Vendredi 15novembre à Bujumbura, à la veille de la célébration du 17e anniversaire de la Radio Isanganiro, les journalistes ont exprimé les principaux défis auxquels ils font face dans l’exercice de leur métier.
10h. Les locaux de la Radio Isanganiro bouillonnent d’entrain. «Nous faisons souvent face à des chefs collinaires dans plusieurs régions qui entravent la circulation de l’information. Pire, ils mettent une partie de la population à nos trousses pour surveiller nos déplacements.», raconte, B.U., assis devant son poste de travail. Aux soupçons d’autocensure qui pèsent sur Isanganiro, depuis sa réouverture en 2016, B.U. explique: «Nous sommes guidés par le souci de l’équilibre de l’information. Nous préférons souvent renoncer à la diffusion d’une information, majeure soit-t-elle, que déroger à ce principe.»
T.O., une journaliste aguerrie, avance deux catégories de dirigeants qui font dans la rétention de l’information: «Il y a des autorités zélées qui considèrent Isanganiro comme un outil de propagande à la solde de l’opposition. Certains vont jusqu’à soutenir que nous sommes des auxiliaires de Humura et Inzamba (deux organes de presse burundaise en exil, ndlr). L’autre partie est constituée d’administratifs incompétents qui ignorent totalement les prérogatives dues à leur poste, à savoir notamment la communication sur des faits cruciaux survenus dans leur localité (Insécurité, drames naturels, etc.).» T.O. cite également l’impact de la peur inspirée par le climat d’insécurité actuel: «Certaines que la diffusion de l’information nous fournie peut leur valoir des campagnes de menaces et/ ou d’intimidation, une partie de nos sources se sont rétractées.» Cependant, tout n’est pas sombre dans le constat que fait cette professionnelle des médias : «Un certain nombre de nos contacts, admiratifs de notre professionnalisme, nous favorisent toujours un accès meilleur à l’information.»
Dans un autre registre, Sylvère Ntakarutimana, patron d’Isanganiro, a affirmé, à l’issue d’une interview avec la presse, que «donner la parole à l’opposition a toujours fait partie de l’ADN d’Isanganiro. Et cela nous le faisons depuis une époque où il était rare par exemple qu’un groupe rebelle s’exprime sur les ondes d’un média». Sur le cas des journalistes d’Iwacu et leur chauffeur actuellement détenus : «Nous demandons que justice leur soit rendue. Coupables ou innocents, il incombe au droit seul de statuer sur leur cas. En ce qui nous concerne, s’ils sont innocents, nous exigeons qu’ils soient relâchés car le pays a besoin d’eux.» Et de finir sur une note de courage: «Convaincus de l’utilité de notre métier pour la nation, nous y restons fermement attachés, quoi qu’il arrive.»