A la loupe
A une époque, on nous racontait des histoires tellement loufoques sur les campagnes électorales. On nous disait que les candidats, à la recherche des voix, allaient jusqu’à promettre aux pauvres « paysans » des hauts plateaux du Mugamba, ou de n’importe quel autre coin de l’intérieur du pays, qu’une fois élus, ils leur « apporteraient jusque chez eux le lac Tanganyika ». Ce sont surement des blagues, mais tout le monde sait que la politique c’est aussi l’art de mentir. De manipuler la population. Pour accéder au pouvoir (et y rester), dans leurs discours, les politiques usent de tous les stratagèmes. Plus grave, à l’ère des réseaux sociaux, qui ont donné la parole à tout le monde, chacun est maintenant un potentiel informateur. Il est de plus en plus difficile de faire le tri entre le vrai du faux.
Heureusement, au fil du temps, le journalisme s’est « adapté » pour mettre à nu tous les artifices et autres subtilités des politiques et leurs communicants et rester dans son rôle : informer.
Une des pratiques émergentes du journalisme est le « fact-checking », ou la vérification des faits pour les francophones. Ce terme est avant tout d’origine anglo-saxonne. Il désigne une forme de traitement journalistique qui vise à examiner et à vérifier les dires d’un responsable politique. L’exactitude d’un fait constitue l’objectif principal du fact checking.« A la loupe », la nouvelle rubrique d’Iwacu a pour objectif d’analyser, décortiquer, recontextualiser et vérifier des faits liés à l’actualité.
Autant que faire se peut, les discours politiques seront passés « à la loupe » pour une vérification méticuleuse des faits, pour que nos lecteurs puissent profiter d’informations non erronées ou de discours non mensongers.
Ainsi, nous avons passé « à la loupe » l’entretien du Président burundais à une télévision locale égyptienne. Le Président Ndayishimiye a évoqué « une surproduction agricole au Burundi en 2020 ». Nous avons analysé à la loupe cette affirmation.
Vous pouvez nous partager les informations erronées que vous lisez ou entendez en nous envoyant un mail sur une adresse sécurisée. Nous nous chargerons de les vérifier. L’anonymat est garanti.
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La rédaction
En 2021, peut-on parler de « surproduction agricole » au Burundi ?
« Il faut que tous les citoyens aient suffisamment à manger et qu’ils aient des revenus pour subvenir à leurs besoins élémentaires, tout cela va être mis en œuvre par le travail en commun, et tous ensemble nous devons réussir, nous sommes dans la mobilisation générale dans la lutte contre la pauvreté. Maintenant j’ai confiance, car j’ai vu que dans les neuf mois que je viens de passer au pouvoir, nous enregistrons déjà des résultats positifs, cela se traduit surtout par la surproduction agricole, nous cherchons maintenant des marchés extérieurs pour écouler nos produits », a dit le président burundais.
1. C’est quoi une « surproduction » ?
D’après plusieurs définitions, la « surproduction » désigne habituellement une situation où la production de biens ou de services dépasse la demande des consommateurs (particuliers, entreprises). La surproduction est normalement génératrice d’une baisse des prix qui entraîne des ajustements de l’offre en ayant des conséquences, non négligeables, sur les entreprises du ou des secteurs concernés.
2. Peut-on parler de « surproduction en 2020» agricole au Burundi ?
Selon Faustin Ndikumana, expert en économie et président du PARCEM (Parole et Action pour le Réveil des Consciences et de l’Évolution des Mentalités), on ne peut parler de surproduction qu’après avoir établi des statistiques des besoins de la population et de la production agricole.
On parle de surproduction quand la production dépasse largement les besoins de la population et ceci doit être déterminé sur une période précise.
«Aussi longtemps que je me souvienne, le Burundi reste déficitaire, nous importons toujours des produits agricoles des autres pays », explique Faustin Ndikumana.
Trois semaines après la visite du président burundais en Egypte, durant laquelle il a tenu ces propos, les statistiques de la production agricole pour l’année 2020 et pour la saison culturale A de 2021 ne sont pas encore disponibles
Le directeur des statistiques du ministère de l’Agriculture et de l’Elevage le confirme, tout en soulignant toutefois que la production a été meilleure pour l’année 2020 comparativement à l’année précédente.
3. A-t-on remarqué une baisse de prix suite à la « surproduction » agricole ?
Selon toujours Faustin Ndikumana, président du PARCEM, la surproduction agricole doit avoir des conséquences et un impact considérable sur l’économie du pays.
