y a aussi le marché interbancaire et le Maroc est déjà présent sur ce terrain et il serait intéressant de bien diversifier cela vers le marché des assurances parce qu’ils sont liés. Il y a toujours des interdépendances entre les deux secteurs. Les assureurs suivent les banquiers et les banquiers suivent les assureurs.

Voilà les grands secteurs prioritaires et bien sûr, les opérateurs marocains sont à l’écoute pour pouvoir nouer des partenariats gagnant-gagnant avec les hommes d’affaires burundais.

Le Maroc produit du sucre, est-ce qu’il n’y a pas de possibilité de partenariat avec la Sosumo ?

Le Maroc a une grande société, la COSUMAR, la Compagnie marocaine de sucrerie et de raffinage. Elle a déjà créé des usines en Afrique. Il faudrait penser à des partenariats avec le Burundi. Le Maroc a une grande production de sucre de betterave de qualité. Il y a possibilité de faire des exportations vers le Burundi. Il faut juste travailler sur la chaîne logistique. Le sucre aussi est un domaine prioritaire.

Il faudrait envisager de travailler sur les produits exotiques comme l’avocat burundais qui est de qualité, et penser à faire des importations et des exportations directes. C’est vrai que c’est un produit périssable mais il faut mettre un accent sur la chaîne logistique. Et ce n’est pas tout, au Burundi, il y a toute une gamme de fruits qui n’existe pas au Maroc comme l’avocat, la banane, les ananas, le maracuja, … De l’autre côté nous avons le raisin, la vigne, d’autres qualités d’orange, … Pourquoi ne pas faire des jumelages ? Il y a plein d’articles, il faut juste commencer les opérations.

A vous entendre vous êtes un défenseur de la Coopération sud-sud ?

C’est un principe fédérateur pour Sa Majesté, depuis son intronisation, il a effectué pas mal de visites dans des pays africains, c’est un grand panafricaniste et il essaie de conclure des partenariats gagnant-gagnant aussi bien pour les opérateurs marocains et que d’autres investisseurs africains.

C’est pour cette raison que le Maroc est le premier investisseur africain en Afrique avec plus de 4.000 milliards de dollars d’investissement. Nous sommes leader dans les télécommunications, dans le marché bancaire, dans les assurances, dans les énergies renouvelables, nous avons la première centrale solaire thermodynamique au monde, la station Noor Ouarzazate.

Et nous sommes prêts d’exporter cette expertise à ce pays ami et frère. Le Burundi a un taux d’ensoleillement très élevé, il faut aller dans la diversification de la production énergétique.

Le gouvernement burundais a déjà lancé des appels d’offres, il a déjà opté pour cette politique et les opérateurs marocains sont prêts pour accompagner le gouvernement burundais dans ces efforts-là. Les énergies constituent un domaine prioritaire

Tout cela entre dans la coopération sud-sud. Elle se résume en trois axes : il y a la coopération bilatérale, tous secteurs confondus. Le deuxième axe, c’est la coopération tripartite, il y a des agences internationales qui s’installent au Maroc et qui appellent les confrères africains pour se former, avoir des idées au Maroc dans des domaines spécialisés. Le troisième axe est d’aller dans la conclusion des partenariats gagnant-gagnant, des consortiums, des joint-ventures internationales, des GVI (Global Value Investment), des sociétés mixtes, et là on est libre dans le choix de la formule juridique. Tout dépend du contexte et des circonstances, des besoins des deux pays.

Le Maroc s’implante sur tout le continent et surtout prend ses marques en l’Afrique de l’Est, pourquoi ce choix ?

Le Maroc est présent dans tout le continent Africain, mais sa prédilection c’est l’Afrique de l’est, parce que c’est sa profondeur géographique. D’autres pays ont une profondeur géographique vers l’ouest ou bien le nord, ou bien vers l’est, l’Afrique orientale constitue notre profondeur géographique dans le continent.

