Il est difficile de faire le bilan politique de tout un continent. Contrairement aux idées reçues, l’Afrique n’est pas une ; elle est multiforme et les forces et les contradictions sociopolitiques qui l’animent aux quatre points cardinaux ne sont pas identiques ni toujours liées.
Cependant, on peut relever quelques récurrences et certaines logiques qui dessinent les grands traits du visage continental de cette année 2012. Personnellement, j’en distingue deux sur le plan politique et au niveau économique.
D’entrée de jeu, l’on constate que presque partout les régimes politiques se sont installés et se sont légitimés à travers des processus électoraux plus ou moins crédibles.
La légitimité des pouvoirs africains du Cap au Caire et de Zanzibar à Gorée se veut issue d’une volonté populaire exprimée en toute liberté. Le droit d’expression populaire est un acquis qu’il faut apprécier et surtout défendre pour qu’il ne devienne un phénomène évanescent. Mieux, il est important que le droit de vote s’accompagne d’une garantie ferme et durable de l’exercice de ce droit dans la transparence, le droit et la vérité. Il est inutile d’hériter de dirigeants venus au pouvoir parce qu’ils ont triché ou parce qu’ils ont terrorisé les électeurs potentiels. La légitimité d’un élu réside aussi dans le taux de participation des citoyens en âge d’exercer le droit de vote. Les formes de sanctions populaires infligées aux politiciens peuvent être subtiles tout en étant dépourvues d’équivoque ; on ne peut prétendre diriger un pays dont les trois quarts des votants ont boycotté les urnes, par exemple. Il faut avoir le courage et l’honnêteté de reprendre le scrutin car il s’agit d’un d’une manifestation de rejet du candidat ou du processus électoral de façon claire et nette.
Sur le plan économique, les états africains se sont distingués en deux groupes : des pays ayant une vision et une planification du développement systématisées et d’autres, en apparence tout au moins, se caractérisant par un manque de vision et par une gouvernance qui rappelle davantage le jeu de colin-maillard plus qu’un travail d’adultes. Le premier groupe vise à s’intégrer dans l’économie mondiale comme un partenaire digne de ce nom. Pour ce faire, les pays en faisant partie investissent dans la qualité des services et des produits qu’ils apportent sur le marché tant interne qu’international. Ils élaborent des stratégies de conquête de marchés sur le long terme et envisagent des associations et des partenariats entre pays émergents afin de pouvoir tenir la dragée haute aux puissances actuelles et à celles montantes.
En revanche, le second groupe est toujours dans la logique du système d’exploitation esclavagiste, colonial et néocolonial. Il s’agit pour les dirigeants de ces pays de brader les richesses nationales aux intérêts de multinationales et d’états en quête de rapines et d’influence impérialiste. Ces pays vendent tout, pourvu que cela profite directement à la classe dirigeante. Ces pays ont un système mafieux complexe en ce sens que leur logique de gouvernance diffère profondément de l’approche classique d’une gestion saine et systématisée d’un pouvoir.
Créer des pénuries pour enrichir illicitement les spéculateurs est monnaie courante ; appauvrir la population pour la rendre plus malléable est le chemin à suivre ; persécuter toute forme d’opposition pour se conforter dans un unanimisme terrifiant et hypocrite en est la préoccupation majeure. Comme il faut endormir et séduire la vox populi, on saupoudre ici du social, on injecte là bas du ludique et c’est l’autosatisfaction totale!
S’il fallait emprunter une métaphore à l’œnologie, je dirais que l’année 2012 ne fut pas une bonne cuvée malgré quelques cépages remarquables.