Une surproduction devrait avoir des répercussions sur les prix des denrées alimentaires sur le marché. Or, le taux d’inflation général du Burundi selon les données fournies par l’Institut des statistiques et d’études économiques du Burundi (ISTEEBU) est passé de -0,8 en 2019 à 7,5 en février 2021.
Il en est de même pour les denrées alimentaires, principaux produits de l’activité agricole, où leur taux d’inflation, les boissons non alcoolisées et les services de restauration non compris, est passé de -1,6 en janvier 2020 à 12,8 en février 2021 selon toujours l’ISTEEBU.
Conclusion
Non, il n’y a pas eu « surproduction agricole en 2020»
Certes, «la récolte a été vraiment bonne pour l’année 2020 par rapport à 2019, mais dire qu’il y a eu surproduction serait trop dire, on n’en est pas encore là », confirme un haut cadre du ministère de l’Agriculture et de l’Elevage. «Il est paradoxal de dire que nous sommes en surproduction alors que la malnutrition sévit toujours, nous ne pouvons même pas supporter un repas de midi pour nos écoliers», tempère encore Faustin Ndikumana.
Le président du PARCEM invite le gouvernement à accompagner les discours par des actions. Il demande, entre autres, la création des cantines scolaires et la lutte contre la malnutrition qualitativement et quantitativement.
Je suis content de cette rubrique « a la loupe », elle permettra aux differents orateurs politiques ou non de s’ajuster.
Merci Iwacu
Mon point de vue est que l’année 2019 n’est fondamentalement pas différente des années précedentes.
C est juste une variation mineure due a des variations climatiques clémentes.
Donc il n y a pas lieu de pavoiser.
Retroussons plutot les manches et adressons les goulots d étranglement suivants:
1) Faisons de la lutte anti érosive en premier lieu. C’est terrible quand on se promene dans les campagnes burundaises
2) Assurons nous d abord que nos engrais (Pour lesquels tout le monde se plaint) rencontrent des standards internationaux
3) Vérifions nos variétés sélectionnées a L’ISABU. Si on devait comparer les performances d aujourd’hui et d’Hier. Si nous nous comparons avec des pays limitrophes opérant dans les memes conditions . Ou nous classons nous?
4) Nos sols sont extremement acides. Que fait le gouvernement pour aider les paysans a amender ces sols et restaurer leurs fertilité?
Those are really the facts. Et ils sont tetus.
PS: J’ai une formation d’agronome et je cultive mon petit lopin de terres quelque part au Burundi
Le choix des termes de communication des hommes politiques doit être rigoureux. Les portes- paroles reprécisent souvent les termes mal compris.
Bonjour le président a prononcé le mot surproduction pour désigner que la récolte en général a été bonne pour l année. Loin de là de penser que le pays a enregistré la surproduction en bon sens du terme. Pour ce qui est de l inflation pour les denrées alimentaires. Il ya plusieurs facteurs qui influence ça. Notamment les improduits alimentaires importés telle que le blé, le maïs, le sorgho utilisés par brandi. Dire qu il ya une surproduction c est vrai aussi. Car il a eu une production agricole supérieure à l année précédente. Le président n a jamais prononcé que le pays a une autosuffisance alimentaires. Merci et bonne journée
Note du modérateur
Lisez bien ce qu’il a dit et l’article. Merci
Ce serait peut être ideal de retranscrire toute l’interview. Juste dans la partie suivante il explique.
Ibigori ngo ni Ryanawe muBurundi
Bonjour,
Le »fact-checking » ne vise pas seulement à vérifier les dires des responsables politiques. Son domaine de définition est beaucoup plus large que cela. Il déborde largement le champ politique pour s’intéresser à tout fait, tout phénomène qui, du fait de son caractère quelque peu inusité, hors du commun ou inhabituel, demande à être vérifié, recoupé , validé. Exemples de fact checking publié par la version en ligne du quotidien français Libération dans sa rubrique »Checknews »: »des vegans demandent-ils vraiment qu’on cesse de commercialiser des biscuits en forme d’animaux? ». On est vraiment loin du domaine politique dans ce cas de figure.
Note d’Iwacu
Vous avez tout à fait raison. Par la force des choses, au Burundi, on se retrouve souvent à nous « focaliser » sur la politique, mais on devrait « déborder » sur les autres aspects.
Clin d’oeil reçu. Merci
La Rédaction
Merci d’avoir publié mon commentaire