Et c’est pour cette raison que nous sommes dans le marché bancaire, le marché des énergies, les investissements sont diversifiés, tout a commencé par les télécommunications, aujourd’hui, le Maroc exporte même les produits agricoles.

Les camions marocains arrivent jusqu’à maintenant à la profondeur de quelques pays africains, jusque vers le Gabon. La RAM, la Royal Air Maroc a augmenté son armada jusqu’à 200 avions, l’objectif est de faire des cargos commerciaux pour exporter les produits marocains vers tout le continent africain.

Le Maroc est compétitif dans pas mal de secteurs comme le textile, l’exportation de certains produits agricoles, les fruits, … Nous sommes présents dans l’électro-ménager, la production de puces électroniques et tout ce qui est des technologiques, il y a des laptops made in Morocco.

Le Maroc est compétitif dans tout ce qui est énergétiques, les plaques solaires où il occupe une place de leader en Afrique. Dans la production des fertilisants, le Maroc joue un rôle très important.

Nous sommes des Africains qui investissent en Afrique, qui croient en l’Afrique avec une volonté d’aller ensemble de l’avant dans la production et l’investissement.

C’est pour cette raison que beaucoup de missions de prospection ont été menées en Afrique pour cibler tous les domaines susceptibles de faire objet de partenariats mixtes avec le Maroc.

Propos recueillis par Abbas Mbazumutima

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. Georges

    Opportunités si zo zibuze. Nous avons juste un problème de leadership. Nk’ivyo vyose avuze birumvikana kandi kubikora nta kintu kinini bisaba.

    Gusa abo nzi bari aho bo ico baca babona ni:

    -Mbega yemwe duhe nde ako kazi? Tuzungukamwo iki kiyongera ku mifuko yacu no muri caisse yacu? Kwiyumvira igihugu wapi!
    -Ou alors reke dushireho une entité nshasha pour gérer tout ça hanyuma duce tuyishinga umuntu ari proche kugira tuze tuvyungukiremwo bikwiye.
    -Etc.

    Indwara dufise ni iyo sinon guteza imbere u Burundi birashoboka. L’ikawa, l’icayi, les mavoka et les autres ivyamwa, les imboga, les inkoko, les inyama z’ingurube, etc. On pourrait facilement développer ces filières kandi tugashora ku buryo les devises zitosubira no kuba ingorane. Hanyuma tourisme na yo nyene ni co kimwe. Ni ukubirekera ababishoboye(les tours operators) ntibivangemwo avec leur sport préféré(la corruption) maze mukaraba ukuntu Tanganyika yonyene itwinjiriza amafaranga. Aho ntituvuze ibindi vyinshi dufise.

    Mais tout ça avec un leadership mbona ubu, sinzi!

  2. Anonyme

    C’est très bien la coopération sud-sud, mais il faut que le Maroc se comporte correctement dans le business avec ses frères africains. Cette publication d’Alain Foka donne la lumière sur ce que peut être une coopération biaisée et ses conséquences. https://www.youtube.com/watch?v=jJCa6w5VrJo

    Peut on envisager une réelle indépendance économique sans champions nationaux ? NON. Mais Comment protéger les champions locaux, les entreprises africaines des grands groupes internationaux ? Le Maroc doit il être perçu comme un leader panafricain?

  3. Kibinakanwa

    Je garde dans ce que le marocain a dit la promotion des cultures fruitières: Avocat, bananes, amabungo n’amatunda.
    Explorez ce filon.
    En dehors de l’avocat; les 3 autres fruits sont disponibles en une année.
    I faut juste faire un bon encadremment

  4. Kabingo dora

    C’est n’importe quoi cet interview. Pas pour l’interviewer ni l’interviewé , mais pour le fond .
    Le café et le thé on en a ! Mais il faut mettre en place les mesures pour leur entretien . Il n y a pas de miracle , tout se cherche et l’effort finit par avoir des résultats

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