L’absence de toilettes au sanctuaire marial de Mugera qui accueille des dizaines de milliers de pèlerins le 15 août est une catastrophe hygiénique. La colline reste souillée durant de nombreuses semaines.
Comme tous les 15 août de chaque année, à Mugera, le sanctuaire dédié à la Sainte Vierge a tenu ses promesses. Dès la veille, le 14, les fidèles sont venus des quatre coins du Burundi pour passer une nuit entière de prière au pied d’une belle statue de la Vierge Marie encastrée dans une grotte taillée dans le roc de la colline.
Mugera, le 15 août, est le rendez-vous des croyants qui ont une dévotion pour la mère du Christ. Le site a été créé il y a une cinquantaine d’années. Dans l’histoire, Mugera colline royale, était sacrée. Malins, les premiers missionnaires s’y sont installés pour échapper aux lances des « pagani » (païens). Sur la colline sacrée, personne n’a osé s’attaquer à ces étranges hommes blancs que même les mânes de Mugera semblaient respecter.
Le sanctuaire, perché sur une colline, domine un paysage magnifique. En contrebas de la colline, la vieille église au style roman, trapue, massive, les bâtiments du séminaire qui a vu défiler une bonne partie de l’élite intellectuelle. Du haut de la colline, on voit dans la vallée, la Ruvubu, majestueuse, qui serpente paresseusement au milieu de champs verts de patates douces.
Sous un ciel tricoté d’étoiles, dans l’attente de la fête de l’Assomption, toute la nuit du 14 août, des dizaines de milliers de fidèles alterneront chants et chapelets. Au petit matin, les fidèles, à pied, en bus, à motos, en grosses jeeps, arrivent, gravissent la montagne dans une nuée de poussière. C’est le grand jour. La grand messe.
Cette année, le deuxième vice-président représente le gouvernement. La messe est concélébrée par une belle brochette de princes de l’Eglise emmenée par l’Archevêque de Gitega, Mgr Simon Ntamwana. Bref, l’Eglise catholique en toute sa splendeur. C’est beau, recueilli, solennel. Voilà pour la belle face de la médaille.
Il faut regarder où vous posez les pieds
L’autre face est moins luisante. Plutôt malodorante. Car sur cette belle colline, au petit matin, il faut regarder où vous posez les pieds. Imaginez la « production » humaine de dizaines de milliers de personnes regroupés sur une colline toute une nuit, sans toilettes. Les pèlerins se soulagent dans la nature. Au petit matin, dans les herbes, derrière chaque bosquet, se dégage une terrible odeur. L’odeur des déjections humaines domine les effluves des encens de l’office dédié à la Vierge. Un habitant des lieux, écœuré, témoigne : « Cette odeur persiste jusqu’aux premières pluies ». On peut aisément imaginer la pollution suite au ruissellement des eaux souillées par les fèces vers la vallée.
L’Eglise catholique devrait creuser de nombreuses toilettes sur la montagne. Elle pourrait faire appel à la bonne volonté des fidèles pour ces travaux. Les évêques et curés devraient faire campagne pour interdire de se soulager dans la nature. Généralement leurs voix sont entendues. Pour que vers la Vierge aimée ne monte que prières et autres magnificat. Pas les odeurs des déjections humaines.